12 - Main à la boite

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TW : attouchement

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— Tu es la seule qui brille au milieu de tout ce monde.

Ses mots ont le don de me faire craquer. Je le regarde avec tendresse, émerveillée par la beauté de son compliment.

L'instant d'après, la splendeur de ce moment m'est arrachée. Quelqu'un se colle dans mon dos et soudain, je sens une main frôler mon entrejambe.

Je me fige sur place, le coeur battant à tout rompre. Je me retourne sur le vif pour trouver le fautif. Une silhouette se fond dans la foule, fluide dans ses mouvements. C'est lui. Je ne saurais expliquer pourquoi ni comment je le sais, mais ça ne peut être que lui. Figée, je ne parviens pas à réagir. Le temps s'est arrêté pour moi et cette musique qui résonnait si fort dans mes oreilles avant, me semble à présent éteinte. Prise de vertige, je baisse les yeux au sol, haletante. Tout mon corps tremble et une larme menace de couler. Je suis sous le choc, à tel point que je n'entends pas Kaïl me parler. Il me secoue par les épaules, penche la tête pour mieux me voir. Ma figure est recouverte de mèches rousses, dernière barrière protectrice contre ma vulnérabilité. Les gens autour de moi continuent de me bousculer, je ne comprends plus ce qu'il se passe. Je suffoque, il faut que je sorte d'ici.

Afin de relever mon visage, Kaïl pose un doigt sous mon menton et accompagne le mouvement. Les larmes dévalent mes joues. Ni une, ni deux, il me prend par la main et m'emmène à l'extérieur de la boîte de nuit. Une fois dehors, la pression diminue peu à peu en moi. Mais mes sensations physiques s'accentuent. Mes jambes tremblent si fort que je perds l'équilibre. Kaïl me rattrape par les coudes et continue de me soutenir ainsi. Après quelques longues secondes de silence, des larmes surviennent. Il me prend dans ses bras, pose une main sur l'arrière de ma tête et me chuchote quelques mots rassurants.

— Je ne sais pas ce qu'il sest passé Maddie, mais je suis désolé pour toi.

— Tout va bien, on est loin de cet endroit maintenant.

— Respire

Après un temps, je retrouve un souffle calme. J'essaie alors de lui expliquer la situation, mais je suis incapable de placer les bons termes sur ce qu'il vient d'arriver. Malgré mes paroles confuses, je perçois dans ses yeux qu'il a saisi le message. Mon corps exprime encore quelques hoquets de stress, de détresse.

— Je veux rentrer Kaïl, s'il te plaît.

— On va chercher ta veste et je te ramène, OK ?

Il se dirige vers l'entrée, mais je le retiens. Alors que je m'apprête à lui parler, le bruit d'un klaxon me fait sursauter. Depuis quand la ville est aussi oppressante ?

— Non je n'ai pas envie d'y retourner, je vais dire à Noa de la récupérer.

— Mais tu vas avoir froid. Je n'ai pas de pull à te prêter cette fois, il esquisse un sourire, vaine tentative pour me détendre.

— Tu as tes bras.

Donner un trait dhumour, aussi infime soit-il, m'aide à calmer mon rythme cardiaque. Kaïl appelle un taxi et pendant que nous l'attendons, je me blottis contre lui. Je garde les miens croisés contre ma poitrine pour me réchauffer. Contre son torse, je ressens la chaleur de son corps, ce contact si rassurant. Son coeur résonne contre mon oreille. Tant bien que mal, jessaie d'oublier ce qu'il vient de se passer.

C'est la première fois que ce genre de chose m'arrive. Désormais, je comprends les femmes qui crient au scandale au moindre sifflement dans la rue. Lorsque l'on vit une agression même insignifiante, on craint le pire. Je m'en rends compte après une vingtaine de minutes à peine, car à présent, quand un homme me regarde, je frémis.

Le taxi approche pour me délivrer, je m'engouffre à l'intérieur et claque la porte, sans un regard vers ce lieu où je ne remettrais plus jamais les pieds.

Lorsque nous arrivons en bas de chez moi, c'est Kaïl qui dépose un baiser sur ma joue. Je suis demeurée statique tout le long du trajet, perdue dans mes pensées. Sans un mot, je descends de la voiture. Kaïl, resté sur le siège arrière, me fixe d'un air triste. Ses lèvres sont retroussées vers le bas. Lui non plus n'a pas osé parler.

Une heure plus tard, le sommeil refuse toujours de me délivrer de la réalité. Mon esprit bouillonne et des musiciens jouent des cymbales sur mes tempes. Comment un toucher aussi furtif peut-il subsister si longtemps ? Putain qu'elle idiote j'ai été. Est-ce que c'est de ma faute ? Je me sens sale, atrocement sale. Pourquoi ? Pourquoi il a fait ça ? Pourquoi à moi ? Quest-ce que j'ai fait....

Désespérée, j'attrape mon téléphone dans l'espoir de distraire mon esprit. Plusieurs notifications trônent sur lécran éblouissant. Un premier, de Noa, m'informe qu'elle a bien récupéré ma veste. Un second, de la part de Kaïl, m'enfonce un poignard en plein coeur.

Kaïl : Comment tu te sens ?

Lorsqu'on va mal et qu'une personne nous demande comment on va, c'est une des pires sensations.

Maddie : Bof, je réfléchis beaucoup.

Kaïl : À ce qu'il ta fait ?

Maddie : À ce que j'ai fait pour qu'il me fasse ça

Kaïl : Tu crois que c'est ta faute ?

Je commence à écrire, je finis par me raviser, persuadée qu'il va me juger. Bien sûr qu'aux yeux des autres ce ne sera pas ma faute. Et une fois de plus, ce que je ressens ne sera pas accepté. Non, je ne veux pas connaître ça à nouveau. Je me sens bête de ruminer tout ça pour un geste si minime. Je ne devrais pas être peinée, pourquoi est-ce que ça matteint ? Un sanglot sort de ma bouche tel un cri de douleur.

Kaïl : Attends lundi, je sais ce qu'il te faut

Te souviens-tu ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant