— Magnifique ! s'extasia Arnlari quand nos oreilles eurent recouvré leur acuité. À vous maintenant, exercices d'accélération.
Oh, par Loki...
La réflexion spontanée me tira un bref sourire. Malgré le temps que j'avais passé sous mon apparence d'une fille de Thor, intérieurement, je jurais toujours par mon père biologique. Ce qui, parfois, avait failli me causer des problèmes, alors que je rattrapais le nom à la dernière minute.
— Lyana, tu rêvasses ?
— Un peu, admis-je avec un sourire moqueur, ce qui fit ronchonner le dvergr dans sa barbe.
— Au boulot alors.
Je décidai de m'asseoir dans un coin, et de prendre un peu de distance avec les autres, qui s'étaient agglutinés autour de Kal comme des mouches sur un pot de miel. Même Aaron, aussi méprisant et distant soit-il avec moi, ne pouvait rester totalement insensible à la maîtrise de la foudre par un Hamershot. Ils quémandaient des conseils comme beaucoup l'avaient fait à la Confrérie avec moi lorsqu'ils avaient compris mon potentiel magique, ce que je ne pouvais pas leur reprocher. Ils étaient jeunes, impressionnables. Le plus jeune avait douze ans, le plus âgé devait en avoir dix-sept.
Et je parlais comme une petite vieille, parce que j'en avais toujours dix-neuf. Mais j'avais l'impression qu'il y avait un fossé entre eux et moi. Ils étaient encore des enfants par bien des aspects. Ils n'avaient guère quitté le nid de la Maison, si ce n'était pour des surveillances routinières, aucun n'avait encore participé à de vrais affrontements. Ils étaient couvés. Aucun n'avait encore eu à tuer.
Je fis apparaître une étincelle, la fis voltiger entre mes doigts. À une époque, je m'exerçais de la même manière avec une flammèche. Je devais avoir six ans, cinq peut-être. La première année, Ekrest m'avait surtout appris à me dissimuler et à me métamorphoser. Capacités essentielles d'un Loki, disait-il. Les flammes ne te serviront à rien quand tu devras te cacher.
La perte de ma pyromagie me taraudait toujours autant, mais l'électrokinésie avait apporté un peu de baume au cœur. Je retrouvais beaucoup de la nature sauvage et indépendante des flammes dans la foudre. Elle ne se laissait pas manier aisément.
Comme si elle suivait mes réflexions, l'étincelle que j'accélérais progressivement entre mes doigts crépita, et s'éteignit brusquement.
— Problème de concentration, ça ! me tança la voix moqueuse de Kal depuis l'autre bout de l'arène.
— Et dire que je m'étais mise dans un coin pour ne pas t'entendre !
— Essaie d'abord en cercle, avant de faire du linéaire.
Je fronçai le nez, la fis réapparaître d'un claquement de doigts, et repris mon accélération, mais cette fois autour de mon poignet. La différence fut nettement perceptible, comme si l'étincelle résistait moins quand elle suivait une trajectoire courbe. La main tendue, j'agrandis progressivement le cercle, puis en retirai ma main, ne laissant qu'une bille de lumière vagabonde qui tournait en rond. Je l'accélérai encore, focalisée sur le tracé, jusqu'à ce que la lumière s'attarde en queue de comète sur le passage de l'étincelle. Puis, j'agrandis le cercle encore, jusqu'à ce qu'il tourbillonne autour de moi, et j'injectai progressivement de l'énergie dans l'étincelle. Elle grossit, s'illumina encore davantage, faillit dérailler. Je la maintins en piste d'un violent effort de volonté, une brusque tension qui tira sur mes cervicales comme si j'avais fait un mouvement trop rapide.
Je la maintins ainsi durant une poignée de secondes, une trentaine de tours probablement, avant de la ralentir à nouveau, et de l'immobiliser. Ce n'était plus exactement une étincelle, c'était une boule d'électricité vibrante, chargée à bloc.
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Le Cycle du Serpent [III] : L'Hiver des Maisons
FantasyJe m'appelle Lilith. Il y a quelques temps encore, j'étais une Élite de la Confrérie de Loki, une tueuse fantôme au service de sa famille. Mais cette existence anonyme s'est effondrée. Aujourd'hui, j'erre dans les Neuf Mondes. Dotée de nouveaux pouv...