17. Les chevaux

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Les séances de préparation s'étalèrent sur plus de six mois. Stenvald, le rat de bibliothèque, n'avait pas de prédispositions particulières pour le combat et n'avait pas tenu une arme depuis qu'il avait quitté leur village natal. Cependant, il se montra appliqué et persévérant, et progressa jusqu'à réussir à manier un arc de façon correcte. Borg s'avéra un lutteur-né et dépassa de loin les espérances de Katt. Rsltvx, quant à lui, restait si mauvais que la guerrière pensa régulièrement à le renvoyer dans sa ferme. Un jour, elle perdit patience et le lui dit tout net. Sa réponse la laissa sans voix :

- Bien sûr ! Quand on aura vaincu Kronnart, j'épouserai Avriline et on ira vivre ensemble dans ma ferme !

- Quoi ?!! Epouser Avriline, tu rigoles ?

Il s'assit et lui prit la main.

- Ecoute, Katt, je sais que c'est sûrement pénible pour toi d'entendre ça mais c'est pour ton bien. On n'est pas compatibles, toi et moi. Toi, tu es une guerrière et moi, j'aspire à une vie tranquille. Tu seras sûrement plus heureuse avec quelqu'un d'autre !

Elle éclata de rire.

- Quoi ? C'est ça, que tu crois ?

- Ben ouais ! C'est évident, non ? On est dans un triangle amoureux !

- Comme si je pouvais être amoureuse de toi ! Non, c'est à ma pote Avriline que je pense. Elle veut devenir aubergiste et continuer à travailler en ville. Ça m'étonnerait qu'elle renonce à ses rêves pour aller habiter dans une ferme !

- Elle m'a jamais dit qu'elle voulait devenir aubergiste.

- Tu veux te marier avec elle et tu ne connais même pas ses projets d'avenir ?!

- Je suis amoureux ! s'écria-t-il. Tu comprendrais si toi, tu l'étais !

- Je comprends surtout qu'Avriline est une nunuche bien, je veux dire une fille bien. Elle mérite mieux qu'un type qui prend même pas le temps d'apprendre à la connaître.

- Que tu es jalouse ! Il faut que tu arrives à contrôler ton amour pour moi !

- Moi, amoureuse de toi ? Dans tes rêves !

- On n'a qu'à regarder dans nos prédilivres !

Sur ces mots, Rsltvx attrapa le sien, le feuilleta et fronça les sourcils.

- Il dit qu'on part pour une quête dans la semaine, annonça-t-il.

- Quoi ? Toto, t'es pas prêt ! Il me faudra encore des années avant de faire de toi un combattant correct, on peut pas partir comme ça !

Mais le prédilivre de Katt disait exactement la même chose. Katt prévint Borg et Stenvald, qui confirmèrent. Leurs prédilivres aussi annonçait le début d'une quête.

Par acquis de conscience, Katt se confia à Avriline, qui la rassura tout de suite : elle n'était pas du tout amoureuse de Rsltvx et elle n'avait aucune envie de devenir fermière, d'ailleurs son prédilivre n'indiquait rien à ce sujet. Par amitié, elle lui prépara un petit bagage qui contenait de l'eau et de la nourriture pour plusieurs semaines. Stenvald se procura une carte de la région à la bibliothèque et Rsltvx essaya de louer des chevaux. C'est-à-dire qu'il se présenta au bureau de location de chevaux le plus proche et qu'il commença par demander s'il pouvait leur emprunter des étalons.

- C'est pour une bonne cause, ajouta-t-il. Je suis l'Elu. Je viens vous débarrasser du tyran Kronnart.

- Pour une location de plus d'un mois, il faut payer d'avance, répondit le réceptionniste, imperturbable.

- Vous pouvez pas faire une exception pour moi ? Je suis l'Elu.

Et il lui tendit son prédilivre. L'homme ouvrit des yeux ronds.

- C'est un vrai ?!!

- Oui, je suis l'Elu, c'est écrit dedans. Il me fait quatre de vos meilleurs chevaux.

- Sortez.

- Quoi ?!!

- Sortez, répéta l'homme, blême. Allez faire votre quête à pieds, en bateau ou n'importe quoi mais laissez mes chevaux en dehors de tout ça. Je connais la réputation de Kronnart. Si vous allez l'affronter en utilisant MES chevaux, il serait capable de les dépecer vivants !

- Ça en vaudrait la peine, non ? Il s'agit de vaincre un tyran !

- Pas en mettant mes chevaux en danger ! Je m'en occupe depuis qu'ils sont nés, ce sont comme mes enfants ! Personne ne leur fera de mal !

- Eh, vous savez qui je suis ? rugit Rsltvx. Je suis l'Elu ! J'ai droit à des égards !

- Et vous savez qui je suis ! Je suis le loueur de chevaux ! C'est moi qui décide à qui je confie mes chevaux ! Maintenant, sortez !

Dépité, Rsltvx sortit et raconta tout à Borg, qui lui tapa gentiment dans le dos sans un mot. Quelques heures plus tard, ce dernier frappa à la porte du bureau de location et demanda poliment :

- Louer, s'il vous plait ?

Le loueur se trouva face à lui et recula instinctivement. Il y avait quelque chose d'intimidant dans le fait de se trouver soudain face à ce géant. Cependant, son visage aux traits ordinaires n'exprimait que de la bonté, ainsi qu'une certaine gêne.

- Vous voulez louer mes chevaux ? demanda-t-il.

- Oui, s'il vous plait.

- Combien ?

- Quatre.

- Voulez-vous bien me suivre ?

Borg acquiesça. Le loueur l'introduisit dans l'écurie et il sympathisa tout de suite avec plusieurs chevaux. En le voyant prendre un alezan dans ses bras, le cœur du loueur fondit. Rien ne pourrait arriver de mal avec lui.

- Vous payez d'avance ? s'enquit-il.

- Oui ! répondit Borg en sortant plusieurs billets de sa poche.

- Très bien ! Vous prendrez bien soin d'eux, n'est-ce pas ?

Borg acquiesça. Il avait décidé que dès qu'ils seraient en vue de l'antre de Kronnart, il convaincrait les autres de laisser les chevaux sur place et de terminer le trajet à pieds. Ce monsieur avait raison : ces nobles animaux étaient bien trop magnifiques pour mettre leur vie en danger.

Le manuel de la farouche guerrièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant