9
Au troisième étage, nous pûmes reprendre notre souffle.
— Comment as-tu fait pour échapper au clown avec le revolver ? demandai-je à Anaïs.
— Rien du tout, me répondit-elle. De toute évidence, les clowns n'en ont qu'après toi. Après qu'ils t'aient emmené ailleurs, celui qui me menaçait est parti à son tour. Comme cette tour est un immense jardin botanique, je n'ai pas eu beaucoup de mal à trouver des outils de jardinage pouvant servir d'armes. Ensuite, je t'ai cherché. Je t'ai trouvé et tu connais la suite.
Je regardai le sexe d'Anaïs.
— Tu as trouvé le temps de te raser le pubis, constatai-je.
— Oui. Il fallait bien que je le fasse.
Anaïs avait l'air inquiète. À son tour, elle contempla mon corps.
— Nous avons plein de sang sur nous, fit-elle remarquer. Il faut nous en débarrasser !
Elle prit un tuyau d'arrosage devant servir à arroser les plantes. Elle l'actionna et fit passer le jet de haut sur mon corps de haut en bas, pour faire partir tout le sang. Je trouvai cela agréable. Je fis lentement un tour complet sur moi-même pour qu'Anaïs puisse bien me rincer entièrement.
— À mon tour d'être lavée, déclara Anaïs lorsqu'elle eut terminé.
Nous échangeâmes nos places. Je nettoyai Anaïs au jet d'eau, de la même façon qu'elle avait procédé avec moi. Elle fit lentement un tour complet sur elle-même. Tout d'un coup, ce ne fut plus de l'eau qui jaillissait du tuyau d'arrosage, mais du sang. Je l'arrêtai aussitôt.
— Maintenant, j'ai encore plus de sang sur moi qu'avant, se plaignit Anaïs.
— Encore un mauvais tour des clowns, commentai-je.
Anaïs repéra des chiffons posés sur un gros pot de fleurs. Elle les utilisa pour essuyer le sang sur son corps. Charlie Myosotis arriva.
— Ah ! Vous voilà ! s'exclama-t-il. Je vous cherchai partout ! Les photographes vous attendent !
— Mais ils se sont transformés en clowns ! protesta Anaïs. Vous l'avez bien vu !
— Nous avons dû être victimes d'une hallucination collective, supposa Charlie Myosotis. Lorsque je me suis réveillé, les photographes étaient parfaitement normaux.
Anaïs et moi n'eûmes pas d'autre choix que de le suivre.
10
De retour au septième étage, j'avais craint de découvrir que les artistes étaient toujours transformés en clowns, mais non, Charlie Myosotis n'avait pas menti. Ils étaient bel et bien redevenus normaux et ne semblaient pas avoir conscience de ce qui leur était arrivé un peu plus tôt. C'est avec plaisir que je fus à nouveau photographiée nue, dans différentes poses, aux côtés d'Anaïs.
La séance s'acheva sans qu'aucun clown n'ait fait sa réapparition. Les artistes s'en allèrent. D'autres personnes arrivèrent en portant divers appareils électroniques, notamment de grosses caméras.
— Noémie, nous allons tourner un film et commencer tout de suite, m'informa Charlie Myosotis. Accepterais-tu d'y jouer le premier rôle féminin ? Il ne devrait te poser aucun problème vu que c'est celui d'une fille qui fait ce que tu as fait ce matin.
Il me tendit le script. J'en lu quelques pages. C'était l'histoire d'une fille servant de modèle pour un artiste peintre, ce qui n'était effectivement pas sans me rappeler ce que j'avais fait ce matin. Le scénario était apparemment un plagiat d'un chef d'œuvre du septième art français, vieux d'une quinzaine d'années.
— Dans la Tour Botanique, on tourne aussi des films, m'expliqua Charlie Myosotis.
Il se tourna vers l'un des techniciens.
— Au fait, le faux sang a-t-il bien été préparé dans le tuyau d'arrosage ? lui demanda-t-il. Le tournage du film d'horreur au troisième étage va bientôt commencer.
— C'est fait, Monsieur, lui répondit le technicien.
Ainsi les clowns n'avaient rien à voir avec ce qui s'était passé lorsqu'Anaïs et moi avions utilisé le tuyau d'arrosage. Il ne s'agissait que d'un trucage de cinéma.
— J'accepte le rôle, décidai-je sans hésiter.
— C'est parfait, Noémie, m'approuva Charlie Myosotis. Prépare-toi. On commence à tourner dès que tu es prête !
Je me rhabillai, alors que, d'après le script, j'allai aussitôt devoir me dévêtir entièrement.
— Tous mes vêtements ont disparu ! s'exclama Anaïs. Maintenant que j'y pense, je crois bien qu'ils n'étaient déjà plus là quand nous sommes revenues.
— Quelqu'un a sûrement profité de notre absence pour les subtiliser, en déduisis-je.
Anaïs s'en alla, fort contrariée.
— Attention ! s'écria Charlie Myosotis. Trois... Deux... Un... Ça tourne !
Je retirai à nouveau tous mes habits sans exceptions. Je m'avançai droit devant la caméra. Je fis semblant de glisser puis une chute entièrement simulée me faisant atterrir sur le dos.
— Comment vas-tu ? récita l'acteur jouant le rôle du peintre en s'approchant de moi.
Je me relevai.
— Un peu sonnée, récitai-je à mon tour.
— Promènes-toi donc dans le jardin le temps de retrouver tous tes esprits. Nous commencerons dès que tu iras mieux, déclara l'acteur.
Je déambulai au milieu des plantes. Les caméras filmaient tous mes allées et venues. De temps en temps, je m'arrêtai pour respirer le parfum d'une fleur.
— Noémie, chuchota quelqu'un.
Je tournai la tête tout en continuant d'avancer et je me cognai dans quelqu'un. C'était un grand clown obèse armé d'un gros marteau.
— Ce n'est pas dans le script ! s'exclama Charlie Myosotis.
En me baissant, j'évitai de justesse un coup de marteau qui m'aurait certainement tué. Je me mis à courir.
— Qu'est-ce qu'on fait ? demanda un caméraman tout en continuant à me filmer.
— Continuez de filmer, décida Charlie Myosotis.
Je me retournai. Le clown s'était lancé à ma poursuite en riant. Je continuai de courir. Les caméramans couraient aussi, mais c'était pour nous filmer, mon poursuivant et moi. Droit devant moi, un jardinier arrosait des plantes. Je l'évitai puis je me retournai. Le clown fracassa le crâne du jardinier avec son marteau, faisant gicler plein de sang. Le gros meurtrier se mit à rire encore plus fort. Un clown maigre surgit de derrière un arbuste. Il m'attrapa un bras tout en mettant sa main libre sur mon sexe. Il me força à me retourner, face à son ignoble confrère obèse. Puis il me fit tomber sur les fesses avant de s'enfuir. Je me retrouvai assise par terre, les jambes écartées. Le gros clown brandit son arme sans cesser de rire. Je me traînai un peu en arrière. Ce fut tout juste suffisant pour que le marteau s'abatte entre mes cuisses au lieu que ce soit sur ma tête. L'énorme meurtrier leva à nouveau son arme. Fragilisé par son dernier coup, le sol se fissura, puis se brisa sous mon poids. Je chutai à l'étage en-dessous.
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La piscine hantée et autres histoires d'épouvante et de nudité
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