Suiko

Chapitre 27 : Petite discussion.

Suiko se faufilait habilement entre les chaises, malgré la pile de livres qu'elle tenait devant elle et qui lui bouchait presque entièrement la vue. Malefoy, qui s'était finalement joint à ce « rassemblement de bouseux », s'était montré particulièrement désagréable, essayant de la faire courir d'un bout à l'autre de la salle pour chercher livres et parchemins.

Bien que les caprices du blond lui aient donné l'occasion de se souvenir de toutes les méthodes de tortures qu'elle connaissait, Suiko avait réussi à masquer son agacement et ses envies de meurtre long et douloureux. Si elle voulait devenir un jour un enseignant digne de ce nom, il n'était pas trop tôt pour qu'elle apprenne à poser des limites, et à garder son calme.

Tandis qu'elle passait à côté d'un petit groupe d'élève de deuxième année, elle capta une discussion.

- ... Mandragore, je ne sais pas, et toi ?

- Les propriétés ? Aucune idée.

Suiko s'arrêta, et se tourna vers les deux garçons qui butaient sur les propriétés de la mandragore. Elle aurait pu les leur donner très facilement, mais elle avait une autre idée en tête.

- Vous avez un problème avec les mandragores ? demanda-elle innocemment.

Les deux élèves acquiescèrent, gênés de montrer leurs lacunes.

- Pas de problème, on est tous là pour progresser ! Je vais trouver quelqu'un pour vous aider ! sourit l'ancienne pom-pom girl.

Tandis qu'ils tentaient de dissimuler leur gène derrière des remerciements bredouillés, Suiko cherchait une certaine personne des yeux. Quand elle l'eut vue, elle se précipita vers lui.

- Neville ! J'ai besoin de ton aide !

- De m... mon aide ? bégaya le Gryffondor, virant au rouge brique.

- Oui ! Il y a des élèves de deuxième année qui bloquent sur les propriétés de la mandragore. J'aurais bien aimé les aider, mais j'ai peur de dire des bêtises. En plus je dois apporter ces livres à Malefoy. Tu veux bien les aider ? Je sais que tu as des notes super élevées en botanique, donc que tu ne leur diras pas de bêtises.

- Ah... oui.

- Génial ! Allez viens, que je te les présente ! fit Suiko, un énorme sourire sur le visage.

Elle réussit à libérer une de ses mains, et se servit de cette dernière pour attraper la manche de Neville, et le trainer dans son sillage jusqu'aux élèves.

- Voilà Neville ! Il est super fort en botanique, et il pourra vous aider pour tout ce qui touchera à cette matière ! Sur ce, je vous laisse, j'ai un blondinet à faire bosser ! Bisous ! fit Suiko, avec un petit geste de la main.

Une bonne demie heure plus tard, Malefoy ayant compris tout ce qu'elle lui avait dit, elle repassa dans ce coin de la salle, cherchant quelqu'un à aider. Elle surprit un attroupement d'une bonne dizaine d'élèves. Curieuse, elle s'approcha pour découvrir ce qui les fascinait tellement. Un grand sourire prit possession de ses lèvres. Ce n'était pas un sourire made in Suiko. C'était un sourire attendri.

Neville était assis devant les élèves, leur expliquant les propriétés d'une espèce de plante quelconque. Les élèves l'écoutaient religieusement, prenant des notes à toute vitesse. Un élan de tendresse sans pareille enveloppa Matsuzo.

- Pourquoi tu regardes Neville comme ça ? T'es tombée amoureuse ?

Définitivement, l'imbécilité devait s'être incarnée en Ronald Weasley. C'était à se demander ce qu'Hermione lui trouvait !

Le rouquin prit presque peur en voyant le sourire qu'avait Suiko quand elle se retourna.

- Sérieux, t'as quand même pas craqué pour lui ?

- Il est le petit frère que j'ai toujours voulu avoir, fit Suiko, avec son sourire attendri.

Ron se tut, scotché du fait que quelqu'un puisse vouloir Neville comme petit frère. Puis il se ravisa : la personne qu'il avait devant lui n'était pas « quelqu'un ». C'était Suiko, une sorcière imprévisible.

- Sérieux Suiko, je pense que si quelqu'un d'autre que toi avait sorti cette phrase, j'aurais trouvé ça bizarre. Mais si c'est ma Serpentard préférée, ça passe, rit-il.

- Ah... Donc si ce n'était pas Suiko Nakatomi qui avait dit ça, ce serait bizarre ?

- Ouais ! Super bizarre même ! rit Ron, avant de se désintéresser de la blonde : Harry, viens, il faut que je te montre une image de Kuhm ! J'ai eu un mal de chien à l'obtenir, et ...

La voix de l'avant dernier de la fratrie Weasley s'éteignit, étouffée par la distance et le brouhaha ambiant. Suiko resta figée pendant quelques secondes, avant de sortir doucement de la salle. Elle s'enfuit à travers les couloirs, et se faufila derrière une tapisserie. Cette dernière dissimulait une petite porte qu'elle s'empressa de pousser.

Il faisait noir dans le minuscule couloir, qu'aucune torche n'éclairait. Cependant, si son souvenir était exact, il y avait une échelle qui permettait d'accéder au toit, ce qui permettait d'avoir une merveilleuse vue sur Poudlard. Ce lieu avait toujours eu un effet apaisant sur lui, car il lui rappelait le belvédère qui se trouvait sur une des petites collines de son jardin.

Il chercha l'échelle, mais il ne restait plus rien. Rien ne se détachait des murs froids et humides.

Alors Matsuzo se laissa couler sur le sol glacé.

Aucune larme ne coulait de ses yeux marrons. Le temps des larme avait été passé depuis des centaines d'années. Il se sentait couler au fond de lui. Comme un homme qui se noyait dans un océan sombre, bleu et noir. Un océan glacé, qui empêchait de respirer.

Et il se sentait couler, la lumière s'éloignant de lui sans qu'il ait la force de se rapprocher d'elle. Il pouvait seulement la regarder s'éloigner avec un regard éteint. Et toujours cette impression de couler. Couler sans rien pour se retenir. Couler dans cette eau froide qui n'existait pas. Se perdre dans ces émotions, et voir la lumière s'éloigner encore et encore, vite puis lentement, lentement puis vite.

Et toujours ce froid, cette solitude qui l'étouffait.

Une main se posa doucement sur son épaule, tandis qu'une voix l'appelait calmement.

- Matsuzo.

Il ouvrit ses yeux, et vit Dumbledore accroupi à ses côtés.

***

Note de l'auteur : si vous aviez fini comme lui, comment l'auriez vous pris ? Personnellement, cela aurait fait très mal.