Chapitre 11

7.4K 679 108
                                        

Je déteste rouler à la vitesse d'une limace sur la route, j'ai besoin de vitesse, rien qu'un peu, et avec Nija c'est clairement impossible. Elle parait sereine et apaisée, pensant sûrement que je suis devenu quelqu'un de raisonnable et que j'essaye de faire des efforts pour être en sa compagnie alors qu'en réalité, c'est tout le contraire. Je veux la fuir, ne pas lui parler, il ne faut pas que je tombe. Je suis tombé une fois, je ne me suis pas relevé, pas deux.

Arrivés devant chez elle, Nija descend et me salue de la main lorsqu'elle arrive devant la porte. Soudain, il commence à pleuvoir. Au moment même où j'allais repartir. Je regarde Nija pour voir si elle est rentrée mais elle est toujours devant la porte en train de chercher ses clefs. Et quand elle me regarde, je comprends qu'elle ne les a pas. Elle commence à être trempée par la pluie, et elle court vers ma voiture. Non, non, pas ça.

"Nija, non, tu ne rentres pas, ce n'est pas ..."

Elle s'en contrefout de ce que je dis et s'assied, à moitié trempée sur le siège passager. De ses cheveux s'écoule l'eau de pluie qui mouille complétement le dossier du siège. Ma mère va me tuer.

- Mais putain, t'as oublié tes clés ?

Elle ne relève même pas mon ton agressif et passe sa main dans ses cheveux nerveusement avant de prendre son portable. Je la vois composer un numéro puis mettre le téléphone à son oreille.

- Tu fous quoi, t'as oublié que tu ne...

Elle pose carrément sa main sur ma bouche et fronce les sourcils pour pouvoir entendre ce qu'il se dit dans le combiné. Putain, elle a intérêt de sortir de la voiture très vite parce que sinon je vais réellement la mettre dehors. J'envoie son bras puis balance ma tête en arrière en passant une main dans mes cheveux pour essayer de me calmer. Je ne peux rien faire d'autre de toute façon. Quand je regarde de nouveau Nija, elle paraît gênée et compose un message avant de me tendre son portable :

"Mon père est absent et je n'ai pas mes clés".

- Ok et alors ?

Et alors ? Ben t'as très bien compris Enes, tu ne vas pas laisser cette fille sous cette pluie battante devant chez elle quand même, si ?

Bordel. C'est pire que ce que je pensais. Chaque étape en compagnie de Nija devient de plus en plus difficile, ce matin, à la bibiothèque, ça allait car nous avions un but. Quelque chose à faire pendant la matinée. Là, elle est là, avec moi dans la voiture de ma mère, vient de comprendre qu'elle n'a pas ses clés, que son père est absent et n'a nulle part d'autre où aller. Hors de question.

Nija, me regarde et je viens de me rendre que je l'ai dit à haute voix. Je poursuis :

- Tu ne viendras pas chez moi. Même pas en rêve.

Elle me fixe comme si elle se demandait si j'avais vraiment conscience de la situation dans laquelle elle se trouvait et qu'elle me demandait si c'était vraiment le moment de jouer le connard avec elle.

- Putain Nija, non ! La dernière fois que tu es venue chez moi, regarde le bordel que t'as foutu, merde ! Non !

Elle hoche la tête complétement dépitée et sors de la voiture. Elle n'a pas de parapluie et ses vêtements maintenant sont complétement mouillés quand elle avance vers sa maison. Elle s'assoit alors sur la marcche juste devant la porte et me regarde droit dans les yeux pour me montrer à quel point je suis un bâtard né. Je baisse la tête et redémarre la voiture.

Malheureusement cinq minutes après l'avoir quitté, je fais demi-tour. Cette fille me tape littéralement sur les nerfs. Je la déteste. Je suis sensé la surveiller, certes mais premièrement , c'est moi qui l'ai choisi, je peux donc arrête quand bon me semble et deux, je ne suis pas son garde du corps. Je ne vais pas la suivre comme un petit clebs. Je la vois, assise, sous un arbre mais complétement trempée. Elle tente d'adopter une attitude stoïque en me voyant mais je vois qu'elle tremble et sais qu'au fond elle n'espérait que mon retour.

SpeechlessOù les histoires vivent. Découvrez maintenant