| 4 † 2 |

8 0 0
                                    

Veiri me fit parcourir de longs couloirs qui louvoyaient entre les forges, passa trois portes blindées bardées de détecteurs comme partout ailleurs, et il finit par m'amener devant un dernier battant de pierre tout simple, une haute porte comme les autres, à peine visible, ses joints fondus dans le reste de la roche, si parfaitement taillés qu'ils disparaissaient à la vue des passants inattentifs. Seule une pression de la main du nain sur sa surface, qui illumina les bordures grâce à la bioluminescence naturelle de la roche, me permit de la remarquer alors que j'allais passer à côté.

— Ceci, ma p'tite demoiselle, est la pièce la plus secrète de cet atelier. C'est ici que se passent les plus belles choses.

La porte coulissa lentement, s'encastrant dans le mur qui la soutenait par une absurde forme de magie que je ne comprenais pas, et je pénétrai dans ce qui s'apparentait à la caverne aux merveilles d'Ali Baba. Le long des murs s'étiraient d'immenses étagères surchargées de bijoux, d'armes, de pierres précieuses, d'outils en tous genres. La pièce elle-même vibrait d'une puissance magique qui rivalisait avec la ceinture de force de Thor, surchargée des ondes d'énergie qui émanaient des objets qu'elle stockait. Elle était longue de plusieurs dizaines de mètres, suffisamment large pour permettre à six hommes de passer côte à côte lourdement armés. Au fond flamboyaient les flammes d'un immense âtre, que je supposai être l'atelier principal du maître des lieux.

— C'est ici que naissent les miracles ! lança le dvergr, un large sourire aux lèvres.

Il m'entraîna le long des rayonnages, passant à côté des objets d'un pouvoir incommensurable comme si c'étaient de simples breloques. En passant le long des étagères, je notai que tous les objets étaient différents dans leur forme, que c'étaient des créations individuelles et non des productions de masse comme le reste de ce qu'il m'avait montré.

— C'est mon aïeul Veiri, premier du nom, qui a créé cet endroit. Après ce qui est arrivé à Eitri et Brokk, il a décidé que la forge de la famille ne serait plus accessible à tous mais plutôt cachée. Évidemment, il nous arrive toujours de forger en public dans le cadre de concours, mais pour la plupart de nos expériences... Nous préférons les garder en sécurité ici, cela évite les incidents.

J'attrapai une chaînette d'or brillante, la fis jouer entre mes doigts en marchant, réalisai qu'elle s'étirait à l'infini à partir du moment où elle était enroulée au moins une fois autour d'un objet, et la reposai quelques rangées plus loin que là où je l'avais prise sans que le propriétaire ne semble en avoir cure. En passant derrière la dernière étagère, il pointa une sorte de laser vers un point précis et soudain, tout un pan de mur descendit depuis le plafond pour isoler le secteur de la forge du reste de l'entrepôt. Les flammes rugirent, alimentées par une ventilation automatisée synchrone avec le verrouillage de la salle, et je pivotai sur mes talons, curieuse.

Isolée du reste de la grande salle, la pièce ressemblait à l'un des dix autres ateliers que j'avais déjà passés dans le complexe de la forge. Un bureau sur un côté, l'âtre principal, long et profond, suffisamment pour construire un tank entier dedans sans difficulté, une véritable fournaise de Muspellheim. Même à cinq mètres du bord, je sentais la chaleur des flammes sur ma peau.

— Je suppose que les alarmes sont à quatre cent pour cents ici ? osai-je.

— Eh bien en vérité... pas vraiment. C'est le seul endroit parfaitement isolé, et donc le seul où je n'ai absolument aucune sirène. Mais l'entrée est impénétrable, il y a un système de laser auto-alimenté sur les ventilations qui carbonisera n'importe quel... insecte... qui voudrait essayer d'entrer.

Il y avait un certain venin dans sa voix à la mention des insectes, et je souris.

— Absolument aucune ?

Le Cycle du Serpent [III] : L'Hiver des MaisonsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant