Chapitre 14 : la cave de Kaï (non corrigé)

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A la demande de Kaï, le Roi Astrellien nous autorisa une retraite d'une heure environ dans le manoir de la vieille Tortue. Ce dernier avait tenu, malgré mes objections, à m'accompagner jusque dans la maison pour m'aider à rassembler mes affaires et préparer le lourd voyage qui s'amoncelait.

Nous passâmes le seuil de la porte d'un pas lourd et fatigué ; mais lorsque je voulus me diriger vers l'escalier afin de me précipiter dans ma chambre, Kaï m'attrapa le bras :

-Non, pas par là. J'ai quelque chose à te montrer.

Interdit, je le laissai m'entraîner dans ce même couloir où je l'avais surpris à chanter. Le silence se tassa, tandis que je me retenais de glisser un regard dans la chambre du Roi. Il vira à droite, dédaigna une clef et déverrouilla une porte, qu'il poussa pour dévoiler un escalier souterrain. Stupéfait, je le suivis dans la pénombre en plissant les yeux pour éviter de manquer une marche. La porte se referma derrière moi et le vieux Roi gratta une allumette au dessus d'une vieille lampe à huile. Un sourcil arqué, je me retins de lui demander où les avait-il trouvés. Ou bien les avait-il gardés dans sa poche tout le long ?!

-Où va-t-on ? maugréai-je plutôt, quelque peu amère de ne pouvoir préparer mes affaires pour partir au plus vite.

-Tu le sauras très vite, fit-il simplement.

Il leva la chandelle à la hauteur de ses yeux et je vis qu'un sourire hilare était accroché à ses lèvres. Je me renfrognai davantage ; il semblait amusé de mon impatience, et cela ne me plaisait guère.

Nous dévalâmes prudemment les marches quelques secondes durant, avant de se stopper enfin sur une surface qui semblait plane. Kaï déposa la lampe sur une étagère poussiéreuse, ouvrit une petite porte de métal et plongea les mains au milieu des fils et des boutons. La seconde d'après, le grésillement des LED en activité se fit entendre et la pièce fut entièrement éclairée.

Je battis des paupières, une grimace au visage, aveuglé par cette lumière soudaine.

Cependant, lorsque ma vision devint enfin nette, mes yeux s'écarquillèrent de surprise : j'avais devant moi une salle immense ! Le coin au fond gauche était rayée de bibliothèques pleines à craquer, tandis que celui de droite était occupé par un bureau couvert de paperasse, au dessus duquel cartes et croquis de paysages s'étendaient par dizaine. Devant ce dernier, on avait disposé des fauteuils et des canapés vêtus de couvertures de velours, qui faisaient face à une petite scène sur laquelle reposait un vieux micro poussiéreux. Enfin, juste face à nous, une grande table de bois entreposait un bazar considérable. Les chaises qui l'encadraient étaient disposées de manière irrégulière, tandis qu'une épaisse lampe suspendue les éclairait de son éclatante lumière jaune.

-Mais où sommes-nous... ? soufflai-je, ébahi, tout agacement oublié.

-Dans la cave.

Kaï m'accorda un regard amusé, les bras croisés, guettant ma réaction.

-Et pourquoi sommes-nous à la cave, Kaï ? m'exaspérai-je.

Il se contenta de s'avancer jusqu'aux bibliothèques, qu'il contempla quelques secondes, les mains sur les hanches.

-Essaie de ne pas l'incendier, celle-ci, fit-il alors qu'il commençait à chercher à travers les rayons.

Je levai les yeux au ciel ; par moment, il me rappelait George et Jeane et leurs blagues agaçantes. Nul besoin de me rappeler que j'avais accidentellement mis le feu à l'ensemble de la bibliothèque d'Enohria, alors qu'elle était toujours debout.

-Mon Dragon était le seul responsable, grommelai-je, les dents serrées.

Ce souvenir que j'avais vainement tenté d'oublier venait de ressurgir, comme si l'incident datait seulement d'hier. Et pourtant, c'était il y a un an, songeai-je, surpris.

-Là ! s'exclama soudainement Kaï, tirant des étagères trois livres couverts de poussière. Je savais bien qu'ils n'étaient pas à Enohria...

Il me jeta un regard moqueur et je lui tirai la langue, agacé. Il ne s'arrêterait donc jamais. Comme George et Jeane...

Le vieux Roi déposa les épais manuscrits sur la table et souffla sur leur couverture pour qu'on puisse mieux y décerner les titres. Je m'approchai pour me pencher sur les livres à ses côtés, plissai les yeux et lus :

-Sortilèges d'Ancienne Magie, Dictionnaire de Runes Anciennes et Glossaire de l'Ancienne Magie.

-Je voudrai t'en faire cadeau, expliqua Kaï devant ma mine déconfite.

-Je n'ai pas besoin d'apprendre l'Ancienne Magie, rétorquai-je tout en m'asseyant sur l'une des chaises.

Mais le vieux Roi arqua un sourcil :

-Comment le sais-tu ?

-Je n'aurais pas besoin de l'Ancienne Magie sur Enohr, insistai-je, véritablement agacé de l'avoir suivi uniquement pour découvrir trois bouquins vieux comme le monde.

Il eut un long soupire, puis poussa ses manuscrits sous mon nez :

-Je tiens vraiment à ce que tu les prennes, tu sais. Feuillette les un peu, au moins.

Je lui décrochai un regard assassin avant de me redresser sur mon dossier. Il s'assit à son tour et m'observa tourner les vieilles pages du premier, Glossaire de l'Ancienne Magie. Je plissai les yeux, concentré sur les petites lettres qui glissaient avec les gros titres qui défilaient sans que je n'y prête une attention particulière. A vrai dire, même s'il m'était difficile de le reconnaître, j'espérai au fond de moi trouver deux choses particulières 

Puis, lorsque le gros titre "Les Elus des Prophéties" paru face à moi, j'arrêtai ma main. Je jetai un bref coup d'œil à Kaï, qui m'invita d'un regard à lire. Quelque peu hésitant, je me sentis déglutir ; j'avais soudain comme peur de découvrir ce qui était écrit. Je suis un Elu, me rappelai-je, la gorge nouée. Je pourrais découvrir n'importe quoi qui me mettrait davantage dans une mauvaise situation.

-Comme chacun le sait, commençai-je d'une voix que je n'espérai pas trop tremblante, les mots que nous utilisons aujourd'hui sont dérivés de la Première Langue, appelée Rune. Le terme "Elu" descend de "Erù", qui se traduirait directement par "Esclave". L'Elu d'une Prophétie, dès lors qu'il est choisit, ne peut rompre le lien sacré qui le lit lui et le destin auquel il est voué. l'Elu est alors Esclave de la Force Mère -voir page 4-, et qu'importe si c'est au prix de sa mort ou celle de ses proches, accomplira sa destinée.

Je stoppai ma lecture. J'en avais déjà trop lu.

Les Mondes d'Enohr ; les Secrets de Kaï -Tome 3 Cycle 1 / Terminée /Où les histoires vivent. Découvrez maintenant