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La cité ayant été construite dans un ancien volcan, il y avait un certain nombre de conduits creusés par la lave qui permettaient d'accéder à la surface. Le plus large, situé au centre, avait été bouché car trop difficilement défendable, et couvert d'un bouclier magique surpuissant. Étant donné le palais se trouvait juste en dessous, c'était compréhensible. Les autres, disséminés un peu partout entre les bâtiments qui pendaient en stalactites depuis le plafond, avaient des tailles variables et des accès différents. Certains étaient uniquement pédestres, mais pour en avoir emprunté quelques uns, je ne les recommandais qu'aux randonneurs avertis. D'autres étaient mixtes, et je détestais le vacarme des navettes qui passaient à toute vitesse à côté, explosant mes tympas. Les derniers, enfin, étaient uniquement destinés aux vaisseaux eux-mêmes, et ce fut l'un d'entre eux que nous empruntâmes. Dans la circulation matinale encore fluide, notre coquille d'œuf fusa à toute vitesse, louvoyant dans les virages serrés de la roche.

Il ne fallait décidément pas être claustrophobe quand on était un dvergr de Stronstall. Entre la grotte sans soleil naturel, les corridors étroits qui menaient à la sortie et les bâtiments au combien incroyablement designés mais collés les uns aux autres... c'était un mode de vie que je ne tolèrerais pas plus de quelques semaines.

Mais finalement, l'éclat de la lumière du soleil qui ne s'était levé que depuis peu frappa mes rétines habituées à la pénombre, et je souris en sentant le rayonnement chaud traverser le verre. La navette jaillit dans l'air frais, catapultée par sa propre accélération, survola une vaste plaine vide avant de plonger à nouveau vers le sol, cette fois aux alentours d'une arène à ciel ouvert construite à quelques kilomètres de la ville. C'étaient là que se tenaient les grands tournois nains et, lorsqu'ils n'avaient pas lieu, les entraînements. Le pilote, qui devait avoir été prévenu, nous gara tout près de l'entrée extérieure des vestiaires – situés au sommet de l'amhithéâtre, évidemment, pour contredire ma logique humaine qui les aurait placés en bas – nous laissa descendre, puis éteignit les moteurs. Les navettes se garaient suspendues au-dessus du vide, comme en ville, tout en haut de la grande structure hémisphérique.

Keirv sur les talons, je traversai les vestiaires en vitesse, descendis les marches au pas de course, et bouclai mon sprint le long du périmètre de l'arène sablonneuse. Le temps que je revienne à mon point de départ, au bas des marches, un dvergr hirsute avait jailli de l'une des petites portes cachées dans les murs, les bras tendus. Il fonça sur moi sans le moindre préavis, poings levés. Je ne ralentis pas d'un cheveu, accélérai même lorsque je fus sur le point de le percuter puis, à la dernière seconde, bondis et lui fis un croche-pied vicieux, chargé d'électricité. Son pied cogna contre le mien, qui protesta – les os des dvergar étaient malheureusement plus denses que les miens – mais il décolla et fit un magnifique vol plané qui se termina le nez dans le sable. J'éclatai de rire, freinai, pivotai, et observai mon adversaire qui se relevait en pestant avec la grâce et l'éloquence d'un charretier.

— Salut Lily ! finit-il par lâcher lorsqu'il eut chassé la plupart du sable de ses épaules. Dame Keirv, ajouta-t-il.

Cette dernière inclina la tête en guise de salutation.

— Ça va ? m'enquis-je sur un ton si préoccupé qu'il se renferma sur lui-même, ronchon.

— Oh, ça va. Tu ne m'as pas fait si mal.

Je m'approchai de quelques pas précautionneux, donnai un léger coup dans sa cheville, et il fronça le nez. Je ne relevai pas, ne désirant pas insister, et cela ne fit que le pousser à se renfrogner.

— Bon miss ! En attendant tes adversaires, viens t'exercer.

Il me rappelait Ekrest par bien des aspects, et c'était probablement pour ça que je l'appréciais autant. Bourru, infatigable, patient mais exigeant, il ne prônait que l'amélioration constante. Il était excellent lorsqu'il s'agissait pour lui de m'apprendre à maîtriser mes pouvoirs encore fluctuants, à canaliser ma puissance, et il n'hésitait pas à me pousser dans mes plus profonds retranchements.

Le Cycle du Serpent [III] : L'Hiver des MaisonsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant