◇ Le monde est vaste et peuplé de créatures toute différentes mais ayant pour seul souhait de se ressembler. Alors pour les montons noirs, il est difficile de se trouver une petite place. Mais c'est souvent eux, qui bravent le mieux l'adversité de la vie.
Les semaines suivantes ont été assez éprouvantes, ce n'est pas rien d'assumer tous les regards malgré ma décision.
Mais pour mes potes ou même mes parents, c'est comme si tout était normal, l'ayant déjà intégré complètement. Satoshi lui, sort les griffes dès que quelqu'un a la mauvaise idée de diriger son regard un peu trop bas par rapport à mon visage. C'est drôle de le voir comme ça. Même si j'avoue être finalement habitué, vu que je me traîne un félin sauvage dès que je sors de l'appart. Ces gens sur-protecteurs, c'est tellement adorable et en même temps, tellement chiant.
J'ai passé la soirée et la nuit chez la maman de Satoshi. Je n'y étais pas retourné depuis des milliards d'années, ça m'a fait tout drôle même si absolument rien n'avait changé. Que ce soit dans la déco ridicule de son ancienne chambre ou dans l'accueil chaleureux de sa mère. Et ce qui m'a le plus choqué, c'est qu'elle m'a fait mon plat préféré, épicé comme j'aime. Avec en dessert, le gâteau dont j'étais fou étant gamin. Tel mère, tel fils, dirons nous.
En partant ce matin, je n'ai pu m'empêcher d'être un peu guimauve.
- J'ai passé une soirée très agréable, merci. Tu m'avais manqué
Au vu de la grandeur qu'ont pris ces yeux et des petites perles qui se sont incrustées dans leurs coins, je me rends compte de l'énormité de ce que je viens de dire et essaye tant bien que mal de bafouiller un truc débile en m'enfuyant rapidement.
- Tu m'as manqué aussi Kinji. Je suis heureux de t'avoir retrouvé ! Bon week-end, on se voit lundi midi
Sentimentaux nous sommes.. dépitant.
Arrivé à l'appart, à la bourre, Kounen m'attend déjà adossé à sa voiture. Je le rejoins rapidement. Aujourd'hui est assez spécial, nous avons rendez-vous pour visiter une maison. Ensemble. Pour notre famille.
- Pardon, je suis en retard
- Pas la peine de pleurer pour ça mon petit chat, on a largement le temps
Voilà, qu'est ce que je disais, beaucoup trop sentimental, carrément déprimant. Surtout quand tu ne t'en aperçois même pas.
- Nan c'est juste que je pensais au fait qu'on allait visiter une maison pour notre future famille. Et j'ai plus trop de filtre émotif en ce moment
- Tu es adorable. Cela me touche aussi beaucoup. C'est une situation que je pensais tellement improbable dans ma vie. Merci de me permettre de vivre tout ça à tes côtés
- Techniquement, c'est toi qui est venu t'implanter en moi
- Idiot ! Allons-y, où on va vraiment faire attendre l'agent immobilier
Il coupe court à cette conversation qui lui est légèrement gênante avec une pichenette sur le nez. Sur le trajet, je ne peux m'empêcher de tressaillir d'impatience. Ça fait plusieurs semaines que l'on farfouille partout sur le net pour trouver notre petite perle, et celle ci est apparue de nul part tel un message du destin.
Je ne peux cependant pas m'empêcher d'avoir une pointe de peur de nous la voir refuser à cause de ma situation en plus de notre homosexualité. Que l'on tombe sur une personne peut ouverte d'esprit.
- Arrête de stresser, tout va bien se passer
Arrivé dans la petite impasse qui nous mène à la maison, une fois sorti de la voiture, je sentis mes jambes trembler. Faut vraiment être con pour se mettre dans cet état. Kounen m'attrape la main dans un geste réconfortant et on se dirige vers le portillon.
