Breathe 🤍

Chapitre 2 - La vie est un complot - Adam

Martha nous invite à nous installer et nous propose des rafraîchissements. J'accepte un coca, même si c'est de quelque chose de plus fort, dont j'aurais besoin. Après nous avoir servi, les deux femmes se mettent à parler administratif et je me détache totalement de leur conversation, le regard perdu vers l'extérieur. Je n'ai qu'une hâte, me retrouver seul pour soulager ma vessie et gratter quelques notes.

Soudain, les phares d'une voiture éclairent la demeure. Le véhicule vient se stationner sur le parking face au garage. Des portières claquent et l'on entend une conversation animée se dérouler à l'extérieur. La porte d'entrée s'ouvre brutalement :

- Bien sûr que tu aurais pu l'éviter ! Il fallait courir plus vite fiston.

- Je suis le meilleur sprinteur de l'équipe Papa, James a juste eu de la chan...

Ethan s'interrompt en nous voyant tous les trois assis sur le canapé.

Bruce a le souffle coupé également, mais il se reprend plus vite que son fils :

- Vous êtes déjà là, c'est super ! Adam qu'est ce que tu as grandi, lève toi que je te regarde un peu !

Je ne sais pas ce que je déteste le plus dans ce premier contact  : être le centre de l'attention ou qu'il me donne un ordre. Les secondes s'étirent et Madame Miller me regarde les yeux grands ouverts. Je l'entendrais presque me crier  : "ne gâche pas tout". Je me lève alors et le vieux me regarde de la tête au pied, tout en m'empoignant les épaules :

- Qu'est-ce que tu ressembles à ta mère ! Les mêmes yeux noisette et sa chevelure brune. C'était vraiment...

Je le coupe avec autant d'assurance que d'agacement dans la voix :

- Où sont les chiottes ? J'ai besoin de pisser.

Soudain, le calme. Les secondes s'étirent et alors que tous les regards sont fixés sur moi, Martha est la première à réagir :

- Bien sûr, suis-je bête, je n'ai pas pensé à t'indiquer les toilettes et à te montrer ta chambre. Ethan, tu veux bien emmener ton cousin à l'étage et l'aider à s'installer ?

- Oui maman, pas de souci. Allons-y. 

Il me fait signe de la main de le suivre.

Je récupère mes affaires dans l'entrée et le laisse me guider. Il a beaucoup changé depuis notre dernière rencontre où je devais avoir 6 ou 7 ans. C'était bien avant toute cette merde.

Il porte un jogging et un tee-shirt ample à l'effigie d'une équipe de football américain. Il doit faire dans les 1m85/90, comme moi, mais nos carrures sont différentes. Si j'ai plutôt un corps sec et athlétique, lui est carrément ultra costaud. Merde, il prend des prots ou quoi ?

Nous montons les escaliers en silence, puis je le suis dans cet immense couloir qui dessert plusieurs pièces. Il m'emmène au fond de celui-ci et pénètre dans une grande chambre sobrement décorée.

- Alors voilà ta chambre, me dit-il tout sourire. Comme tu peux le voir, il y a tout ce qu'il faut : un grand lit, un bureau, un dressing et ici, dit-il en se dirigeant vers une porte annexe. Tu as ta propre salle de bain et tes toilettes. Et si tu as besoin de moi, je suis à deux portes ! Il me désigne sa chambre du doigt par l'encadrement de la porte.

Pour toute réponse, je pose mes affaires sur le lit et lui adresse un simple merci. Il gesticule quelques instants sur place, à la recherche de ses mots et fini par me lancer :

- Il y a une soirée ce soir, un petit truc avec des potes du lycée dans un bar sympa. Je t'emmène si ça te dit. Mes parents pensent que c'est une soirée jeux vidéo, dans le garage de mon pote James, donc il faudra être discret.

J'hallucine, il veut déjà m'emmener en beuverie. Sauf qu'il n'a pas compris une chose : je ne suis pas venu ici pour me faire des potes et encore moins pour que l'on soit copain lui et moi. Ravi tout de même de voir que ce fils parfait a aussi ses petits travers.

- Non merci, j'ai des trucs à faire.

Comme aller pisser putain ! Sans se départir de sa bonne humeur, il reprend :

- Comme tu veux cousin, il y aura d'autres occasions...

Je le coupe :

- Appelle-moi Adam, pas cousin.

- Ok, ok cool Adam !

Ce semblant de conversation prend fin lorsque Bruce nous appelle du rez-de-chaussée.

- Mme Miller part. Venez lui dire au revoir.

Je descends les escaliers presque à reculons. Persuadé que cette dame ne s'en ira pas sans me lancer un ultime avertissement. Je me trompe ou presque. Devant tous, elle me souhaite de bien me porter et de profiter de cette nouvelle chance qui s'offre à moi. J'ai presque envie de rire, tellement c'est absurde. Où est la chance dans tout ça ? Elle quitte la maison non sans me lancer l'un de ses regards dont elle a le secret, celui qui résume parfaitement son monologue à notre arrivée.

Une fois la porte refermée, une atmosphère pesante se fait sentir dans l'entrée. Comme si personne ne savait quoi dire ni quoi faire. Alors que je m'apprête à remonter à l'étage pour m'isoler, Bruce nous interpelle Ethan et moi :

- Les garçons, on mange dans 45 minutes. Je nous fais livrer des burgers ce soir.

Martha lui lance un regard désapprobateur auquel il répond en levant les mains : 

- Ce n'est pas tous les jours que l'on accueille un membre de la famille, on peut bien fêter ça ! 

Ethan prend la parole :

- Super ! Par contre, j'ai la soirée mensuelle jeux vidéo ce soir. Je dois être chez James pour 20h30.

- Mais c'est parfait ça, au contraire, tu vas pouvoir emmener ton cousin pour le présenter à tes amis, l'interpelle Martha

- Je crois qu'il est fatigué et qu'il a plutôt envie de se reposer maman.

- Quand on est jeune, on n'a pas besoin de se reposer ! Je suis sûr qu'il est en pleine forme, pas vrai Adam ? lance Bruce.

C'est un complot ? Pourquoi ils veulent tous que j'aille à cette putain de soirée. J'en ai rien à foutre de ses potes. Je n'ai pas le temps de répondre que Martha intervient :

- Tu passeras au drugstore pour moi Ethan, je n'ai plus de lait pour les pancakes de demain matin.

Une lumière s'allume dans ma tête, drugstore = cigarettes. Je n'ai pas fumé depuis plus de 24h, je suis carrément en manque. 

- Je ne suis pas fatigué. Je peux venir.

Ethan me regarde surpris, le sourire aux lèvres.

Certes j'ai changé d'avis, mais ce n'est pas grâce à lui. L'appel de la clope est trop fort. Et surtout, j'ai bien l'intention de me barrer avant d'atterrir dans cette soirée de merde.

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