Après un petit déjeuner au restaurant, Deborah et moi évoluons dans le centre commercial, regardant les vitrines, étudiant avec effarement la mode destinée à nos enfants, le son assourdissant des boutiques, et les prix, surtout les prix.
« Cinquante dollars pour un t-shirt ! », s'exclame Deborah. « Et regarde le prix du jean ! Merde.
— Tu sais c'est quoi le pire, ma mère avait le même dans les années quatre-vingt ! Les mêmes trous sur les cuisses et aux genoux, ils n'ont rien inventés et il ne coûtait pas... cent soixante quinze dollars !
— Nous avons été chanceuses, nous sommes nées dans un entre-deux, nous avons échappé à la mode baba cool, nous avons connu les années quatre-vingt par nos parents et vécu les années quatre vingt dix.
— On s'habillait n'importe comment », rigolais-je. J'ai eu ma période spice girls.
— T'était plus qui ?
— Sporty, j'étais toujours en survêtement de sport. Toi ?
— La mode grunge. Chemise en flanelle et t-shirt d'une taille au-dessus avec une salopette », dit-elle en éclatant de rire. « Tu peux m'expliquer le besoin de montrer son caleçon ? Je ne comprends pas. Heureusement que Tucker n'en est pas là, je préfère lui acheter des bretelles pour être certaine que son pantalon reste à sa place. On peut parler des enfants ?
— Bien sûr », dis-je alors que nous nous asseyons sur un banc.
« Je suis d'accord avec toi, ils sont beaux tous les deux, ils se sont toujours aimés, et c'est bien, mais ils arrivent à un âge important, Taylor, admets-le, je veux que Tucker se concentre sur ses études et son entrée à l'université. Après l'université, s'ils s'aiment toujours, ils se remettront ensemble, mais là, c'est le temps de préparer leur futur. Riley va passer son SAT, elle devrait s'y concentrer à cent pour cent. Ta fille est brillante, je le sais, mais l'université, c'est un autre niveau.
— Tu as raison, Debbie. Il faut qu'ils se donnent à fond dans leurs études. Je vais parler à Riley en rentrant. Heureusement que nous avons des enfants sérieux, on peut dire que nous avons été chanceuses, ils nous ont épargné un bon nombre de conneries.
— Oui, au moins, de ce côté-là, ils nous ont évité des nuits blanches. On va faire un tour chez Flora pour voir ce qu'il y a qui sent bon ? Ensuite, il faut que je rentre, Tucker a un match de baseball. »
Je récupère une Riley aux yeux pétillants, j'espère que Debbie n'a rien remarqué, mais ma fille est sur un nuage et je sais pourquoi. Je ne vais pas la brider, à son âge j'en faisais autant, et même pire, je faisais le mur pour aller faire la fête. L'époque était différente. Le monde était supposé s'arrêter le 31 décembre 1999, alors j'en profitais. Le bug de l'an 2000 n'a pas eu lieu, je dansais comme une déchaînée sur All Star de Smash Mouth et j'étais complètement hystérique en chantant du Eminem, je tortillais mon cul comme Jennifer Lopez, mon hymne de 1999, était Living La Vida Loca, Ricky Martin avait tout compris, j'avais seize ans.
Je n'ai plus seize ans.
Je coure avec Riley. Physiquement, je suis en forme, je me suis toujours tenue en forme, mais j'ai tout de même quarante ans. J'essaye de lui parler, mais comme elle vient de coucher avec Tucker pendant que j'occupais sa mère au centre commercial, c'est plutôt difficile de lui demander de faire un break de quelques semaines à quelques mois. Nous faisons quelques exercices sur un parcours, là, je suis encore capable de tenir la distance, j'ai l'endurance et les muscles, mais Riley a l'énergie de son âge.
« C'est bon, j'arrête », dis-je en me laissant tomber sur le sable.
« Tu tiens encore la route, pour ton âge.

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Faceless
Mystery / ThrillerQuand Riley Price-Hamiltion, seize ans, se fait arrêter par la police un beau matin et se retrouve au milieu d'un cercle médiatique, elle ne se doute pas qu'elle ignore tout du passé de sa mère. Taylor Price est loin d'être la la mère au foyer qu'el...