₅₀. ʟᴇs ᴛᴏᴜʀɴᴇsᴏʟs

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Lyviee

Assise dans ma cuisine, je joue avec Chou depuis maintenant plus d'une heure, n'ayant la motivation de rien d'autres. J'ai donné raison à ma flemme en m'asseyant contre mon frigo, face à ma fille, et ne bougeant plus, meme alors que je meurs d'envie de faire pipi. A vrai dire, je profite d'un moment de calme pour réfléchir et essayer de comprendre tout ce qui m'est tombé dessus.

Je ne sais pas ce qui est le pire entre l'échec de ma mission, l'attaque d'un Corsica, ou mon baiser avec Yael.

Une partie irrationnelle me cris que c'est très clairement la dernière option, mais celle qui réfléchit me rappelle que certes, c'était une erreur monumentale, mais qu'elle ne m'enverrait pas à la mort, au moins. Que ma mission, à nouveau échouée, pourrait me couter beaucoup plus.

La musique à fond dans mon appartement est là pour m'aider à penser à autre chose, mais les lèvres de Yael et le regard de Cristale tournent en boucle dans ma tête, m'empêchant de faire quoi que ce soit, et m'enlevant toute ma force. Le désespoir m'accable clairement, me renvoyant mes échecs cuisant au visage, et je vois ma liberté avec Lewy s'envoler de plus en plus.

Je suis prise dans un engrenage violent et lourd qui m'empêche de voir clair et de réfléchir. J'évite Lewy pour ne pas affronter son regard rempli d'espoir, et j'évite Orion pour ne pas voir son visage s'assombrir de plus en plus. Je rate mes missions par peur de tuer des innocents, et crains les représailles de mes échecs. J'aimerais en parler à Lewy, mais n'ai pas la force de briser ses rêves sans essayer de les réaliser. J'aimerais en parler à Orion, mais n'ai pas le droit de le mettre, encore, en danger.

C'est dur, épuisant et sombre. Ma force est en train de s'effondrer, et je crains bien de ne pas tenir le coup bien longtemps.

Heureusement que ma petite boule de poil est là pour faire passer mes journées sombres qui se ressemblent toute, et me donner la force de me lever au bout d'une heure à jouer avec elle.

-Aller, tu as raison, dis-je en me levant. Je pue.

J'ai promis à Orion que je viendrais manger avec lui, ce midi, et meme si je n'ai plus aucune motivation à faire quoi que ce soit qui me force à sortir de chez moi, je ne peux pas lui mettre un plan. Et au fond, il commence à vraiment me manquer.

Je me douche rapidement et enfile une robe fleurie qui appartient à Julia, embrasse ma chou et attrape mon sac. Nous allons manger dans un restaurant qu'il adore, et c'est rare que nous fassions ce genre de chose si banale, pour les « gens normaux ».

Ce détail me fait tout de suite sourire et me donne un peu plus envie de vivre.

Dehors, il fait chaud, le soleil bat son plein, et m'aide aussi à apprécier la vie qui s'offre à moi. Je veux dire, il pourrait pleuvoir, et j'ai fini par comprendre que le mauvais temps me donnait encore plus envie de mourir.

Du soleil, un restaurant, et Orion.

Ça va le faire, Lyv.

Musique à fond et toit décapoté, ce moment de liberté et de fraicheur me donne toujours un peu plus de force. Il me donne l'impression de respirer un peu mieux, et d'etre plus libre que je ne le suis.

Parfois, il suffit d'une impression pour nous maintenir hors de l'eau.

J'accélère, les cheveux au vent, chantant sur du Lana Del Rey, pour me donner l'assurance que donne cette femme, et sort une cigarette que je cale entre mes lèvres.

La descente que je prends comme raccourcis me mène à une route que j'adore, parsemé de champ à tournesol, qui m'apaise à chaque instant ou je roule à ses côtés. En fin de compte, je ne suis pas vraiment sûr que ce soit un raccourci, mais il n'y a jamais personne, et c'est un peu mon moment à moi de solitude et de liberté.

PUPILLE - BRAHMAN PARADISE Où les histoires vivent. Découvrez maintenant