Le Chant du Loriot

Chapitre 8 [J'ai besoin de toi]

C'était ce genre de journée où tout va de travers. Lua s'était réveillée avec cinq minutes de décalage : une erreur de débutante dans le domaine qu'elle était censée maîtriser. En descendant, elle avait glissé sur la dernière marche. Dans le salon, son petit orteil avait malencontreusement heurté le coin de la table.

Ce syndrome de la brusque malchance, ou maladresse, arrivait deux fois par an. Le jour des examens.

Elle avait avalé de travers son lait. Elle avait oublié de mettre son Tech'let. Et, pire que tout, la digite de son index droit, puce implantée dès la naissance permettant d'entrer en interaction avec les hologrammes, était en panne. Pas moyen de la réparer, et c'était celle dont elle se servait le plus.

Pour couronner ce début de journée, elle s'était perdue, alors qu'elle empruntait ce chemin depuis une quinzaine d'années. Quand elle arriva devant la maison de Loanne, cette dernière l'attendait, habillée, lavée et coiffée. Elle ne s'étonna pas du retard de son amie habituellement si ponctuelle. Elle connaissait la musique.

— Stressée ?

— Moi ? Non ! nia Lua.

Et pourtant... Le système scolaire était une jungle dont seuls les meilleurs sortaient auréolés de gloire.

L'accès aux métiers dépendait des résultats aux examens. Tous les examens, de trois à vingt ans. Les meilleurs accédaient à une palette d'emplois plus étendue que les derniers. Lua, malgré une lutte acharnée contre ses propres difficultés, se hissait difficilement à la quarante-deuxième place. Sa situation semblait désespérée, mais les examens des trois dernières années avaient un coefficient beaucoup plus élevé.

Elle n'avait plus le choix. Elle devait réussir.

Loanne, elle, affichait un grand sourire. Impeccablement habillée, alors que Lua avait perdu un bouton.

Quand elles entrèrent dans la classe des étoiles, tous étaient déjà assis. Pas une discussion. Ils étaient concentrés à l'extrême. Mal à l'aise, Lua s'installa sur sa chaise. Malgré son stress, malgré la peur sourde qui grondait dans son estomac, elle ressentait une absence – celle de Liktor, dont la présence la rassurait autrefois. C'était étrange d'avoir une place vide derrière soi...

À 8 heures précises, les sujets s'affichèrent sur la table. Ils pouvaient les remplir dans l'ordre qu'ils souhaitaient, jongler entre deux matières, y revenir plus tard... Une seule consigne : avoir fini pour 16 heures. Huit heures la tête dans un hologramme.

Littérature, mathématiques, histoire, géographie, sciences, informatique et sommeil. Huit heures pour compléter sept matières. Lua avait sa propre stratégie : commencer par sa matière favorite pour se motiver, poursuivre par celles qu'elle abhorrait, pour achever sur une note positive : la seule épreuve pour laquelle elle était douée.

Les lettres bouclées, elle navigua entre les mathématiques, les sciences et l'informatique, cherchant vainement à comprendre les formules. Elle nota quelques résultats sans grande conviction, pestant contre sa digite défectueuse. Elle perdait un temps précieux.

À midi arrivèrent les sandwiches, indiquant que la moitié de l'épreuve s'était écoulée. Lua n'avait complété que deux matières. Elle accéléra pour se sortir des matières scientifiques et enchaîna sur l'histoire et la géographie. Enfin, quand elle vit qu'il ne restait plus qu'une heure, elle se pencha sur l'épreuve du sommeil.

Lua n'était pas douée pour les formules, les dictées, les dissertations. Lua n'avait pas l'esprit logique, ni celui de synthèse. Lua coulait dès qu'on mêlait les chiffres aux lettres, qu'on accumulait les dates ou les affluents des fleuves.