Foulant les lieux, on traverse un petit tunnel où s'enmelle l'écorce d'une glycine. J'imagine déjà la couleur vert pomme des feuilles touffues et ses énormes grappes mauves dégringolant de ci de là. Le tout créant un semblant de passage secret. Cette plante me rappelle avec nostalgie le point de départ du chemin que nous parcourons et rien que pour cela, j'aime déjà cet endroit.
La petite cour devant la maison est remplie de petits graviers clairs et le long de la clôture, poussent de petits arbustes bien touffus. Sur le côté, un cerisier trône majestueusement, préservant sa beauté pour le printemps.
La devanture de la maison laisse apparaitre des pierres aux teintes brunâtres et les volets sont teintés de vert. La porte s'ouvre sur une femme bien apprêtée, elle nous observe de loin. Je n'arrive pas à discerner son expression mais en approchant, je vois son sourire et mon angoisse fond. Je la sens bien.
- Bonjour messieurs, un plaisir de faire votre rencontre. En espérant que cette petite demeure vous fait déjà bonne impression
- Oui, clairement
- Tant mieux. Je me nomme Makoto et je suis ravie de vous faire visiter ce petit nid
- Attend, pardon ? Makoto vous avez dit ?
- Oui, il y a un problème ?
- C'est le nom de notre bébé, intervient Kounen
- Vraiment ? C'est une merveilleuse coïncidence ! Rétorque la petite dame enjouée
- On prend cette maison
- Kinji, on va peut être jeter un oeil dedans avant
- Si ça te fait plaisir. Mais c'est là que mon enfant passera ces premières années. Il ne peut pas y avoir message plus clair que celui là
Il me sourit tendrement en caressant ma nuque, elle sourit également et nous invite à entrer.
Une fois passé la double porte en bois sous le petit porche, on arrive dans une pièce ouverte sur toute la longueur de la maison. A gauche, une petite cuisine avec un bar en bois la séparant du reste de la pièce à vivre où poutres et pierres lui donnent un charme fou. Le tout agrémenté d'une cheminée et s'ouvrant sur une immense véranda. Celle-ci donnant dans le petit jardin où un énorme saule pleureur vient échouer ses fines branches feuillues dans une petite marre peuplé de nénuphars.
Un escalier en colimaçon nous mène à une mezzanine où se trouve au fond, une petite chambre dans laquelle je vois déjà le berceau de mon bébé et à gauche, une salle de bain spacieuse avec baignoire et douche Italienne. A droite de l'escalier, une échelle mène vers un dernier espace tout en profondeur sous les combles, idéal pour faire un petit cocon pour mon chat et moi.
Une fois de retour dans la grande pièce, je me tourne vers mon amour, pour lire au fond de ses yeux autant de certitude que moi.
C'est ici que nous construirons notre futur, pas à pas. C'est ici que nous offrirons un foyer à notre enfant, sûr et chaleureux. C'est ici que nous nous aimerons, tous les trois. La voix sûr de Kounen résonne en écho à mes pensées
- On la prend
- Je suis ravie d'entendre ça ! C'est un lieu idéal pour commencer une nouvelle vie
Son sourire sincère me fit chaud au coeur. Nous saluant chaleureusement, un dernier regard vers ce nouveau point de départ, on passe au sein du petit passage secret en sens inverse.
Une fois devant la voiture, avant que Kounen ne monte, je me colle dans son dos, l'enlace et le serre fort. Si fort, comme si ma vie en dépendait. Mais ma vie en dépend, de cet homme, de mon homme, qui m'offre un avenir si lumineux.
Merde, je suis si heureux. J'ai trouvé ma place, auprès d'un être extraordinaire, pour accueillir un petit être merveilleux ◇
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🐈⬛
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◇ Anomalie ◇
Short Story◇ Une soirée de remise des diplômes quelque peu arrosée, une odeur de tabac, un égarement au creux des draps, une paire d'yeux obscures qui te dévisage au soleil levant, écarquillés de surprise. En soit, d'un commun accord, on oubli et on continue n...