Chapitre 31

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Belle avait longtemps pensé que son retour en Russie lui permettrait de se vouer à une vie nettement plus sereine. Elle avait naïvement cru que son pays natal panserait ses blessures et apaiserait ses maux. Or, c'était tout le contraire. Depuis ses retrouvailles avec Vitali, rien ne se déroulait comme prévu. Tout prenait un tournant presque chaotique. En fin de compte, sa venue à Piter augmentait son malheur. Le bonheur qu'elle pensait pouvoir toucher du bout des doigts en retrouvant son ami d'enfance n'était qu'une piètre illusion. Sa félicité, bien que de courte durée, ne remplaçait pas son désespoir, il s'inscrivait au-dessus. En permanence rongée par l'angoisse, la jeune femme était incapable de passer outre son accablement, trop ancré en elle.

Telle une cicatrice indélébile.

Les événements faisaient qu'elle n'arriverait jamais à se défaire de tout ce mal qui la rongeait quotidiennement. Inlassable, il traversait ses veines en toute tranquillité, et pour toute sa vie. Pas une seconde ne passait sans qu'elle n'ait ces frissons d'effroi. Pas une minute ne s'écoulait sans ces visions d'horreur. Pas une heure ne défilait sans ces souvenirs morbides. Pas un jour ne se précédait sans cette douleur au cœur. Tout restait. Indélébile. Douloureux. Lancinant. Cela lui rappelait sans cesse ce qu'elle avait vécu et ce qu'elle subirait à son retour. Peine. Souffrance. Terreur. Cri. Malheur. L'enfer. La mort.

Pour l'heure, Belle ne possédait plus la force de se battre contre ce fantômedu passé, trop puissant pour elle. Elle tentait vainement de réfléchir à un plan efficace mais son crâne lui rappelait qu'elle lui en demandait trop. Elle n'arrivait plus à songer convenablement, même pour une situation tout à fait banale. Le simple fait de se parler intérieurement lui insufflait une douleur telle qu'elle se torturait naturellement. Arrêter sa voix intérieure relevait de l'impossibile, ce qui fatiguait la jeune femme, chose dont elle n'avait absolument pas besoin actuellement.

Belle poussa un soupir alors qu'elle stoppait sa course folle dans une rue qu'elle ne connaissait que trop bien. Elle approchait de sa destination, revigorant un temps soi peu son espoir de trouver une solution à tout ce merdier. Elle remerciait silencieusement Vlad qui n'habitait pas loin de son objectif. Dix bonnes minutes en courant suffisaient pour atteindre son but. Bien qu'elle fût à bout de force, elle surpassa ses limites, forçant ses jambes à reprendre leur activité. Elle sprinta vers le bout de la rue, bras autour du corps, cœur battant à tout rompre. D'ici peu, elle serait chez eux et peut-être qu'une solution se trouverait. Belle le souhaite de tout cœur, elle priait même depuis sa fuite.

La jeune femmme finit par arriver en bas d'un immeuble moderne, haut de huit étages. La façade pâle, plus que propre, était mise en valeur grâce à ses pierres beiges qui se moulaient en leurs extrémités. Des fenêtres dans des teintes unies pour chaque appartement renforçaient une impression de bâtiment luxueux. Il était clair que les propriétaires, ou locataires, de cette bâtisse gagnaient bien leur vie. Le salaire de Belle ne suffirait jamais à payer le loyer de ce genre d'appartement. Mieux valait qu'elle se contente d'une colocation avec son ami, Kendrick.

Elle marcha vers l'entrée, gardée par une agente de sécurité. De taille impressionnante, cette femme typé surveillait les alentours d'un regard dur et analytique. Son attention se ramenait sur Belle qui se pointait désormais à un faible mètre d'elle. La gardienne plissa les yeux, scrutant la jeune femme de haut en bas. Ses yeux d'un noir charbon faisaient des allers et retours, n'ommettant aucun détail. Son travail la contraignait à remarquer si les intentions des visiteurs étaient bonnes ou non.

Après de longues secondes d'observation, l'agente de sécurité dont le badge indiquait le prénom de "Alaïka" se redressa de toute sa hauteur. Elle devait atteindre le bon mètre quatre-vingt-dix, soit dix-huit centimètres de plus que Belle. Elle se sentit toute petite face à cette armoire à glace. Cette femme l'impressionnait. Croisant les bras, le dos droit, le menton relevé, Alaïka lui lança un regard noir. Belle resta malgré de marbre, le visage impassible mais tiré par l'épuisement. Au cours du temps, elle s'était habituée à ne pas laisser transparaître ses émotions. Dans ce monde, il valait mieux paraître indifférent plutôt que faible, sinon, le risque de se faire manger par les plus grands était de masse.

Death Lover : Retrouvailles (Russkaya Kukla Triloya - Partie 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant