Chapitre 30 - Cœur assoiffé - Sam

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Si l'on m'avait dit ce matin que je rentrerais chez moi sur le guidon d'Adam. Je n'y aurais jamais cru. Pourtant, je sens son souffle chaud dans mes cheveux, alors qu'il pédale tranquillement en direction de ma maison.

J'avais déjà remarqué les regards appuyés des filles sur Adam. Même si lui les ignorait, ce beau brun ténébreux avait la côte auprès de la gent féminine. Rien d'étonnant. Mais lorsque je l'avais aperçu, avec cette petite rousse devant le café, si proche, un sentiment inhabituel m'avait pris de cours. Quelque chose que je ne devais surtout pas éprouver, car il laissait sous-entendre qu'Adam était plus important pour moi que je ne voulais me l'avouer. Or, il n'était pas question que ce soit le cas. A part souffrir et me détourner de mes objectifs, ça ne pouvait mener à rien.

Lorsqu'il m'avait rejointe sur son vélo, j'étais encore sous le coup de ce ressenti. Adam Brown ne devait pas accéder à mon cœur. Sous aucun prétexte. Le risque était bien trop grand.

Par la force des choses, je m'étais retrouvée sur son vélo à fuir une pluie torrentielle, avant de finir sous un kiosque pour nous protéger. Nous étions trempés et Adam était essoufflé, comme s'il venait de courir un marathon. Je n'avais pu m'empêcher de rire et de libérer toute la tension qui s'était accumulée en moi. Adam aussi avait ri. C'était la première fois que j'entendais son rire et que je voyais son visage s'illuminer ainsi. Ça m'a fait penser à l'une de ces étoiles presque éteintes dont la lumière se ravive brusquement dans le ciel. Soudain et puissant, leur éclat est plus intense que celles qui brillent en permanence.

Alors que j'étais en train de jouer quelques notes avec ma guitare, j'avais senti ses doigts chauds sur ma joue. Un frisson m'avait immédiatement traversé de la tête aux pieds. Ses yeux avaient pénétré les miens et tandis que ces doigts étaient descendus sur ma bouche, il s'était approché de mon visage. A cet instant, ma peau tout entière frémissait de désir, réclamant son dû. Pourtant, j'avais résisté. Je pouvais encore sentir son souffle mentholé sur mes lèvres, lorsque je l'avais repoussé.

Je crois que mon corps ne me le pardonnera jamais. Mais c'est mieux ainsi. Après tout, lui-même trouve que c'est une mauvaise idée et je n'ai clairement pas envie qu'il me refasse le même coup que la dernière fois.

**********

Adam stoppe le vélo devant la maison. J'observe cette demeure, la plus grande de la rue et la seule à ne pas être décorée, la seule si silencieuse et sombre en ce soir du 31 décembre. Je n'ai pas envie d'y retourner. De retrouver cette solitude et cette pression qui m'étouffent.

Je descends du vélo et Adam se défait de mon étui guitare pour me le tendre. Je l'attrape avant de lui dire « Merci ».

-        De rien. – Me répond-t-il.

Il n'en dit pas plus, mais je vois les questions et les non-dits se bousculer dans ses yeux marrons. Tout à l'heure, en jouant à un jeu de vérités et mensonge, il m'a avoué que mes yeux le fascinaient. Que devrais-je dire des siens ? Ses yeux sombres et intenses. Depuis le premier jour, j'ai l'impression qu'ils lisent en moi comme dans un livre ouvert. Existe-t-il quelque chose de plus troublant que de se sentir percer à jour d'un simple regard ?

Je finie par me détacher de ses prunelles et remonte progressivement l'allée.

- C'est ton tour Sam. 

Je comprends qu'il me parle de notre petit jeu de tout à l'heure. Je me tourne vers lui, prend quelques secondes avant de lui répondre :

-        Je n'ai jamais connu mon père.

Il m'observe, à quelques mètres de moi et me réplique d'une voix calme :

-        Vérité.

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