Death Lover : Retrouvailles (Russkaya Kukla Triloya - Partie 1)

Chapitre 41

Le silence régnait entre les trois personnes, et il s'avérait pesant. Kendrick dévia son regard vers cette voix intransigeante qu'il ne pouvait que reconnaître. Cet homme à l'allure dangereuse, affublé de son costume trois pièces, lui jetait des œillades meurtrières. Son charisme affirmé, accentué par ses épaules carrées, l'étouffait. Cette assurance implacable, ce visage intraitable , cette froideur assumée, il n'y avait aucun doute quant à l'identité de ce monsieur.

Vitali Corkïvif, bourreau de Russie et aujourd'hui mari de sa meilleure amie.

On ne mentait pas. Les informations n'avaient alors jamais colporter de bêtises. En le regardant de plus près, les rumeurs constantes sur ce mafieux que l'on qualifiait de sec et d'intimidant se fondaient. Kendrick s'en rendit compte par lui-même. Il suffisait d'oser jeter un œil à Vitali pour de suite prendre conscience qu'il ne fallait pas l'embêter. Cette manière de contracter la mâchoire. Ce pli dur que prenaient ses lèvres. Cette posture droite. Ces bras emplis de veines saillantes. Ce mètre quatre-vingt de masse musculaire fièrement tendue. Ce regard torve...

Il avait ces yeux vides d'émotion mais qui pourtant montraient une colère intense tant leur couleur s'obscurcissait : le vert laissait place à des iris opaques. Il n'était pas humain, non, on ne dirait pas cela. C'était le Diable en personne.

Ne s'attendant pas à une telle rencontre, plutôt brusque, avec l'époux de son amie, il se sentit légèrement abasourdi. Cependant, il reprit bien assez tôt ses esprits en braquant sa vision sur Vitali. Si ses parents lui avaient appris une chose, c'était de ne jamais montrer son intimidation à autrui afin de se protéger. L'homme se pencha légèrement en avant pour saluer le nouveau venu.

— Monsieur Corkïvif, bonsoir, fit-il avec indifférence.

Belle ne respirait plus, elle craignait cette rencontre depuis des jours. Vitali était imprévisible, elle ne savait absolument pas ce qu'il pourrait faire au serveur. Son mari ne l'aimait pas, elle le savait très bien et c'est ce qui la poussait à se méfier de lui. Elle lui prit précautionneusement la main, la caressant avec des gestes doux. Elle espérait intérieurement que ce geste saurait le rassurer et l'empêcher de perdre son calme.

— Kendrick Lubis, australien de vingt-cinq ans, célibataire, fils unique, parents divorcés et morts depuis votre majorité dans un accident de route, pas d'attache amical, boxeur, serveur, surfeur, fan de k-pop, rêve de devenir...

— Vitali, tu as fini de faire ton détective ? Je crois que Kendrick a compris que tu le tenais à l'œil. Cesse de déballer sa vie, intervient-elle nerveusement.

Belle venait de couper son mari avec une légère sécheresse, terminant sa phrase par un long soupir.

— Moya kukla, je...

— Je ne veux pas que tu ne t'en prennes à mon ami. Je ne sais pas ce que tu cherches à faire en venant te pointer comme une fleur parce que ta jalousie prend le dessus. Je discutais simplement avec Kendrick. Tu sais, une femme mariée peut très bien discuter de façon platonique, en bonne et dû forme, avec un autre homme. Je suis ta femme et ça le restera. Ta femme Vitali, pas celle d'un autre.

Le souffle de Vitali se coupa, le noir de ses yeux se fit plus prononcé. Il ne la quittait pas des yeux. Elle se mordilla maladroitement la lèvre sous le regard sombre de son mari, coulant comme de la lave brûlante sur son corps. C'est alors qu'il entreprit de s'avancer d'un pas vers sa femme, oubliant le monde qui les entourait. Quand il arriva à son niveau, sa bouche vint délicatement se coller contre son oreille.

— Je te conseille fortement de ne pas continuer dans cette voie moya kukla, tu avances sur un terrain miné.

— Vitali, il...