Le manuel de la farouche guerrière

37. La séance suivante.

Katt eut une surprise en se rendant au rendez-vous le lendemain. Ogor l'attendait devant la porte.

- Hé ! cria-t-elle en lui sautant pratiquement au cou. Tu es revenu !

Il la serra dans ses bras, l'embrassa sur la joue et répondit :

- Oui et on m'a dit que je te trouverais ici.

- C'est tellement bon de te revoir ! Est-ce que ton père...

Elle ne termina pas sa phrase. Ogor hocha tristement la tête.

- J'ai eu le temps de me réconcilier avec lui, énonça-t-il. Je crois qu'on a tourné la page. Tous les deux.

- Je t'offre un verre ? Je veux dire, j'ai une urgence tout de suite mais on pourrait se voir plus tard dans la journée ?

- Avec plaisir. On se retrouve à la forge.

Sur ce, Katt entra dans le bâtiment. On la présenta à l'adjoint et aux deux sténographes. La guerrière se sentait un peu nerveuse et répondit brièvement et poliment aux questions qu'on lui posait. Quand l'adjoint lui demanda de parler de ses parents décédés, elle resta pensive.

- Mes parents, c'était mes parents. Des gens bien.

- Vous pouvez nous en dire plus ?

Dire plus ?!! Katt n'aimait pas parler de ses émotions. Elle avait été très triste à l'époque et elle avait géré son chagrin comme elle l'avait pu. C'était fini depuis longtemps et elle estimait avoir tourné la page. Du reste, pourquoi aurait-elle déballé son chagrin devant trois inconnu.e.s ?

- Des gens honnêtes. Simples. De bons parents. C'est tout.

- Et quel genre d'enfance avez-vous eue ?

- Normale jusqu'à leur décès, je crois. Pourquoi toutes ces questions ?

- Je sais que c'est un peu indiscret, avoua l'adjoint. Mais on a besoin de savoir quel genre de personne vous êtes.

- Une guerrière.

- Mais encore ?

- Une forgeronne. Une pote.

Elle ne voyait vraiment pas ce qu'elle pouvait dire de plus et l'adjoint décida de passer à la suite des événements. Katt s'efforça d'être honnête du début à la fin. On la laissa sortir au bout de quelques heures et elle alla rejoindre Ogor. Elle but une bière avec lui à la taverne et iels passèrent la soirée à bavarder et à se retrouver. Elle se rendait maintenant compte à quel point il lui avait manqué.

*

Stenvald fit son compte rendu le jour suivant. On lui posa les mêmes questions qu'à Katt et il s'efforça de se montrer le plus précis et le plus direct possible. A la fin de la séance, l'adjoint s'enquit :

- Avez-vous quelque chose à ajouter ?

- Oui. J'aimerais faire don de mon prédilivre à la bibliothèque. Le plus tôt possible.

- Vous êtes sûr ?

- Oui. Tout à fait.

Les trois agents échangèrent un regard, puis l'une des sténos murmura :

- On lui dit ?

- Je crois qu'on peut, répondit sa collègue.

*

Borg fut le dernier à passer. L'adjoint savait qu'il ne pouvait ni écrire, ni faire de phrases et se contenta de lui poser des question précises. Il répondit patiemment, qualifia tout le monde de « gentil » et leur serra très cordialement la main avant de sortir.

Il avait décidé de partir travailler dans une ferme ou un élevage de chevaux. Sten était déjà retourné à la bibliothèque et Rsltvx racontait à qui voulait l'entendre qu'il allait coucher par écrit le récit de sa vie (et apprendre la mandoline parce que c'était sa nouvelle fixation). Katt, quant à elle, préférait ne pas parler de ses projets. Elle allait probablement travailler à la forge, ou exercer un autre métier manuel. Travailler avec ses mains la faisait toujours se sentir en paix.

Cette journée fut particulièrement chargée. Il y avait énormément de travail à la forge et en rentrant, elle se sentait très lasse. Elle avait si peu faim qu'elle dîna d'une tranche de pain, alla se coucher et s'endormit presque aussitôt.

Elle fut réveillée par un vrombissement féroce.