Chapitre 32

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— Son état est stable. Ils n'ont pas encore vu le médecin.

Markus s'était fait violence pour ne pas simplement s'écrier « bien sûr que non ! » comme il l'aurait voulu. Il ne savait pas. Personne ne savait dans quel état était le cerveau de Christopher hormis le soignant qui n'était pas encore venu expliquer la situation à Rémi et Juan. Et on ne mentait pas aux enfants dans cette famille. L'Oméga caressa la joue de son fils aîné, qui était venu se blottir entre ses bras dès qu'il avait pu s'assoir, Jolan endormi contre son torse. De ses doigts, il entreprit de masser le crâne de son enfant, glissant entre les mèches de cheveux aussi noires que les siennes. Julie lui jeta un regard entendu, et serra un peu plus fort contre elle l'adolescent qui tremblait d'angoisse. Sa tension était si forte qu'elle se diffusait jusque dans ses muscles, crispés et proches de la tétanie. L'Oméga avait beau diffuser des phéromones apaisantes en continu, l'adolescent n'y répondait que peu. L'amie de la famille regrettait presque de ne pas être mère et de ne pas avoir de molécules parentales à proposer. Markus dut le comprendre, car il se rapprocha d'elle, assez pour que l'adolescent soit à portée de nez des siennes, qu'il utilisait abondamment depuis qu'ils étaient rentrés.

L'adolescent ne se détendit pas, pas vraiment, mais il se sentait entouré et son anxiété reflua assez pour lui permettre de passer à table avec tout le monde lorsque Jasper les appela. Un semblant de normalité s'instaura, et permit à tous de souffler un moment. Avec le ventre plein, on réfléchit toujours plus posément. Il ne fut pas simple de coucher les plus jeunes, les trois exigeant toute l'attention de Markus. Même Charlotte, du haut de ses six ans, réclama une tétée alors qu'elle ne le faisait plus que rarement. L'Oméga confia Jolan à son mari un moment. Le nourrisson ne dormirait de toute façon pas seul, contrairement aux deux plus grands qu'il pourrait laisser une fois qu'ils seraient endormis.

L'Alpha entreprit de marcher dans le grand appartement pour distraire le bébé tandis que Julie convainquait Théodore et Thomas de regarder un film d'animation pour se distraire. Le calme revint peu à peu et lorsque Markus put enfin sortir de la chambre, il les trouva tous blottis les uns contre les autres sous des plaids. Il prépara des tisanes et du chocolat chaud et sortit du placard la boite en fer contenant les dernières madeleines confectionnées par Théo, puis se coula sous le bras libre de son mari lorsque tout fut disposé sur la table basse devant eux. Jasper le serra contre lui et rabattit un pan du plaid sur ses jambes. Lorsque le film termina, ils en choisirent un second et Théodore s'endormit contre Thomas, les pieds posés sur les jambes de son père. L'adolescent avait passé un bras protecteur sur l'enfant, et d'un regard suivi d'un bref échange de phéromones Markus et Jasper convinrent qu'il n'était pas nécessaire de déplacer leur fils jusqu'à son lit pour le moment.

Peu avant la fin du second film, ils reçurent un appel de Juan.

***

Cariño ? Rémi ?

Il ne savait plus comment l'appeler. Il ne savait pas s'il était légitime, là, tout de suite, pour entrer dans son intimité. Il s'était rarement senti aussi inutile et pourtant il lui semblait impensable de laisser quiconque prendre sa place auprès de Rémi. L'Alpha était prostré depuis de longues minutes, et s'il maintenait son emprise sur ses phéromones, c'était bien le seul signe d'ancrage dans le monde qu'il donnait. Juan referma un peu la main sur la nuque de son ami – avait-il le droit de l'appeler son amoureux dans cette situation ? – et glissa vers son épaule, son autre paume travaillant en symétrie. Il frotta les trapèzes tendus de l'Alpha, la rondeur des articulations, ses biceps, le haut de son dos, puis s'agenouilla lentement et frictionna ses jambes. Il agissait par pur instinct, guidé par la peur qu'il avait de voir son roc perdre tout contact avec la réalité. Et cela semblait fonctionner. Sous ses doigts, les muscles de l'Alpha réagissaient, et il releva lentement la tête, faisant craquer sa nuque. Il recula légèrement son siège et lorsque Juan se releva, il l'attira contre lui, enfouissant son visage ravagé d'angoisse contre le ventre de l'Oméga. Les doigts fins plongèrent dans ses cheveux dans un lent massage et la chemise de Juan se trouva brusquement humide.

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