₅₉. ғʟᴀSʜʙᴀᴄᴋ

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Yael

16 ans

Le ciel est sombre au-dessous de nous, et le vent s'agite violement, comme venu pour accompagner cette nuit d'horreur ancré à jamais dans ma mémoire mais également en mon âme.

Un éclair éclate dans le ciel, me figeant sur place.

Est-ce la colère de Dieu qui vient s'abattre sur nous ?

Le bruit des pèles qui s'entrechoquent raisonne au fond de mon esprit, ainsi que le bruit du coup qui a explosé dans mes tympans.

J'ai les mains en feu, en plus d'etre en sang, lorsque je lâche la mienne.

Elle s'écrase au sol, puis les trois autres suivent rapidement.

Mes mains rouges sont maintenant recouvertes de terre et de cloque du au frottement du bois contre ma peau.

Debout, face à cette tombe improvisée, ou plutôt, le tombeau de mes folies à jamais caché du monde, j'essaie de respirer un grand coup. Je ferme les yeux, mais revoie automatiquement le trou dans son crâne, ou encore le sang dégouliné jusqu'à mes pieds.

Mon cœur s'emballe.

Selon Enzo, qui tue depuis qu'il a douze ans, ôter une vie, c'est etre un homme, dans notre monde. Nombreux sont les enfants tombants là-dedans, très tôt, comme si c'était la destiné à poursuivre.

Pourtant, je n'ai pas l'impression d'etre un homme.

En retirant une vie, mon humanité vient de s'éteindre.

J'essaie de visualiser comme lui.

« C'est la vie dans laquelle nous sommes. » « Ce sont les lois qui obligent. »

Pourtant aucun mot n'estompe ma peur et mon envie de vomir.

Je respire un coup pour repousser mes hauts les cœurs, jusqu'au moment ou une main se pose sur mon épaule.

Perdu au fond de mes pensées, je sursaute, puis tombe sur le regard de Farid. Sérieux, fort, poignant et maitrisé, il pose ses deux mains sur mes épaules.

-Va t'assoir.

Je ne bouge pas pendant quelques secondes, comme paralysé, puis fini par les rejoindre vers l'arbre sous lequel sont assis Swann et Alyah.

Je n'ose pas les regarder, incapable d'accepter ce que je viens de leur faire vivre. Incapable d'entendre que je viens de les priver d'un soupçon de leur humanité, car ma colère était ingérable.

Pourquoi ai-je tiré, déjà ?

Je me laisse tomber le long du tronc, au côté de ma sœur qui a ses genoux remonté contre sa poitrine, les joues remplies de larmes et ses habits encore plein de sang du corps que nous avons portés à plusieurs.

Deux éclairs explosent à nouveau dans le ciel, puis les premières goutes commencent à tomber.

Il fait beau toute la semaine, et c'est cette nuit que le ciel se met en colère.

Le beau temps est parti avec la vie que j'ai retirée, me condamnant à ressentir ce qui me hantera à jamais, le froid et la noirceur dans lesquelles pourrissent les âmes comme les miennes.

Farid se racle la gorge avant de s'accroupir en face de nous, prêt à continuer de maitriser la situation.

-Ok, commence-t-il. Ce qui vient de se passer ce soir ? Personne ne devra jamais le savoir.

-Pas meme Kai ? demande ma sœur, paniquée.

La mienne se multiplie, je reste les yeux ancrés dans le sol, imaginant ce que mon grand frère pourrait penser de moi, en sachant ça. Lui qui méprise la haine, la violence et les assassins.

PUPILLE - BRAHMAN PARADISE Où les histoires vivent. Découvrez maintenant