Breathe 🤍

Chapitre 32 - Voler en éclats - Adam

4 ans plus tôt

Une boulette de papier vient interrompre ma lecture. Je lève les yeux de mon livre de solfège, pour tenter d'identifier l'expéditeur. Lisa me regarde en souriant, deux tables plus loin. Je lui retourne son sourire et déplie la feuille. A l'encre rose, d'une écriture appliquée, il est noté :

Peux-tu me rejoindre dans les loges à 13h ?

J'ai besoin de ton avis : )

Je froisse le papier entre mes mains et lui adresse un hochement de tête pour lui signifier que c'est OK. Elle articule un « MERCI » silencieux et replonge dans son livre. Lisa est la plus belle fille du collège. Elle a de long cheveux châtains clairs semblables à de la soie, des yeux bleus en amande et de jolies mains toujours vernis de rose. C'est la meilleure pianiste de l'école, peut-être même du pays. Tous les garçons veulent sortir avec elle.

La sonnerie retentit et me sort de mes pensées. Je suis à peine dans le couloir que Josh et Matt me sautent dessus :

     - T'es prêt pour ce soir mec ? – Me lance Josh tout en m'attrapant par les épaules.

     - On ne peut plus prêt ! Et toi l'artiste ?

     - T'imagines même pas ! Je bous d'impatience !

Matt se rapproche et prend part à notre conversation :

     - On est d'accord, on joue toujours Wonderwall en rappel ?

     - Ecoute le Adam, tellement prétentieux qu'il pense déjà au rappel.

     - Pas prétentieux, lucide – Lui répond Matt, une expression espiègle sur le visage.

Avant d'arriver dans ce bahut, j'avais toujours eu l'impression d'être un ovni parmi les autres enfants de mon âge. Eux passaient leurs journées au city parc ou derrière leur console, tandis que je passais les miennes à jouer de la musique, regarder des replays de concerts et des tutos Youtube pour m'améliorer.

A l'Aretha Franklin Institut, il n'y avait que des gens comme moi, passionnés par la musique. Ici, j'avais trouvé ma place. J'avais rencontré Matt et Josh, la première année, le jour de la rentrée. Lorsque notre prof principal avait cité tous les instruments enseignés au sein du collège, en demandant à ceux qui les jouaient de lever la main, et que j'avais levé la mienne à quatre reprises, ils avaient été tellement impressionnés, qu'ils m'avaient sauté dessus à la sortie de cours pour me demander d'intégrer leur groupe de musique. Sans hésitation, j'avais accepté et en moins de temps qu'il n'en fallait nous étions devenus inséparables.

Comme à notre habitude, plutôt que de nous diriger vers la cafétéria pour prendre notre déjeuner, nous marchons en direction de la salle de concert. Mais aujourd'hui, est un jour particulier. Si habituellement, nous profitons de notre pause pour travailler tranquillement quelques sons. Aujourd'hui, la salle risque d'être bondée. Ce soir, c'est le concert de fin d'année et d'autres élèves vont sûrement vouloir répéter avant le grand show.

Je pousse la grande porte battante de la salle de concert. Pour un collège, la salle de spectacle d'Aretha Franklin est incroyable. Financée par les dons d'anciens élèves devenus des stars de la musique, elle forme un grand arc de cercle à l'intérieur duquel sont positionnés en gradin, des centaines de chaises pliantes en velours rouge. Au centre de cette immensité, se trouve la scène, arrosée de lumière par des projecteurs et entourée de grands rideaux rouges. La première fois que j'avais vu cette pièce, j'en avais eu le souffle coupé. Aujourd'hui, c'était devenu mon repère, l'endroit où je me sentais le mieux.