Ascendant. ~ [Publié chez Nisha Et Caetera]

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Dans le premier Fast And Furious, Dom, le personnage de Vin Diesel a dit « Je ne vis que pour les quatre cents mètres d'une course, tout le reste m'est égal, car pendant ces dix secondes, je suis libre ! » J'aime bien cette citation. Elle ne me représente pas entièrement, mais elle me parle. Parce que quand je suis en plein Run, je ne pense à rien d'autre et, comme Dom, je me sens libre. Je me laisse envahir par les sensations que me procure la vitesse. Les vibrations de la voiture me donnent des frissons. Les ronflements familiers du moteur sont une douce musique à mes oreilles. Et je me contrefiche du reste. Je suis seule. Seule avec moi-même pendant toute la durée de la course.

La voiture de Kevin est toujours devant moi quand nous arrivons pour la première fois dans la zone où les virages s'enchainent. Mais comme dit Tristan « tant que l'on voit encore l'adversaire, la course n'est pas perdue ». De plus, je sais que le premier tournant est en épingle à cheveux et que Kevin aura peur. Autant les longues routes sinueuses sont mon point fort, autant lui est meilleur sur les lignes droites. C'est donc ici que j'aurai la seule occasion de prendre l'avantage.

Les yeux rivés sur la Seat, j'attends la parfaite opportunité pour doubler et pouvoir prendre les devants. Mais à mon grand étonnement, Kevin ne ralentit pas autant que je le pensais et passe la difficulté sans aucun problème. Il arrive même à reprendre un peu d'avance. J'ai été trop confiante !

Les sourcils froncés, je le regarde enchainer les virages suivants de la même façon, alors que je fais de mon mieux pour le rattraper. Je sais pertinemment que ce n'est que le début de la course et que j'aurai encore l'opportunité de le doubler. Mais je suis déstabilisée par la facilité qu'il a eu à appréhender ces tournants. Il déteste ça. Je le sais : je me souviens de lui piquant des colères monstres quand on lui annonçait que les Runs se faisaient sur des routes de campagne. Il a du s'entrainer, ce n'est pas possible autrement !

Les mâchoires serrées, les yeux noirs et les mains crispées sur le volant et le levier de vitesse, je sens la colère et l'adrénaline monter en moi. Je respire fort et mon cœur bat la chamade. J'ai l'impression d'être plus vivante que jamais. J'ai l'impression d'être vraiment moi. L'idée d'avoir foiré mon semestre ne me fait plus rien. La dispute avec les filles me semble très loin. La seule chose qui compte maintenant c'est gagner !

Alors que l'on sort du virage précédant la carrière, la voiture rouge de Kevin freine subitement et s'arrête au milieu de la route. Surprise, je fronce les sourcils. Qu'est-ce qu'il a inventé encore ?

Pendant deux secondes, j'hésite à m'arrêter à côté de lui pour lui demander ce qu'il se passe, mais je réagis finalement que c'est sûrement une de ses idées stupides pour me narguer. J'écrase alors la pédale d'accélérateur et me serre à la limite du fossé. Sans même le regarder, je passe à côté de lui et fonce droit vers la ligne d'arrivée, où je vois la foule crier. En voyant ma réaction, ou plutôt, mon absence de réaction, mon ex démarre sur les chapeaux de roue et essaye de me rattraper. Malheureusement, il a fait une erreur et je vais lui faire payer. Il s'est fait avoir à son propre jeu !

Le long de la route, les arbres ne sont que des masses floues et je trouve ça beau. Ça me fait penser à une sorte de peinture abstraite. Ça serait sûrement encore plus joli si l'on n'était pas en hiver, mais on ne peut pas tout avoir.

Le tournant en épingle à cheveux est à nouveau devant moi et en laissant faire mon instinct, je ralentis moins que tout à l'heure. Tout se passe bien et je me mets à sourire comme une idiote, alors que je continue à la même vitesse dans les autres courbes. J'ai accentué l'écart entre Kevin et moi et ça me réjouit à un point inimaginable.

Tristan m'a toujours dit « Si tu es devant, ne regarde jamais dans le rétroviseur. » Je l'ai toujours écouté. Pourtant, au moment où je passe la ligne pour entamer mon dernier tour, je ne peux m'empêcher de jeter un coup d'œil derrière moi. La Seat n'est même pas dans le virage et automatiquement, mon estomac se noue. Je sais que je lui ai mis quelques mètres dans la vue, mais à ce point, cela me semble invraisemblable. Et s'il lui était arrivé quelque chose ? Et s'il avait voulu faire son malin et qu'il était sorti de la route ? Et s'il avait croisé un autre véhicule et qu'ils avaient eu un accident ?