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— J'ai un scoop alors.

Il me questionna du regard.

— Elle est probablement à Stronstall. Ankri a parlé d'un « joyau de sa collection » qu'ils auraient volé à Skadi il y a un moment déjà.

— Tu me fais marcher... grommela-t-il, blasé.

Je haussai les épaules.

— C'est moi ou tu es toujours au bon endroit ?

— Honnêtement, je pensais être dans une période creuse de mon chaos habituel, je croyais que j'allais pouvoir me poser. Quand il a parlé de Skadi...

— J'hallucine.

Il secoua la tête de gauche à droite, un rictus grinçant aux lèvres.

— Je vais finir par te suivre partout, et tu vas juste m'amener aux clefs en te promenant dans les Neuf Mondes si ça continue.

— En principe, les trouver n'est pas un problème, non ? C'est plutôt les récupérer ?

— C'est vrai... marmonna-t-il.

La clef d'éther, il avait dû l'arracher à Thor, qui la portait sur lui en permanence. La clef d'ambre aurait été en possession de Skadi si les dvergar ne l'avaient pas volée et enfermée à quadruple tour dans leurs coffres. La dernière, celle de sang, était certainement en possession d'Odin, son propriétaire originel. Il ne s'agissait pas tellement de la trouver, car le dieu quittait rarement sa demeure ces dernières décennies. Il fallait plutôt trouver un moyen de la lui arracher, ou de la négocier.

— Par contre... ça faisait combien de temps que tu savais pour... toi ?

Il n'eut pas besoin de dire le titre, je le lus dans la rancœur étouffée de son ton. L'Élue.

— Åke me l'a annoncé... avant qu'on aille voir Mímir.

— Et t'aurais pas voulu me le dire ?

— Genre avant ? Quand on s'est retrouvés ?

— Ouais.

Je le regardai en biais, sceptique, et il finit par ricaner.

— Ouais, ok. Mais ça aurait été sympa que je ne l'apprenne pas par l'autre psycho. D'ailleurs, comment... enfin, pourquoi... pourquoi il est comme ça ?

— Åke ? relevai-je. Honnêtement, je ne sais pas. La taule ça te détruit, mais je pense qu'il était déjà totalement fou avant.

— Il a l'air... explosif.

— Tu n'as pas vu ce que j'ai vu.

— Ah ?

Les souvenirs du massacre au pied du Bifröst affleurèrent, et je secouai la tête pour chasser l'image des cadavres transpercés. C'étaient mes demi-frères qu'il avait massacrés. Les siens aussi. Mais ça ne semblait pas lui importer.

— Ne... ne te bats pas contre lui. C'est tout ce que j'ai à dire.

— Tu veux dire que tu n'oserais pas le faire toi-même ? releva-t-il, percevant les nuances cachées dans l'horreur contenue de ma voix.

— Je craindrais sérieusement pour ma vie.

— Ah ouais.

Je laissai la remarque flotter, réfléchissant en silence. La plaine était morne et rocailleuse. Les coulées de lave avaient creusé des sillons dans le sol, et ces sillons s'étaient progressivement fendus et craquelés sous l'action de la pression, du temps et de l'érosion. Les dvergar avaient préservé leur environnement, aussi seuls de vagues sentiers de marche se dessinaient entre les vallons de la lave séchée, et le reste de la roche avait été laissée intacte. Heureusement que j'avais de bonnes chaussures de marche, sinon mes chevilles se seraient déjà tordues plus d'une fois dans les creux des fissures.

Le Cycle du Serpent [III] : L'Hiver des MaisonsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant