Chapitre 9 - Mathieu

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Je me réveillai dans une chambre inconnue. Tout indiquait que j'étais à l'hôpital. Ma hantise. Dans l'unique fauteuil, mon père s'était assoupi.

Sourcils froncés, je convoquai les souvenirs de la veille. Ils me revinrent par bribes. Je poussai un profond soupir désappointé, puis voulus me lever afin d'aller aux toilettes. J'esquissai à peine un mouvement qu'un pincement me coupa net dans l'action. Diantre ! pestai-je sans pour autant déposer les armes.

Je parvins finalement à m'extraire du lit et m'assis quelques instants sur le bord du matelas. Je découvris alors ma tenue : une tunique blanche avec des petits losanges verts imprimés sur le tissu. Où sont passés mes fringues ? m'ébahis-je. Ma mémoire me fournit la réponse : n'ayant pas pensé à prendre de pyjama avec moi car je n'avais pas escompté passer la nuit ici, j'avais dû demander à un infirmier s'il était possible de m'en prêter un. Un nouveau soupir franchit mes lèvres.

Je portai le regard sur papa et l'observai dans son sommeil. De discrets sifflements sortaient de sa bouche entrouverte et sa poitrine se soulevait avec régularité ; il avait croisé les jambes au niveau des genoux. Il devait tenir cette position depuis un moment car il les déplia soudain et les étendit loin devant lui avant de les faire se superposer au niveau des chevilles.

Mes yeux tombèrent alors en arrêt sur le sac au pied du fauteuil duquel émergeait mon costume de la veille. Se pourrait-il qu'il m'ait ramené un vrai pyjama ? espérai-je en me mettant debout. Tu souhaites vraiment passer une nuit de plus dans ce lieu ? siffla ma conscience. Sa semonce me fit abandonner le projet de fouiller le sac et j'entrai dans le cabinet de toilettes composé d'une douche, un double WC et un lavabo.

— Bonjour, fiston, lança papa en se levant alors que je regagnais le lit.

Je lui rendis son salut et me permis une petite mesquinerie sur son sommeil. Il sourit avec indulgence en me tapotant l'épaule.

— Ne joue pas au plus fin, Mathieu, je te rappelle que tu as passé une radiographie des côtes cette nuit. Tu t'en es fracturé une en te battant avec Lucile qui, d'ailleurs, se retrouve avec une entorse au poignet.

— Je me fiche de ce qu'elle a comme de ma première chemise, marmonnai-je, contrarié qu'il évoque mon cher défouloir dans notre discussion.

Et alors que mon père me passait un savon sur ma désinvolture et mon degré de responsabilité dans cette histoire, le souvenir de nos excuses mutuelles, à Lucile et moi, avant qu'on parte pour l'hôpital de Pont-l'Abbé hanta ma mémoire. Les larmes dans son regard n'étaient pas feintes ; j'en avais eu le cœur serré.

— Je ne sais pas si tu réalises mais, à cause de votre bagarre, la natation te sera certainement interdite pour quelque temps et le meeting prochain risque de te passer sous le nez, poursuivait-il.

Cette dernière phrase me tira de mes réflexions.

— Comment ça ?

— Attendons l'avis du médecin. En parlant de ça, il faut limiter tes déplacements. L'infirmière a laissé un pistolet, un urinal.

— C'est une blague ? répliquai-je après avoir visualisé l'objet en question, bien en évidence sur la table de chevet montée sur roulettes.

— Pas du tout. Ce n'est que l'affaire de quelques jours, m'a dit une aide-soignante. C'est pour éviter que tu sollicites trop ta côte au début. Mais attendons le passage du médecin pour statuer. Allez, va te coucher, maintenant, fiston.

Encore trop fatigué pour m'offusquer, je m'exécutai et fermai les yeux. Hélas, me savoir dans un hôpital me ramenait à une période honnie par trop récente.

La Nostalgie de l'horizon marinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant