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Ce fut donc dans une nudité complète que nous autres esclaves servîmes des plats et des boissons à nos potentiels acheteurs attablés. Parmi ceux-ci, certains s'amusèrent à allumer des allumettes dont ils firent frôler la mèche du bâton de dynamite que j'avais toujours enfoncé dans mon anus. Ce jeu cruel me terrifiait. Tôt ou tard, la mèche finirait par prendre feu, me condamnant alors à une mort certaine. De temps en temps, les momies frappaient leurs esclaves à coups de bâton sur les fesses ou le dos, sans raison apparente. J'en reçus moi-même quelques uns.
— Ce jeu avec les allumettes devient lassant, décida Akazor VI au bout d'une demi-heure. Noémie, tu peux retirer le bâton de dynamite.
Il n'eut pas besoin de me le dire deux fois. Je retirai le mortel objet et le jetai négligemment au sol. Il roula vers le miroir. Akazor VI me tendit un vieux balai.
— Passe un coup de balais autour des tables, m'ordonna-t-il. Les autres esclaves sont bien assez nombreuses pour servir les plats sans toi.
— Bien maître, répondis-je en espérant que le fait de reconnaître ma soumission envers lui me vaudrait d'être traitée moins sévèrement.
Je balayai près des tables, tout en écoutant discrètement les conversations des gens attablés. Je ne parvenais à n'en saisir que des bribes. Elles m'apportèrent néanmoins des informations intéressantes.
— Vous vous méprenez. Il semble que nous venons tous d'Europe, dit une dame à son voisin. Aucun de nous n'avait déjà entendu parler d'un désert violet avant de recevoir l'invitation du pharaon et de son épouse.
— Akazor a été très clair, expliqua un vieil homme barbu à la personne en face de lui. Il ne vendra qu'une seule de ses esclaves et ce sera au plus méchant d'entre nous.
— Ce breuvage est délicieux, commenta quelqu'un. Qu'est-ce qui est écrit sur la bouteille ? Sang de petite fille égorgée par ses parents.
Maintenant, je savais pourquoi les momies n'hésitaient pas à tuer leurs esclaves. Elles avaient l'intention de n'en vendre qu'une seule. J'en déduisis que l'appât du gain n'était pas leur motivation, d'autant plus que ce n'était pas au plus offrant qu'elles voulaient vendre une esclave. Je supposais que les momies avaient capturé plusieurs filles afin d'offrir un large choix à l'acquéreur. Inutile de se faire des illusions sur le sort des filles qui n'auront pas été choisies. Elles seront exécutées en guise de divertissement.
Une momie posa un tabouret devant le miroir. La fourmi géante s'en approcha.
— Noémie, donne le balai à quelqu'un d'autre et viens par ici, me lança-t-elle.
— Tout de suite votre excellence, répondis-je en donnant le balai à une autre esclave.
J'accourus vers la fourmi géante. Akazor VI s'approcha également du miroir.
— Assieds-toi sur le tabouret et écarte les cuisses, Noémie, m'ordonna-t-il.
— Comme ceci, maître ? demandai-je en m'asseyant dans la position exigée.
Il ne daigna pas me répondre. Une momie m'attacha les chevilles à des anneaux en fer qu'elle cloua au sol. Hélas, c'était probablement le signe que j'allais être la prochaine esclave exécutée.
— Ne me tuez pas ! suppliai-je.
— Nous ne te tuerons pas si tu es sage et que tu fais tous ce que l'on te demande, m'informa la fourmi géante.
— Lève les bras en l'air, Noémie, m'ordonna Akazor VI.
Une momie m'attacha les mains à une chaîne dont elle accrocha l'autre extrémité au plafond. Celui-ci se trouvant assez haut, elle dut utiliser un très grand escabeau pour y parvenir.
— Noémie, à cause de ta fugue cette après-midi, nous n'avons pas pu te dresser, m'expliqua Akazor VI.
— Me dresser n'est pas nécessaire, répondis-je. Je vous assure que je serai la plus obéissante de toutes vos esclaves.
