Faceless

Chapitre 28

Ça me fait quelque chose de regarder les filles partir dans des directions différentes. NYU est du côté de Soho, Columbia est plus proche de la maison, direction Harlem. Ça me fait quelque chose, je repense à toutes ces rentrées scolaires où je l'ai accompagnée, puis accompagnée jusqu'à l'arrêt de bus au coin de la rue. Aujourd'hui, elle n'a plus besoin de moi. Je me mets aussi en route, j'ai une réunion. L'enquête est terminée et je n'ai eu aucun écho du résultat. Je suppose que si les enquêteurs avaient découvert quelque chose, je serais déjà derrière les barreaux, pour de bon ce coup-ci.

Croisant Jewel devant l'ascenseur nous discutons en copines. Son aide sur l'enquête a été précieuse et nous a rapproché, mais c'est une hackeuse, je me méfie quand même. Mes affaires posées à mon bureau, je vais me servir un café et j'attends, je n'ai rien d'autre à faire, je n'ai plus de supérieur, la mission pour laquelle j'ai été réengagée est bouclée, officiellement je n'ai plus rien à faire ici.

Je me sers un deuxième café et suis le mouvement vers la salle de réunion alors que le directeur de la NSA en personne s'est déplacé. Je me souviens de lui, je l'ai croisé à l'époque, c'était un con prétentieux. Je crois que je l'ai fait pleurer.

« Bonjour à toutes et tous. Je serais bref, cette réunion ne comporte qu'un point, la nomination de votre nouveau directeur d'antenne. Monsieur Simmons ne reviendra pas en poste, donc avec les sous-directeurs a été voté un profil. Espérons que tout ira bien cette fois-ci. Taylor Hamilton.

— Je ne peux rien promettre, si c'est un con, je le dirais.

— Je sais, Madame la Directrice de l'antenne de New York. »

Je recrache ma gorgée de café avant d'éclater de rire et de rapidement me taire devant son sérieux.

« C'est une blague ?

— Non.

— Tu as voté pour ?

— Oui.

— Pourquoi ?

— Pourquoi j'ai voté pour toi ? Tu as raison de poser la question. Tu es une emmerdeuse indépendante, mais tu es douée, tu l'as toujours été.

— Tu étais nul, cela veut dire que je peux prétendre à ton poste ?

— Ne commence pas ! Donc ?

— Quoi ?

— Acceptes-tu ?

— Non. Ça dépend du salaire, des avantages sociaux. On a une assurance collective ?

— Viens dans mon bureau, nous allons discuter.

— Mon bureau, ce n'est pas le tien.

— Acceptes-tu ?

— J'ai besoin de temps libre, j'ai un deuxième emploi. » Je le regarde, exaspéré, moi je pense aux filles et à la façon de leur expliquer que je suis désormais la directrice de la NSA pour New York. Le seul avantage que je vois, c'est que plus personne ne va venir me faire chier à six heures du matin.

Dans le bureau, il m'explique mes tâches, je pose mes conditions qui sont acceptées. Étrangement, l'annonce de mon éventuelle nomination a filtré, des agents d'autres agences se sont permis de donner leur avis. Je suis les dix plaies d'Égypte et un astéroïde destructeur de planète à moi seule. J'ai un caractère de merde et une très haute opinon de moi, mais je suis le seul choix évident pour diriger une équipe de la NSA. Mon dossier classifié sur le 11-Septembre est réapparu sur le tapis. On m'accordait tout ce que je voulais, tant que j'acceptais le poste.

« J'étais là, avec toi, ce jour-là, Taylor, je n'oublierai jamais cette journée, je te voyais réfléchir à une telle vitesse, concevoir ce plan impossible et réussir. Tu étais la plus douée d'entre nous et tu avais près de quinze de moins que nous. Il était temps que tous sachent ce que tu as réussi alors que nous avions jeté l'éponge.