Chapitre 41

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Le jour était venu.

Drago avait passé la dernière semaine près de Harry en étant collé à lui — être plus proche reviendrait à fusionner — et il lui avait ouvert son cœur. Lui si pudique habituellement avait finalement avoué à quel point il l'aimait.

Le dernier soir, Harry s'était endormi dans ses bras, l'air détendu et confiant, et Drago avait eu du mal à s'éloigner. Il le regarda dormir un long moment, habillé de pied en cap, le livre de Jules Verne à la main, avec le sentiment qu'il n'avait jamais rien fait d'aussi difficile.

S'arracher le cœur serait probablement moins douloureux que de l'abandonner en cet instant, mais Drago était déterminé. C'était la seule chose à faire : disparaître pour libérer Harry des chaînes qui le maintenaient lié au Ministère. Après tout ce que le jeune homme avait fait pour lui, il était temps de lui rendre une partie de ce qu'il avait offert.

Drago n'avait pas le moindre doute que Harry serait furieux en prenant conscience de ce qu'il avait fait et qu'il se lancerait à sa recherche. Cependant, le plan soigneusement mis au point avec l'aide de Hermione lui permettrait de ne pas être retrouvé. Pas tant qu'il ne le voulait pas de toute façon.

Avec un soupir résigné, la poitrine serrée et douloureuse, Drago se pencha sur Harry et embrassa légèrement ses lèvres. Juste un effleurement pour ne pas le réveiller, une brève caresse de leurs lèvres parce qu'il ne pouvait pas partir sans un dernier baiser. Il résista à l'envie de repousser ses cheveux, d'effleurer sa peau chaude.

Près de Harry, sur son oreiller, il déposa un morceau de papier et il eut un instant de malaise en se rendant compte qu'il avait fait la même chose sept années plus tôt. Il était parti en pleine nuit, sans prévenir personne, en laissant juste un bref mot. Drago secoua la tête pour chasser cette idée, s'obligeant à se souvenir qu'il agissait ainsi pour protéger Harry cette fois, et il recula d'un pas, incapable de détourner son regard de Harry, profondément endormi.

Lorsque le jeune homme ouvrirait les yeux, il serait seul et il trouverait les derniers mots de Drago : « Pardon. Je t'aime. ».

Il avait pensé lui écrire une longue lettre et lui expliquer en détail les raisons de son geste, mais il y avait renoncé. Harry était têtu et il refuserait d'admettre l'évidence. De colère, il serait capable d'aller voir le ministre et de le confronter. Il ferait un coup d'éclat, sans s'inquiéter des conséquences, sans réfléchir à ce qui se produirait pour lui.

Hermione avait assuré à Drago qu'elle ferait en sorte d'expliquer calmement à Harry les raisons de son départ et de lui faire comprendre qu'il n'y avait pas d'autre alternative.

Lorsque le portoloin se déclencha enfin, Drago était prêt. Il avait passé les dernières minutes à attendre, debout auprès du lit, le livre de Jules Verne plaqué contre sa poitrine, les yeux fixés sur Harry. Cependant, Drago ne put retenir un hoquet de stupeur en croisant le regard vert familier au tout dernier moment, à l'instant précis où il disparaissait de leur appartement familier. La tristesse qu'il y lut lui broya le cœur et il arriva à sa destination en larmes, effondré.

Il lui fallut de longues minutes pour se reprendre et regarder enfin autour de lui. Le paysage désertique qui l'entourait n'était pas vraiment accueillant, avec sa terre rouge et ses buissons épars. Cependant, Drago n'en fut pas vraiment inquiet, puisqu'il s'était longuement renseigné sur sa destination.

Il était en Australie. Le portoloin devait le conduire dans un lieu désert, près d'une ville que Hermione lui avait conseillée. En effet, elle tenait à ce qu'il s'installe avec ses parents, pour garder le contact avec lui. Probablement pour le ramener à la minute où les choses seraient moins compliquées dans le monde magique.

Drago avait accepté ses conditions. Cependant, il avait soigneusement caché à Hermione qu'il ne comptait pas suivre son plan à la lettre.

Il lui avait promis de donner des nouvelles, mais il n'avait jamais eu l'intention de s'installer avec les Granger. La dernière fois qu'il avait voulu garder un lien ténu avec son ancienne vie — en reprenant le nom de jeune fille de sa mère — le ministère de la magie anglais l'avait localisé. Harry était loin d'être stupide et il ne tarderait pas à comprendre qu'il avait reçu l'aide de Hermione. Drago était prêt à parier que son Gryffondor impétueux serait en Australie dès la semaine suivante, déterminé à le convaincre de rentrer à ses côtés...

Il avait tiré des leçons de ses erreurs précédentes. Cette fois, il allait tout abandonner et devenir un vrai fantôme : alors que Hermione planifiait son emménagement en Australie, Drago de son côté faisait en sorte de se renseigner sur les façons dont il pourrait voyager — à la moldue — sans laisser de traces.

Avec un léger choc, le jeune homme se rendit compte qu'il n'avait même pas pris sa baguette en partant. Il l'avait laissé sur la table de chevet, l'endroit où elle prenait la poussière parce qu'il n'avait plus le réflexe de l'utiliser...

Ça n'avait pas vraiment d'importance, cependant. Il n'avait pas la moindre intention de se rapprocher des communautés magiques du monde. Il allait juste errer d'un pays à l'autre, travailler dans n'importe quel domaine le temps de gagner le montant de son prochain voyage. Avec un peu de chance, ce serait une vie assez prenante pour qu'il n'ait pas le temps de penser à ce qu'il avait perdu ou à la souffrance de Harry...

Déterminé, Drago regarda autour de lui. Alors qu'il était parti en pleine nuit à Londres, il était presque midi à cet endroit et il y faisait déjà une chaleur étouffante. Un peu plus loin, il apercevait une route poussiéreuse, déserte, et il s'en approcha lentement, jusqu'à arriver devant un panneau indicateur.

Plenty Highway. La route douze conduisait dans un sens à Alice Spring, petite ville du Nord australien, où vivaient les Granger. Hermione lui en avait suffisamment parlé pour qu'il sache que cet endroit était entouré d'attractions touristiques, mais que c'était également le point d'entrée vers le centre désertique de l'Australie. Il était à près de deux cents kilomètres de la ville, mais Hermione l'avait encouragé à transplaner, pensant qu'il aurait sa baguette, pour se rapprocher de Alice Spring, puisque les distances en Australie étaient toujours colossales...

Sous TutelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant