Dire que Juan avait été soulagé de voir Rémi sortir de la bouche de métro au moment où il s'apprêtait à s'y engouffrer avec quatre enfants et un énorme sac à dos était un euphémisme. Il se serait jeté dans ses bras s'il n'avait pas eu Jolan en écharpe de portage, Yaël dans la poussette tenue à une main et Charlotte pendue à son bras libre. L'Alpha le délesta du sac à dos et se pencha sur la poussette pour en extraire le bambin, qu'il garda sur son bras pendant que Juan pliait l'objet d'une main experte. Rémi s'en empara aussi, et ils repartirent vers le train souterrain, guidés par Théodore qui leur ouvrait la route en connaisseur. L'enfant suivit les instructions de Rémi pour se diriger vers le bon quai et ils furent bientôt tous arrivés à bon port.
— J'vais crever ! murmura Juan en se laissant tomber dans le canapé après avoir déposé ses affaires et largué son manteau en tas dessus.
— Mais non !
Jolan se tortilla pour exprimer son inconfort et la voix fluette de Yaël réclama une tétée avec beaucoup de vigueur. L'Oméga leva les yeux vers Rémi, comme pour dire « tu vois ? » et défit son écharpe de portage pour libérer le nourrisson et ouvrir sa chemise en grand. Parce que, évidement, si Yaël venait s'installer, Jolan allait réclamer aussi. Le voyage, bien que court, avait été éprouvant et il était normal que les deux bébés soient en quête de réconfort. Juan s'enfonça dans le canapé moelleux, un enfant calé dans chaque bras et deux bouches voraces collées à son torse. Il ferma les yeux. Autour de lui, il entendit Rémi ranger leurs affaires, mettre la bouilloire en marche, sortir des feutres et du papier pour les plus grands et échanger quelques mots avec son fils adolescent, puis la porte claqua. Un bruissement face à lui lui indiqua que son ami était assis dans le profond fauteuil, à l'opposé du canapé.
— Tu es magnifique.
Juan ouvrit un œil et toisa l'Alpha.
— À moitié à poil et un bébé ventousé à chaque nichon ? T'es certain d'avoir bien regardé ?
— Tout à fait certain. J'adorais regarder Lana allaiter mes enfants, même si elle l'a fait bien moins longtemps à cause de son travail.
— Mais je ne suis pas ta femme. Je suis même pas une femme !
— Chaton, je suis en couple avec un homme alpha depuis vingt-six ans. Je sais reconnaitre un bel homme quand j'en vois hein.
— Chaton ?
— Désolé. C'est sorti comme ça. Un thé ?
— S'il te plait.
Rémi passa une main dans ses cheveux et se releva pour les servir dans deux tasses en porcelaine fine qu'il posa sur la table basse, en prenant soin de les garder éloignées des enfants afin de ne pas les brûler. Juan rabattit sa chemise sur son côté droit après que Yaël fut descendu du canapé pour aller explorer le salon et Juan le surveilla du coin de l'œil.
— A priori il n'y a rien de dangereux, j'ai demandé à mes enfants de faire un tour pour s'en assurer avant de partir.
— Tu les as virés pour nous ?
— Oh non, si tu savais ! C'est rare de les avoir à la maison tous les deux en même temps le weekend maintenant ! Anna devait déjà dormir chez des amies ce weekend, et probablement chez son copain en fait même si elle n'ose pas me le dire, et Thomas est ravi de pouvoir aller passer la nuit à tuer des gens sur la console de son meilleur ami.
— Donc t'as viré que Thomas, quoi.
Rémi ricana, et se pencha pour accepter le livre cartonné que Yaël lui apportait, puis hissa le bambin sur ses genoux pour lui faire la lecture. Juan l'observa un moment, amusé, puis déposa son fils sur le sol le temps de refermer sa chemise. L'enfançon en profita pour s'échapper à quatre pattes explorer la pièce, encore peu assuré dans ses mouvements. Son père l'observait du coin de l'œil quand il saisit la délicate tasse de porcelaine sur la table basse. Yaël le rejoignit bientôt dans ses explorations et Rémi se dirigea vers la cuisine. Le départ en catastrophe suivi du trajet en métro en fin d'après-midi avait épuisé tout le monde, et bientôt les enfants furent rassasiés, lavés, et couchés. Théodore avait eu le droit de regarder un film, puis de lire un peu à la lueur de sa lampe frontale pour ne pas réveiller Charlotte qui dormait depuis plus longtemps, dans la chambre de la fille aînée de Rémi. Yaël avait fini par s'endormir sur le matelas que l'Alpha avait posé au sol dans sa chambre, bientôt suivi de Jolan, et Juan se releva avec un soupir de soulagement pour rejoindre son ami dans le canapé.
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Révolution
RomansaUne révolution, c'est un bouleversement, un changement. Une révolution, c'est aussi un tour complet sur soi même. Le tour que la Terre fait autour du soleil. Une révolution, c'est aussi ce que vit Juan, Oméga récessif, considéré comme stérile, 35...