Chapitre 15 : Ténèbres et infiltration

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Myosotis baissa le micro pour qu'il soit à sa hauteur. Une caméra scrutait ses moindres mouvements, la rendant mal à l'aise.

‒ Capitaine Conor de l'Escadron Noir, annonça-t-elle. J'ai un rendez-vous avec le président Vangelis.

Une lumière vive l'aveugla. La reconnaissance faciale s'était activée. La porte finit par coulisser, et elle soupira de soulagement. Puis, elle pénétra à l'intérieur.

Une androïde aux traits sereins se dirigea vers elle. Elle portait l'uniforme gris clair de la méga corporation.

‒ Bien le bonjour, capitaine, la salua-t-elle en inclinant la tête. Je vais vous mener aux bureaux du président.

La jeune femme lui emboîta le pas. Tout en marchant, elle observa les allées et venues des employés de la SI et elle secoua la tête. En arriver là pour confirmer les propos d'un criminel, c'était tout de même exagéré. Elle mettait sa carrière militaire en jeu, et même sa vie. Enfin, elle ne pouvait plus reculer maintenant.

Elle n'arrivait pas à sortir Loxias de ses pensées. Pourquoi avait-elle copié la clé USB deux fois ? Elle aurait pu la lui rendre vide, surtout si cela mettait des bâtons dans les roues des terroristes de la Brigade Rouge. Enfin, cela aurait pu lui causer des problèmes.

Elle ne savait même pas pourquoi elle l'avait poignardé. Sans doute pour tenter d'effacer ce trouble qui envahissait son cœur.

En l'embrassant, elle voulait s'assurer de ses propres sentiments. Et elle avait peur de la réponse.

L'androïde l'abandonna dans une antichambre en lui assurant que le président serait bientôt là. Dès qu'elle fut sortie de la pièce, la jeune femme se dirigea vers la porte au bout du couloir et en crocheta la serrure.

Décidément, elle devenait beaucoup trop comme... lui.

Elle devait savoir ce que Loxias avait découvert pour rejoindre une bande de terroristes. Mais elle était trop fière pour lui demander.

La capitaine alluma l'ordinateur privé du président. Outrepassant la sécurité, elle fouilla pendant plusieurs minutes les données de la méga corporation, mais ne trouva rien d'intéressant. Peut-être que Loxias avait menti. Peut-être que la SI ne dissimulait rien. Elle n'en doutait pas. Alors, que faisait-elle là ?

Soudain, elle découvrit un petit dossier qu'elle n'avait pas examiné et cliqua dessus. La mention « accès non autorisé » s'afficha sur l'écran. Elle laissa échapper un juron. Il devait encore y avoir un code secret ou encore une authentification faciale.

Elle bidouilla l'appareil pendant plusieurs minutes en s'aidant des informations cryptées que contenait la copie de la clé USB. La Singularity Industries pensait sans doute que des terroristes n'arriveraient pas à les déchiffrer. Cela lui prit du temps, beaucoup trop de temps. Mais en persévérant un peu, elle parvint enfin à pirater le dossier.

Ce qu'elle y lut la paralysa. Abasourdie, elle referma le document. Au moment d'éteindre l'ordinateur, une sonnerie retentit. La jeune femme sursauta et se hâta de sortir de la pièce.

Tout à coup, un homme surgit devant elle. Il était grand, avait les cheveux brun-roux et portait un costume très élégant, à la dernière mode de Neo Paris. Elle s'arrêta en reconnaissant l'individu qui se tenait devant elle. Il s'agissait de Basilius Vangelis, le président de la méga corporation Singularity Industries.

***

Assis sur une chaise dans un coin de son repère, Loxias était pensif. Il se tortillait, cherchant une position confortable.

Il n'arrivait pas à croire qu'il s'était allié à Myosotis pendant un bref moment. Ils étaient tout de même dans deux camps distincts, et il s'était servi d'elle pour fuir Blue Mountain.

La jeune femme l'avait quand même poignardé. Pourtant, elle avait évité tout point vital. Voulait-elle réellement le tuer ou n'était-ce qu'un avertissement ?

Il ne pouvait cependant nier qu'il avait ressenti quelque chose en étant près d'elle. Ce baiser était irréel, tout comme la promesse qu'il lui avait faite. Est-ce qu'elle cherchait à jouer avec lui, à le faire souffrir ?

Kali s'approcha de lui.

‒ Comment ça va, mon garçon ? Tu m'as l'air bien préoccupé depuis que tu es revenu de ta dernière mission.

‒ Ce n'est rien, mentit-il, agacé par sa fausse prévenance.

Il fixa un instant ses chaussures du regard, puis releva la tête.

‒ Est-ce que vous aurez une mission pour les nightbreed ? questionna-t-il.

Il avait besoin de s'occuper l'esprit, de faire quelque chose. Il n'en pouvait plus de penser.

‒ A propos de ça, répondit le chef de la Brigade Rouge. Un membre du clan Keres a lancé une annonce pour voler ce qu'il a demandé en échange d'un gros paquet de pognon. Et nous avons besoin d'une grosse somme d'argent pour payer notre informatrice. Elle nous menace de nous livrer à la méga corporation si nous ne trouvons pas rapidement de quoi renflouer nos caisses.

‒ Elle ? sétonna le jeune homme.

‒ Oui, elle, autrement dit Alecto Magnus, l'ancienne mercenaire du sud.

***

Le colonel faisait les cent pas dans son bureau. Au bout d'un moment, il se tourna vers Myosotis :

‒ Capitaine Conor, nous voilà face à un problème. Il semblerait que vous vous soyez introduite par effraction dans le bureau du président de la méga corporation Singularity Industries, déclara-t-il.

‒ Mon colonel, s'écria brusquement la militaire, j'ai découvert que la SI a enfreint les lois de la Zone, et...

‒ Ce ne sont pas vos affaires, la coupa le colonel. Voilà le problème. Vous fourrez votre nez dans ce qui ne vous regarde pas.

Il marqua une pause, laissant la jeune femme méditer ses paroles.

‒ Qui fixe les règles de la Zone, à votre avis ? reprit-il.

Myosotis ouvrit la bouche, puis la referma. Elle avait été bien naïve. La méga corp pouvait transgresser les règles, puisque cétait elle qui les fixait.

‒ Cela dit, reprit-il, nous pouvons fermer les yeux pour cette fois. Vous êtes un membre valeureux de lEscadron Noir et nous ne pouvons pas se permettre de vous perdre. Ne laissez pas votre passé définir qui vous êtes aujourd'hui. C'est pourquoi nous vous offrons ceci pour que vous gardiez le silence.

Il lui tendit une enveloppe. La capitaine l'ouvrit et y trouva une liasse de billets. Elle comprit aussitôt qu'il lui offrait un pot de vin pour qu'elle ne révèle pas ce qu'elle avait découvert. Soudain, tout la dégoûta : le colonel, la Milice, la SI, et même sa propre personne. Elle tendit la pochette à son supérieur. Il ne la reprit pas, elle la laissa donc glisser au sol.

‒ Je suis désolée, mon colonel, mais je ne puis accepter cela.

‒ Je crois que vous ne comprenez pas bien la situation, capitaine Conor. C'est une offre gracieuse que nous vous proposons. Sinon, vous pouvez toujours passer en cour martiale.

Elle serra les poings. Elle ne se laisserait pas corrompre !

‒ Si vous m'envoyez en prison ou si vous souhaitez m'éliminer, je révèlerai tout au grand public, dit-elle, surprise par sa propre audace. A vous de choisir.

Sur ces paroles, elle se retourna et sortit du bureau, la tête haute.

Le brasier des étoiles [EN RÉÉCRITURE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant