₃₄. ғʟᴀsʜʙᴀᴄᴋ

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Yael

11 ans

Je n'ai jamais rien vécu, dans ma vie.

Une famille complète, une maman formidable, un père dur, mais qui donne à un fils tout ce dont il a besoin. Un grand frère exemplaire, une petite sœur chiante, mais rayonnante comme le soleil de ma vie.

Des oncles, des tantes, des amis devenus la famille.

Tout est parfait.

Tout était parfait.

Je savais ce que papa et mes oncles faisaient, et ce que signifiait le Brahman. J'ai assisté à des réunions, vu des armes beaucoup trop tôt, compté de l'argent pour papa, quand je voulais jouer au grand et qu'il finissait pas craquer, pour ensuite se faire disputer par maman quand je craquais et que je lui racontais ce que je pensais etre drôle.

J'ai perdu ma grand-mère, il y a deux ans, c'est surement la seule chose triste que j'avais vécu jusqu'ici.

Maman m'a toujours dit que Dieu éprouvait ceux qu'il aimait, à leur juste valeur, et à l'échelle qu'ils pouvaient supporter.

Je pensais que mon épreuve était de perdre mamé, et regretter de ne pas avoir été si proche d'elle, comme Dara l'était, par exemple.

Car c'était douloureux, de perdre une grand-mère, mais je pouvais le supporter et me relever.

Alors je me suis dit, que ça y'est, Dieu m'aimait et me le montrer.

J'étais heureux, mais je n'en demandais pas tant.

Car cette fois-ci, cher Dieu, je suis désolé de te dire que je ne supporterais pas, et que cette épreuve, comme on les appelle, dépasse toutes celles que j'aurais pu vivre dans ma vie.

Ce soir, toute ma vie vient de basculer.

La vie paisible, belle et parfaite que je vivais, viens d'etre déchirée en deux, comme ma famille et mon cœur.

Comment as-tu pu me faire ça ?

Essoufflé, je cours sans m'arrêter, sans aucun but précis, sans savoir pourquoi, ni pour aller ou.

Je sais juste que je cours.

Je cours sans m'arrêter.

J'ai mal aux jambes, je ne sens plus mes poumons, je ne respire plus à cause des sanglots qui me compressent la cage thoracique, et tousse à force de m'étouffer dans mes larmes, mais je continue de courir.

Sous mes yeux repassent en boucle les images de cette soirée qui fait désormais partie de moi. Qui sera, à partir de maintenant, les compagnes de toute ma vie.

Elles sont ancrées sous mes paupières, dans mon cœur parti en fumé, au fin fond de mon esprit, prennent possession de tout ce que j'ai au fond de moi pour ne jamais partir afin que je ne les oublie jamais.

Je les entends rire, comme ces hommes qui ont tué maman.

Je les vois bouger, comme le corps de maman en train de mourir, sa gorge ouverte et ensanglantée, alors que les pleurs de Alyah retentissent de plus en plus.

Mon cœur qui pourtant m'avait l'air mort sur le coup, accélère, et pulsent dans tout mon etre, provoquant une hyperventilation que je ne gère plus. Je m'arrête, à côté de la station essence proche du stade, prend appuie sur un muret, la tête entre mes mains, et essaie tant bien que mal de respirer.

Mais c'est dur, alors que mon monde vient de s'écrouler sous mes yeux.

Que la source de ma vie, de ma force et de ma respiration vient de disparaitre.

PUPILLE - BRAHMAN PARADISE Où les histoires vivent. Découvrez maintenant