Une momie emmena l'escabeau ailleurs. Akazor VI brandit son sceptre. De nombreuses épines de fer sortirent de cet objet.
— Je veux bien te croire, Noémie, me répondit-il. Néanmoins, tu dois quand même être punie.
— Ne l'ai-je pas déjà été ? J'ai été humiliée devant tout le monde juste avant le banquet et...
La fourmi géante me gifla.
— Je voulais dire... Vos désirs sont des ordres, maîtres, rectifiai-je.
— Voila qui est mieux, Noémie, approuva Akazor VI. Cinq coups devant et un derrière !
Avec son sceptre, il me frappa cinq fois sur les cuisses. Les épines me firent saigner. Ensuite, il me lacéra le dos un coup.
— C'est fini, Noémie, m'annonça-t-il.
Son sceptre était couvert de mon sang.
— Concernant ta condition d'esclave, as-tu des questions, Noémie ? me demanda la fourmi géante.
Des questions, j'en avais plein. Akazor VI et la fourmi géante étaient-ils mes vrais parents ? Sinon, pourquoi s'étaient-ils fait passer pour eux ? Comment pouvais-je faire pour rentrer chez moi ? Dans quel coin du monde se trouvait ce mystérieux désert violet ? Je craignais toutefois que mes interlocuteurs n'apprécient guère que je pose toutes ses questions. Je décidai donc d'en poser une qui me paraissait moins risquée.
— Pourquoi nous avoir privées de tous nos vêtements ?
— Parce que ce ne sont plus vos vêtements, mais les nôtres à mon épouse et moi, m'expliqua Akazor VI. Maintenant que vous êtes des esclaves, tous vos biens nous appartiennent. C'est aussi pour nous assurer que chacune d'entre vous soit saine et n'ait aucun défaut. Nous ne pouvons décemment pas vendre une esclave ayant une quelconque malformation ou infirmité.
D'un coup de pied, il renversa le tabouret sur lequel j'étais assise. Cela ne me fit pas tomber. C'était impossible que je tombe, étant donné la position dans laquelle j'étais attachée.
— Mesdames et messieurs, lança Akazor VI aux gens attablés, après avoir longuement délibéré, mon épouse et moi sommes arrivés à la conclusion que le plus méchant parmi vous est Jean-Louis Fernandes. C'est donc à lui que revient l'honneur d'acheter l'esclave de son choix.
Un homme assez âgé, au regard sévère, se leva.
— Merci, déclara-t-il. Je souhaite acheter Kimi.
— Elle coûte dix-sept centimes, le prévint la fourmi géante.
— Je doute qu'elle en vaille autant, mais je peux largement me permettre une telle dépense grâce à ma fortune, déclara Fernandes.
Vendue à un prix aussi bas, la dénommée Kimi devait se sentir très humiliée. Fernandes s'approcha d'une jeune fille qui ne pouvait qu'être Kimi et lui saisit brusquement un bras.
— Allez, viens ! Il y a beaucoup de travail qui t'attend ! lui lança-t-il en affichant un sourire cruel.
— N'oubliez pas de me payer, le prévint Akazor VI en s'approchant de lui.
Fernandes lui passa quelques pièces.
— Et comment je fais pour rentrer chez moi maintenant ? demanda-t-il.
La fourmi géante se tourna vers le miroir.
— Miroir magique, ramène Jean-Louis et son esclave chez lui, exigea-t-elle.
Fernandes et Kimi furent aspirés à l'intérieur du miroir. Je ne les revis plus jamais.
— Revenez demain soir, lança Akazor VI aux gens attablés. Nous vendrons d'autres esclaves.
Les convives s'en allèrent. Les momies emmenèrent toutes les esclaves ailleurs, sauf moi. Tout le monde partit. Il ne resta plus que moi dans la salle. Personne ne m'avait détaché.
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La piscine hantée et autres histoires d'épouvante et de nudité
HorrorLa piscine hantée : Une jeune fille se rend dans une piscine où il se produit des phénomènes étranges. Le désert de l'horreur : Sans savoir comment, des jeunes filles se retrouvent dans un étrange désert violet où elles sont rapidement capturées par...