◇ Une fois devant son pallier, une vague d'appréhension s'abat sur moi. Je me sens tout d'un coup très con d'avoir demandé à venir ici. Comme si, le fait que je rentre dans son appartement voulait dire inconsciemment quelque chose.
Il m'invite à entrer rapidement et referme la porte dès que j'ai mis le deuxième pied à l'intérieur. Une pointe de doute s'empare de moi et je me retourne pour l'interroger du regard.
- Pardon de t'avoir pressé. C'est juste qu'une de mes chatte vient d'avoir des petits et ils ont un penchant pour la fugue
Et effectivement, au moment où il prononce ces mots un tsunami de boules de poils vient s'échouer à nos pieds. Je les enjambe tant bien que mal en évitant d'en faire des crêpes pour suivre Kounen jusqu'au salon. Et il s'avère que cette pièce est elle aussi envahie de bestioles poilues, d'un gabarit un peu plus imposant.
- Mais t'en a combien ?
- 11 en tout. 3 mâles, 4 femelles et les 4 chatons
- C'est pas un peu exagéré pour un appart ?
- Si bien sûr. Mais je ne peux pas me détourner quand j'en croise un à l'agonie dans la rue qui m'appelle à l'aide
- Tu les as tous trouvés dehors ?
- Oui. Blessés ou mal en point. Et la dernière attendait des petits mais je ne l'ai compris qu'une fois qu'ils étaient entrain de sortir
- Hum, un sauveur dans l'âme quoi
- Voilà oui ! Je me sens certes de plus en plus à l'étroit et avec les petits, ça va être horrible mais je ne peux me résoudre à les abandonner alors qu'ils ont choisis de rester dans mon foyer malgré qu'ils aient tous retrouvé la santé
- Oui je connais. Savoir que ta vie va devenir un enfer mais ne pas pouvoir t'empêcher d'hésiter entre tes valeurs et ce qui est le mieux pour toi tout en prenant en compte les besoins de chacuns
Il me prend la main, une lueur de tristesse dans les yeux et me conduit jusqu'à son canapé.
- Tu penses aller à l'encontre de tes valeurs si tu fais le choix d'avorter ? Que c'est une décision égoïste ?
- Un truc dans le genre oui. Mais en même temps, le métier dans lequel je m'engage surtout avec les ambitions que j'ai, ne correspond pas du tout avec le fait d'avoir un enfant. Je ne dis pas que c'est impossible mais on connaît tous les deux le mode de vie d'un danseur pro. Je vois pas l'intérêt d'avoir un enfant si c'est pour ne pas être à ses côtés
- Oui je comprends. C'est une des raison pour lesquelles je n'en voulais pas au début de ma carrière
- Et puis, je ne suis déjà pas en phase avec moi même, je ne vois pas l'intérêt non plus de lui imposer un parent instable. Quand je vois tous ces parents qui font des gosses en ne pensant qu'à eux, en croyant que ça va sauver leur couple ou bien qu'il fera ce qu'ils n'ont pas réussir à faire de leur vie ou encore qu'il apportera la joie nécessaire à guérir tous leurs trauma. La plupart font des enfants pour eux même alors qu'il faudrait plutôt penser à la vie que tu vas lui donner ou à ce que tu vas lui transmettre
- Je suis de ton avis même si ma réflexion n'a jamais été aussi poussée, j'avoue
- Et enfin y'a les couillons comme nous, qui font la bourde du siècle et qui s'imposent à eux même et à ce bout de machin la décision la plus lourde qu'il soit. Ou on lui donne la chance de vivre, mais cela nous obligera nous, à tirer un trait sur nos souhaits, qu'il vive du coup avec notre rancoeur et dans des conditions qui ne lui est pas destiné tout en sachant qu'il n'était pas désiré. Ou alors, on le fait disparaître malgré que c'est ton corps qu'il avait choisi pour grandir en sécurité et tout en espérant pouvoir vivre, nous, avec ce choix sans qu'il ne te hante tous les jours. Voilà à quoi se résument mes nuits en ce moment
- On peut aussi voir les choses sous un autre angle. En trouvant un chemin parallèle à celui que nous voulions emprunter pour ne trop s'éloigner de la vie que nous rêvions et pour en même temps lui faire une place sans regretter. Et également apprendre à vivre en accord avec soi même et à devenir parents. Ou alors, le laisser partir tranquillement en lui expliquant que nous avons pris cette décision pour notre bien être à tous les trois, que l'on s'excuse de ne pas être en mesure de l'accueillir et de la manière dont on va procéder pour qu'il s'en aille. Et qu'à l'avenir, nous serons plus responsables pour ne pas refaire la même bêtise
Et encore pour la énième fois de la journée les larmes débordent. Il est capable de transformer mes pensées pessimistes pour en faire quelque chose de plus joli. Finalement, j'ai bien fait de venir. Et sincèrement, je crois que ce mec est entrain de me devenir indispensable.
