V ◇ C'est quoi cette blague ?

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◇ Dans la fraîcheur de l'obscurité et dans la pénombre des ruelles silencieuses, avec un entrain semblable à celui d'un gamin la veille de Noël, je me dirige sereinement dans les rues de la ville vers un nouveau départ. J'attends ça depuis si longtemps.

A l'heure pour mon premier jour, je passe la porte du loft, fier comme un coq. Foulant le sol lustré et illuminé par le soleil levant filtrant à travers les immenses baies vitrées, j'attends sagement que l'on viennent à ma rencontre.

Accueilli par la directrice de la compagnie elle même, je suis enseveli sous une montagne d'éloges. Chose à laquelle je ne sais jamais comment répondre. Alors, le rouge aux joues, je balbutie des remerciements à chaque compliment sur ma technique parfaite ou l'originalité de mes propositions, tout penaud.

Une visite du bâtiment plus tard, elle me conduit à mon casier et me lance directement dans le feu de l'action. Me voilà déjà sur le parquet ciré, mon nouveau binôme attribué, Maimi, de son petit nom, pour un échauffement digne de ce nom. Dire que je me plaignais des cours de la fac...

Après déjà deux heures de dur labeur, une pause s'impose. Et mon corps se rappelle douloureusement des dernières semaines passées sur le canapé. Mais faisant fît des plaintes répétées de mes petits muscles endoloris, je sourie béatement comme un con, heureux d'en chier en compagnie des meilleures.

Mais ma bonne humeur disparaît rapidement quand mon estomac me rappelle à l'ordre. Je l'avais oublié celui là. Je m'éclipse le plus discrètement possible pour rejoindre les toilettes. Vérifiant que personne n'y est, je m'enferme et me résigne à vider son contenu.

Moi qui pensais être guéri, avoir laissé cette période maladive derrière moi, je pouvais toujours rêver. Ça fait maintenant cinq jours que les nausées me prennent tous les matins. J'espère que ça ne va pas s'éterniser et encore moins me déranger dans ce nouveau job parfait. C'est assez désespérant à la longue.

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La semaine passe tranquillement et les journées prennent un semblant de routine. Échauffements, répétitions, étirements, de quatre à huit heures par jours. Épuisant éreintant, mais si plaisant. Si à cela on rajoute la rapidité à laquelle mes compères m'ont integré parmis eux ainsi que leurs talents grandioses et leur gentillesse, ma vie ressemble un peu au monde des bisounours. Que demander de plus ?

La routine dont je me passerai bien, par contre, c'est celle que mon estomac a instauré sans mon consentement. Et il est réglé à la minute près le con. Pour le moment, c'est passé plus ou moins inaperçu et j'en suis bien content. Mais je vais peut être penser à aller faire cette échographie abdominale finalement. Au cas où, on sait jamais.

Après une semaine de six jours à fond, et un jour de congé durement mérité accordé, je retrouve Hiroki à la fin de la répète pour boire un verre avant d'aller dormir douze heures d'affiliées. Il m'accueille comme à son habitude, avec sa joie débordante qui pourrait faire fuir n'importe quel coup de déprime.

- Yo bro ! Content de te voir ! Ça va pour toi dans ta prestigieuse compagnie ?

- Super ouais, j'ai pas à me plaindre même si je douille. C'est des grands malades de la perfection au millimètre près

- Fallait pas choisir les plus réputés aussi ! Mais bon, la perfection ça te connaît. Tu en es le modèle même lorsque tu t'y mets

- C'est sur que là, j'ai rien à redire. Et toi, je présume que ça roule vu ta tronche

- Carrément mec, ils sont géniaux là bas. Je suis aux anges

- Ravis pour toi

- Dit, on se fait une soirée avec tout le monde pour ton anniversaire la semaine prochaine ?

- Grave ouais, mais je vais pas avoir le temps d'organiser un truc de fou, vu le nombre d'heures libres à mon actifs

- Super ! Et t'inquiète, on gère l'organisation

- Pas de plans foireux OK ? Je te connais

Son rire résonne dans le petit bar et m'arrache un sourire en coin. Une chaleureuse soirée et une étreinte amicale plus tard, je regagne le campus, égayé,  comme toujours après avoir croisé cette cascade ambulante de bonnes ondes.

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Comme pour me rappeler que la vie est injuste, la semaine suivante fût de plus en plus dure. Mon corps se remettant à décliner, j'ai décidé de prendre rendez vous pour l'écho. Mais à mon plus grand bonheur, pas de place disponible avant la fin de la semaine. Génial. Le karma de merde.

Mes nouveaux examens sanguin faits le matin même en main, je me trouve donc actuellement entassé dans le métro pour rejoindre la clinique alors que c'est mon putain d'anniversaire.

J'espère qu'il va trouver un truc parce que je suis sur les nerfs. Cette espèce de semblant de gastro que je me traîne depuis des semaines, plus la fatigue des répétitions, ça me plombe le moral. Et c'est pas bien vendeur tout ça, pour se faire une place durable dans ce milieu si sélectif.

Par contre, cela doit être une manie chez les médecins de laisser leur patient en plan. Surtout quand ils mettent pas de chauffage malgré la pluie dilluviale et qu'on te demande de retirer ton haut pour l'exam. Et je vous parle même pas du gel glacé qu'il vient de me badigeonner sur le bide.

- Alors, voyons s'il y a quelque chose qui cloche là dedans

Un marrant celui là. Et le revoilà entrain de contempler son écran pendant que je me pèle le cul.

- Ca donne quoi ? Y'a rien c'est ça ? Je perds mon temps, je l'avais dit

- Hum, je vais aller chercher mon collègue pour qu'il appuie mon avis. Patientez un instant

Et il me largue, encore, torse nu, le ventre gélatineux. Il a quoi mon estomac pour qu'il soit pas sûr de lui comme ça ? Très rassurant.

Le deuxième médecin entre, mes résultats sanguins en main et se remet à triturer mon ventre avec sa machine. Il me passe ce truc sur toute la ceinture abdominale, le pubis même et va jusqu'au bas de mon dos au niveau de mes reins.

Non non, je ne commence pas à paniquer. C'est juste qu'il font des têtes de six pieds de long et qu'ils ne sortent strictement aucun son depuis tout à l'heure à part des "humhum".

- Et sinon, ça vous dit de communiquer ?

- Oui oui excusez nous, on essaye juste d'être sûr de notre diagnostic

- Donc y'a un truc en fait

- Oui c'est le cas de le dire

- Mais encore ?

- Bon, alors, reste calme d'accord, mais au vu de tes examens sanguins et des prises de l'échographie, nous sommes maintenant certains que tu es.. comment dire .. enceint

Merde, c'est quoi cette blague ? Bug total, mon cerveau a quitté le navire ◇

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◇ Anomalie ◇Où les histoires vivent. Découvrez maintenant