Chapitre 9

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Le rendez-vous avec le Docteur Galilei approchait, et une tension palpable enveloppait la salle de réunion où notre équipe d'exploration patientait. Mon regard insistant était rivé sur Nina, notre intermédiaire avec le Docteur Maxwell, alors qu'elle venait tout juste de pénétrer dans la pièce,captant instantanément mon attention. 

Sophia, assise à côté de moi, poussa un soupir d’exaspération évidente. "Bon, il y a un problème avec notre mission, en dehors du fait de ne pas nous laisser de vacances, pour avoir un rendez-vous d’urgence avec le porte-parole privilégié du grand patron."

Le docteur Galilei rougit légèrement, avant de nous énoncer les interrogations farfelues de Maxwell. Il voulait savoir combien de temps a duré notre “étrange mélancolie”, depuis quand le bougre s'intéresse-t-il à nos états d’âme ? Il nous demandait aussi, si nous ne trouvions pas ça bizarre de n’être que deux alors que toutes les équipes sont initialement constituées de trois personnes. J’ai échangé quelques regards perplexes avec Sophia, qui ne semblait pas plus avancée que moi sur la compréhension des pensées de Maxwell.

Quoique qu’il en soit, seul Sophia a pu sortir de son état d'hébétude face à ces questions loufoques :”Il est tombé sur la tête ou quoi ? C’est lui qui valide la constitution des équipes d’exploration. C’est à lui de se poser la question pas à nous. Ça nous aurait bien simplifié la vie si on avait été trois pendant les missions, croyez-moi.”

A y regarder de plus près, il était évident que Nina était aussi dubitative que nous.

Je repris donc là où Sophia s’était arrêtée : “C’est quoi l’objectif de toutes ces questions, il ne fait jamais rien par hasard. As-t-on des raisons de s’inquiéter de sa santé mentale, qui pourrait mettre en péril nos vies. Ou aurait-il enfin découvert l’existence d’autres personnes que lui dans ce monde ?”

Elle sembla hésiter, un conflit intérieur pouvait se lire dans son regard. "Je ne peux pas croire que le Docteur Maxwell puisse perdre le contrôle de la situation, et encore moins de lui-même. Certes ces interrogations sont déconcertantes, mais je pourrais mettre ma main à couper qu’il y a une raison valable à ça, bien que cela m’échappe."

Si Nina s’inquiétait, au point de se sentir obligée de justifier les actes de Maxwell, c’est qu’il y avait autre chose, quelque chose d'anormal et inquiétant, même pour les normes de Maxwell.

“Que se passe-t-il exactement ?” demanda Sophia, confuse.

Elle avait l’air de prendre une décision difficile “Il…” Elle s’interrompit en soufflant, je n’ai pas vu exactement ce qu’elle a fait, mais je crois qu’elle a dû désactiver le système de surveillance. Je ne veux pas l’interrompre mais s’il nous espionnait, il doit maintenant savoir qu’elle va tout révéler, enfin tout dépend de son état actuel. ”Depuis qu’il a appris que vous étiez rentrés de mission, il agit bizarrement, encore plus que d’habitude je veux dire. Il s’enferme dans son bureau et s’assoit à même le sol pour parler tout seul. Puis il se lève, tourne en rond, et recommence pendant des heures. Il n’est pas sorti, n’a pas dormi, et n’a rien mangé depuis non plus.

- Vous n’allez tout de même pas nous faire croire qu’il se fait du souci pour nous quand même ?

- Non, je ne pense pas, ajouta-t-elle en souriant, je l’ai entendu marmonner qu’il y aurait toujours assez de volontaires prêts à se sacrifier. Mais cette porte l’obsède. Elle a quelque chose de particulier, pour lui. Pas de créature à l’intérieur, et pourtant il a déclenché une mesure d’alerte pour aller la fouiller. Et d’après l’historique, il l’a fait quatre fois de suite tout au long de la journée, sans demander aucune intervention. Je ne sais pas si c’est cette porte qui a vraiment quelque chose de spécial ou…

- Ou si il a complètement perdu les pédales, et qu’ils ne se souvient même plus de ce qu’il fait”, ne pus s’empêcher de compléter ma chère acolyte.

Nina acquiesça, il était évident qu’elle se sentait mal, et pas seulement pour elle-même à cause de ce qu’elle qualifierait de trahison, mais à cause de Maxwell. Je crois qu’elle lui donne beaucoup trop de crédit. Je ne peux pas nier que c’est un scientifique de génie, mais à mes yeux, il reste un savant fou qui joue avec la vie d’autrui. 

“ Alors ça fait du bien de vider son sac.”

Se pose maintenant la question cruciale de déterminer comment nous allons exploiter ces informations de manière efficace. Savoir Maxwell cinglé, n’est pas une nouveauté, qu’il serait prêt à nous sacrifier pour une lubie, non plus. A l’heure actuelle, tout ce que je sais, c’est que celui qui en sait le plus sur toute cette histoire, c’est Maxwell lui-même.

Je senti que c'était le moment adéquat pour briser le silence oppressant qui remplissait la pièce : "Docteur, ne pensez-vous pas qu’il faudrait peut-être fouiller son bureau ? Il nous cache beaucoup de choses, depuis longtemps, et je préférerais vivre, si vous me le permettez."

Nina, visiblement mal à l'aise, glissa "Je comprends vos motivations, mais je n'aime pas l'idée que quelqu’un fouille son espace personnel, c’est extrêmement intrusif, je ne sais pas si ses secrets en valent vraiment la peine"

Sophia qui se contenait jusque là, répliqua les bras croisés et les joues en feu : ”Ecoutez, je sais que c’est votre patron et tout, mais vous venez de nous dire que ce type est prêt à laisser des gens mourir dans l’objectif de trouver des choses qui ne sont peut-être que dans sa tête. Je veux bien croire que votre loyauté soit sans limite, mais s’il vous plaît garder votre bon sens”

Dans le tumulte de la conversation, Nina semblait aussi tiraillée entre sa droiture et sa raison, que sa blouse blanche était impeccablement repassée. “Bien, je vous laisserai accéder à son bureau quelques instants, ne m’en demandez pas plus.”

Sur ces belles paroles, elle quitta la pièce, nous invitant à la suivre.

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