Alors, envahi par un débordement d'affection, je fond sur ses lèvres sans réfléchir. Tant pis si c'est pas une bonne idée, j'ai juste besoin de le sentir contre moi, pleinement.
Pour mon plus grand bonheur, il ne me rejette pas. Au contraire, il m'enlace fortement et m'attire sur ses genoux avant d'approfondir le baiser en laissant sa langue glisser entre mes lèvres. Ce moment dure un instant, une éternité avant qu'il ne se détache pour venir fourrer son nez dans mon cou.
C'est juste ça qu'il me faut en fait, qu'il nous faut. Et je sais qu'il le pense aussi. Depuis le début, on le sait tous les deux mais on se voile la face, à cause de la peur débile du regard de l'autre.
Ce mec m'a vu sans ma carapace, nu sous la pression de l'angoisse, le visage déformé par le débordement des torrents de larmes et le cerveau retourné par le tourbillon de la vie. Pourtant, il est toujours là. Les bras ancrés autour de mes hanches, la bouche soudée à la mienne, sa langue dansant à l'intérieur. Et il est même prêt à être père à mes côtés si je choisis ce chemin.
Il m'accepte comme je suis, et pas que l'extérieur. Tout ce qui se trouve en dessous aussi et même profondément enfoui en moi. Il m'accepte comme je suis, avec mes peurs, mes doutes, mes défauts et mes choix et pourquoi pas ce petit machin qui grandit doucement également.
Il me procure un nombre incalculable de sensations plus plaisantes les unes que les autres. Il me fait me sentir en sécurité, écouté, respecté, entouré, reconnu. Je me sens enfin légitime à être moi-même avec lui. Pleinement et entièrement qui je suis, sans occulter ni dissimuler quoi que ce soit pour paraître plus fort. Alors pourquoi je m'obstine à fermer les yeux ? Ce que ça peut être compliqué les humains putain !
Je décide donc, pour la première fois de ma vie, d'agir pour moi même et non pour faire bonne figure. Tant pis si les autres ne comprennent pas, tant pis si certains me rejettent. Je saurai au moins ce que valent ceux qui resteront à mes côtés. C'est ma vie merde ! J'en fait ce que je veux.
Alors, en me décollant de son torse, je viens fixer mon regard dans ses prunelles obscures. Je suis sûr de moi maintenant, à ses côtés, je sens que je peux être capable de tout.
- Je t'aime Kounen. Veux-tu devenir papa avec moi ?
Je vois dans ses yeux de multiples lueurs danser et de petites perles humides faire surface. Il place ses mains de chaque côté de mon visage et avant de reprendre ma bouche d'assaut, il murmure tendrement.
- Je t'aime tellement aussi mon petit chat. Ce serait un honneur d'emprunter ce chemin à tes côtés et d'apprendre à devenir papa avec toi
Merde, je l'aime trop. Comment je peux m'en apercevoir que maintenant. Alors c'est ça, l'Amour ? ◇
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◇ Anomalie ◇
Truyện Ngắn◇ Une soirée de remise des diplômes quelque peu arrosée, une odeur de tabac, un égarement au creux des draps, une paire d'yeux obscures qui te dévisage au soleil levant, écarquillés de surprise. En soit, d'un commun accord, on oubli et on continue n...