Pitié, faites que je sois seule. Je l'ai imaginé ce bruit, oui c'est sûr ! Je l'aurais vu s'il y avait quelqu'un en entrant. Mais alors que je tourne le visage, tous mes espoirs s'écroulent comme une tour de Kapla. Un garçon que je ne connais pas est allongé dans la baignoire, un verre dans une main et son téléphone dans l'autre.
— On peut savoir qui t'es et ce que tu fais là ?
Les mots sortent de ma bouche dans un mélange d'incompréhension et d'ébriété. Si à l'heure actuelle mon niveau d'alcoolémie est plus qu'élevé, je n'avais pas bu une goutte quand j'ai dressé la liste des invités. Et je me souviens parfaitement ne pas avoir invité « mec chelou qui passe sa soirée dans la baignoire à mater les gens vomir et pisser ». Alors comment cet inconnu s'est retrouvé à ma fête ?
— Naïm m'a demandé de venir.
— Ce petit con va mentendre, grondé-je furieuse.
A peine ai-je le temps de finir ma phrase que je replonge la tête dans les toilettes. Des grincements se font entendre dans le bain puis le verrou de la porte émet un cliquetis. Merci mec de la baignoire. Au moins, ma dignité sera sauve. Du moins, pour ce qu'il en reste. Je ne veux pas être vue dans un état pareil. A bien y réfléchir, mes amis sont aussi bourrés que moi, ils ne doivent même pas s'être rendu compte que je suis partie vomir. Si après dix verres ma vision est complètement floue, je n'imagine pas à quoi doit ressembler leur monde en cet instant. Un gang d'aveugles en soirée. Le festival de Cannes. On ne vous l'avait jamais faite celle-là, je parie ?
Les pas du garçon claquent contre le carrelage de la salle de bain et se font entendre de plus en plus nettement.
— Je vais t'aider, daccord ?
Son ton est rassurant, presque maternant. D'une main, il prend mes cheveux et frôle mon cou de ses doigts. Aussi délicatement que possible, il glisse mes mèches en arrière pour les protéger des éclaboussures. Je le remercie, cette fois, à haute voix. Une fois que tout l'alcool que j'ai ingurgité a fini son trajet inverse, je me laisse tomber sur le sol. Assise en boule contre le mur, il me rejoint. Ma tête tourne, la musique dans la pièce voisine est étouffé. Sous l'eau. Voilà où j'ai l'impression d'être. Même assise et maintenue, j'ai l'impression de tomber dans un vide complet. Je me trouve dans un sale état, à peine capable de comprendre ce qu'il se passe.
— Il vaudrait mieux que tu rentres te reposer chez toi, tu ne penses pas ?
Je m'assoupis la tête contre son épaule avant d'avoir pu y répondre.
Je ne sais trop combien de temps plus tard, un bruit sourd interrompt mon sommeil. Une voix féminine crie qu'elle a une envie pressante et qu'elle n'en peut plus d'attendre. La garçon me donne un coup de main pour me relever, puis s'en va en direction de la sortie. A peine tourne-t-il la clé que Noa entre dans la pièce comme une furie. Ses yeux humides se posent sur moi. La pauvre doit attendre depuis longtemps. D'un sourire timide, je tente de l'amadouer, consciente d'avoir fait une bêtise. Elle se précipite vers moi plus inquiète qu'apte à me faire une réprimande.
— Eh Maddie, ça pas ? Fallait pas boire autant si tu ne le sentais pas.
— J'vais très bien, répliqué-je d'un ton laconique.
En me redressant, mes cheveux s'écroulent sur mon visage. C'est sûr à présent, je ressemble plus à Chewbacca que Chewbacca lui-même.
— Oui, je vois ça.
Tout en ricanant face à mon air perdu, Noa dégage les mèches rousses qui trainent sur mon nez. Derrière moi, la voix du gars de la baignoire intervient. Je peine à l'entendre. Il faut croire que mes oreilles sont encore sous leau.
— Tu veux que je te ramène ?
Noa reste interdite, les sourcils froncés. En une fraction de seconde, l'intrus semble déduire l'origine de son hésitation.
— Écoute, je viens d'aider ta pote à ne pas se vomir dessus, je pense que tu peux me faire confiance. Faut juste que tu me dises qu'elle adresse je dois donner au taxi.
— Nan ça va, je vis à trente minutes. Je rentre toujours seule à pied après les soirées.
Il ne prend pas la peine de me regarder et s'épanche directement auprès de mon amie.
— Et vous laissez faire ça ?
— Eh ! Je suis une grande fille, je peux me raccompagner moi-même, dis-je en détachant bien chaque syllabe.
Mon ton est aussi chancelant que je ne l'étais avant de réfugier ma tête dans la cuvette. Au même moment, je me relève et manque de trébucher sur un tapis.
— Je reconduis toujours mes amies. Alors pas question qu'elle rentre seule en pleine nuit, encore moins en robe.
Mon vieux, t'as intérêt à avoir dit ça pour me protéger des hommes dans la rue. Sinon, tu ferais mieux de prier pour que je ne te remonte pas le slip jusqu'à ton crâne velu.
— Si tu ne veux pas que ce soit moi, alors on va chercher un de tes potes pour le faire
Noa tranche la conversation :
— Peu importe, tant qu'elle rentre en bon état, mais dégagez d'ici, je ne saurai plus me retenir longtemps.
Toujours titubante, je pouffe de rire en sortant de la salle de bain. Il me suit et nous rejoignons tous deux le salon. Naïm et ses potes nous observent de loin. Ils nous fixent grossièrement. Naïm fait un pouce en l'air en sadressant au type derrière moi, comme pour dire « bravo mec ». Je n'y prête pas attention, les garçons sont bêtes. Je récupère mon sac et ma veste sur le canapé fourre-tout, puis je fais le tour de mon groupe à la recherche d'une âme charitable qui accepterait de me ramener chez moi. Après quelques tentatives, je lâche l'affaire. Clément est trop ivre, Martin préfère prolonger sa soirée et Baptiste a les lèvres occupées. Je ne voudrais pas gâcher son coup
Je sors de l'appartement, légèrement stressée à l'idée de rentrer avec un inconnu. Et s'il avait de mauvaises intentions ?
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Te souviens-tu ?
RomanceAlors que Maddie jongle entre ses peines de cœur, ses incertitudes et une relation familiale plus que chaotique, elle fait la rencontre de quelqu'un qui pourrait bien bouleverser tous ses idéaux. Plus le temps passe, plus ses sentiments prennent pla...