Didn't go to plan
Roger sait qu'il n'est pas censé se soucier de tout ce qui peut bien se passer sur le court et en-dehors pendant les compétitions, mais il y a cette nouvelle vague de jeunes joueurs frappant à la porte pour venir remplacer les anciens, et il a l'impression qu'il fait déjà partie d'un temps ancien, du haut de ses vingt-six ans. Il ne se trouve pas vieux, et encore moins révolu. Il est même dans la force de l'âge, et au meilleur de sa forme, c'est pour ça qu'il est numéro un mondial et qu'il ne laissera jamais personne lui dire le contraire. Mais depuis qu'il a posé les pieds en Australie, il y a quelque chose de bizarre, et ça n'a rien à voir avec son âge.
Non, il y a cette légère odeur flottante dans l'air, et Roger n'arrête pas de la sentir partout où il passe. De son hôtel aux terrains d'entraînements, sous la douche, au réfectoire... Il n'y a rien de plus désagréable que de ne pas savoir quoi faire pour lutter contre quelque chose qui n'est pas de ressort, et il a l'horrible sensation que cette odeur va finir par lui coller à la peau, s'il ne réussit pas à trouver un moyen de s'en débarrasser le plus rapidement possible, pour que ça ne le dérange pas durant la compétition. Il ne saurait pas exactement mettre les mots sur ce que cette odeur recèle entièrement, mais il y a comme de la brioche et de l'amande, et Roger trouvait ça doux, avant que ça ne devienne tellement répétitif et intoxiquant qu'il ne peut plus la supporter.
Au départ, il a cru que c'était le shampoing de l'un des autres joueurs, mais après avoir passé il ne sait combien de temps à traîner autour des sacs de tout le monde pendant les douches après les entraînements, il n'a jamais rien senti qui ressemblait à cette odeur provocatrice. Donc, il a soupçonné que c'était l'un des employés du service ATP qui sentait un peu trop fort l'odeur de son Omega, mais Roger en a vite conclu que ce n'était pas logique, parce que les employés n'auraient aucune raison de se retrouver à partager le même hôtel qu'eux. Alors, entre deux entraînements, Roger a commencé à enquêter avec un peu plus d'intérêt, en mettant toujours plus d'eau de Cologne sur sa peau pour faire taire l'odeur de brioche devenant de plus en plus alléchante pour ses instincts d'Alpha.
Il a fait le décompte de tous les joueurs présents en Australie, de tous les Alphas, Betas, et Omegas, et il a essayé tant bien que mal de savoir lequel d'entre eux aurait pu porter cette odeur aussi tenace. Il en est arrivé à la conclusion que les joueurs Omegas du circuit ne pouvaient pas avoir cette odeur aussi forte s'ils étaient déjà revendiqués par des joueurs Alphas, alors il a encore affiné sa liste. Et puis, il s'est souvenu de cette vieille règle du tennis, que les Omegas en chaleur n'avaient pas le droit de participer aux tournois, pour leur propre sécurité, et pour ne surtout pas déranger les Alphas. Roger a dû se retenir un certain nombre de fois d'aller voir les organisateurs et de leur signaler que cette règle n'était pas du tout respectée.
Mais à la place, il a continué de se méfier de tout le monde, alors que la date de son premier match approchait à grands pas, et Roger n'a toujours pas trouvé la source de cette nuisance. Ça le dérange de moins en moins, parce qu'il a fini par s'habituer, mais il donnerait cher pour pouvoir trouver cet Omega et lui faire comprendre qu'il n'a rien à faire par ici, s'il ne veut pas se retrouver avec une marque de morsure sur le cou. Voulue ou non.
En fait, maintenant qu'il s'entraîne face à Rafa et que ses pensées ne font que tourner autour de cet Omega mystère qui lui gâche la vie depuis qu'il a oublié de ses foutues pilules, Roger est obligé de ressentir ce manquement au fond de lui. C'est vrai qu'il est dans la force de l'âge, mais il n'a toujours pas trouvé l'amour de sa vie. Il pensait que ça se ferait facilement, après tout, il est sûr de lui et aucun Alpha n'ose l'affronter directement, mais il imaginait qu'un Omega lui tomberait naturellement entre les bras et qu'il n'aurait pas à travailler de son côté pour tomber amoureux, ou au moins ressentir cette attraction envers un Omega. C'est raté, et Roger ressent de plus en plus ce besoin de trouver un Omega, pour satisfaire l'instinct insatiable qui l'habite.
