Chapitre 1

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A la gare routière, je jette un œil en arrière par-dessus mon épaule afin d'envoyer un dernier au revoir à mes parents et ma petite sœur. Je monte dans le bus et m'installe dans le fond du véhicule qui m'emmènera vers ma nouvelle vie, à neuf cent trente kilomètres d'ici. Je regarde ma famille s'éloigner au loin alors que le bus roule. Je ne cesse de me répéter « J'espère que tout va bien se passer ».

Durant le trajet, qui me conduit depuis Seattle, dans l'État de Washington, jusqu'à la ville de Missoula, dans celui du Montana, j'ai principalement dormi. Les dix heures de trajet ont été longs et presque ennuyeux. Je me dis que la prochaine fois, je prendrai sûrement l'avion. Mais au moment de vouloir partir le bus m'a semblé être la meilleure solution et surtout, l'option la moins chère qui m'a permis d'économiser plus de deux cents dollars.

Mon nom est Cameron Layers j'ai vingt-deux ans, mes cheveux châtains ont des nuances plus claires qui donnent l'impression que j'ai fait des mèches blondes. Ils sont courts, ondulés, parfois bouclés, naturellement et recouvrent mon front sans obstruer mes yeux marrons clairs. Mon nez est décoré d'un piercing à la narine droite. Je suis un enfant de la ville, je suis né et j'ai grandi à Seattle, mes parents vivent toujours là-bas dans la maison dans laquelle ils m'ont élevé.

Lorsque Michael, mon petit ami m'a annoncé qu'il me quittait pour un autre cela m'a brisé le cœur. J'ai eu le temps d'expérimenter les romances lorsque j'étais au lycée, pour finalement passer le cap de l'acte charnel à mon entrée dans un centre de formation en « bien être et soin du corps ». J'ai toujours su que j'étais homosexuel et mes parents n'ont jamais cherché à s'opposer à ça. Au contraire, mon père m'achetait les protections nécessaires et ma mère m'accompagnait faire des prises de sangs pratiquement tous les deux mois. Enfin ça, c'était avant que je ne sorte avec Michael et qu'on s'installe ensemble, ou plutôt que j'aille vivre chez lui, quelques mois plus tôt. Cela faisait cinq mois que je sortais avec lui, et tous les deux, nous avions des grands projets de vacances pour l'été. Nous devions partir au Mexique et profiter de la plage et du sable fin en sirotant des cocktails à longueur de journée. Je pensais que nous avions des projets ensemble, mais j'ai réalisé, trop tard, que j'avais été le seul impliqué dans cette relation. Mes projets d'été tombants à l'eau, je n'avais plus le goût à la fête et surtout je ne voulais pas ruminer tout l'été à Seattle dans les clubs, magasins ou cafés dans lesquels j'avais l'habitude d'aller avec lui. Je ne désire ni croiser mon ex, ni nos amis en communs.

Un soir en surfant sur internet, je suis tombé sur une offre d'emploi saisonnier pour aller travailler dans un ranch hôtelier. J'ai alors candidaté sans grande conviction et le lendemain j'ai reçu un appel de la responsable des ressources humaines de l'endroit pour un entretien téléphonique à la fin duquel celle-ci m'a dit « Pourriez-vous venir ce weekend afin que vous puissiez commencer lundi prochain ? ». C'est comme ça que j'ai alors accepté l'offre. Le salaire est moins important que ce que je pouvais toucher à Seattle mais là-bas je serai nourri, logé et blanchi, ce qui a fortement pesé dans la balance.

Ainsi, il y a deux jours je me suis retrouvé à annoncer la nouvelle à mes parents, chez lesquels je suis retourné vivre depuis deux semaines. Je leur ai parlé de l'offre, et ces derniers m'ont encouragé dans cette aventure afin que je profite d'un air nouveau pour me recentrer sur moi et mes envies et surtout que je puisse tourner la page dans un environnement différent.

J'arrive à Missoula en fin de matinée. Je dois encore reprendre la route plus d'une heure pour arriver au ranch. Je décide de m'octroyer une pause chez Paul's Pancake Parlor, un restaurant, pour nourrir ma faim grandissante. L'endroit fait vintage, il est vieux, il ne paie pas de mine mais je suis en train de me régaler avec des pancakes, des œufs brouillés et des saucisses. Assis sur une des banquettes simples en cuir vert et usé, mes coudes appuyés sur la table en bois, j'apporte toutes les trente secondes une fourchette ou une gorgée de boisson à ma bouche. Je prends le temps pour savourer les aliments que m'offrent mon assiette. La serveuse vient me remettre du soda dans mon verre que j'ai vidé rapidement. Je me sens épié par les regards des personnes âgés dans le restaurant, certainement des habitués des lieux qui découvrent une nouvelle tête.

Ranch Rocket Creek [MM]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant