Prologue: Médée

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Le geste aussi innocent et simple d'une brosse passant dans vos cheveux une bonne centaine de fois avait toujours eu  cette sensation de poser un baume sur mon âme. Magda se trouvait être la seule à qui je permettais cela, même Sebastian n'a jamais pu le faire. Il faut dire que je pouvais être quelque peu tatillon voire maniaque. Après tout 100 et 101 ce n'est pas la même chose. Surtout pour cette soirée unique, tout doit être absolument parfait. Du chignon aux boucles tombantes style anglaise, à la parure de diamants qui sublime le col de ma robe de soi noir qui découvrait mes épaules avant de tomber en dos nus. Chaque détail avait été étudié pour cet instant précis. Une dernière touche de rouge à lèvres sur mes lèvres carmin que m'applique Magda avant que Sebastian prenne le relais. Une paire de talons à la semelle rouge et un masque de dentelle pour cette mascarade. Sa main se présenta pour saisir la mienne avec élégance me relevant pour inspecter leur œuvre. Mon regard scruta chaque petit centimètre de mon corps visible dans l'immense miroir à ma gauche.

— Que le spectacle commence, déclarais-je ne pouvant m'empêcher de laisser un petit sourire de satisfaction émergée au coin de mes lèvres

Le champagne coulait comme des cascades de fontaine créées spécialement pour l'occasion. Les lumières tamisées donnent à la salle de réception une allure intime de boudoir, c'était après tout le désir de père que cette mascarade soit l'instant où leur hypocrisie tomberait cachée derrière leur masque. Personne ne savait qui j'étais, leurs langues se délient à l'aide de l'alcool sous la forme de murmure auquel je tendais l'oreille pour en découvrir toutes les subtilités. Déjà enfant je ne pouvais m'empêcher d'écouter aux portes, d'espionner chaque conversation traînante à mon ouïe. Le savoir est signe de pouvoir, c'est donc par évidence pour moi que même le plus infime des secrets devait m'appartenir.
Me faufilant à travers les invités sous le regard appuyé de Sebastian et des deux jumeaux que j'appelle affectueusement tweedle dee et tweedle dum puisqu'il avait tout bonnement refusé de me dire leur véritable nom. Cela doit leur coûter de ne pas pouvoir être à quelques pas de moi, ma sécurité est leur priorité voir même leur raison d'exister pour mon père. Mais bien avant la réception, j'avais informé que je ne voulais pas qu'on découvre qui j'étais jusqu'à la tombée des masques. Pas avant que je LES ai vues. Des semaines à étudier leur dossier de long en large et en travers, décryptant chaque information comme si elle ouvrait le coffre-fort de leur âme. Malheureusement ces informations n'étaient que superflues pour mon projet.
Savourant encore un peu d'espionnage indiscret avant de me mettre à leur recherche. J'avais déjà énuméré dans mon esprit les lieux les plus propices où je pourrais les voir.  Cependant le destin décida de faire les choses autrement quand les yeux vert onyx de l'une de mes cibles croisèrent les miens avant de se diriger vers l'une des salles d'eau. Piqué par ma curiosité maladive, mon corps se mouvait en sa direction, suivant sa démarche rapide suivie par une carrure massive qu'elle tira avec elle dans la pièce avant de la refermer sur eux. J'aurais pu très bien chercher les autres mais cela n'aurait pas été logique envers moi même. Vérifiant que la porte n'était pas verrouillée avant d'ouvrir délicatement. Les deux déjà en pleines affaires les lèvres de l'homme trainant sur la gorge du cygne noir. Ses talents d'actrice dupent cet amateur. Il était clair qu'elle n'aimait pas une seule seconde avoir ses mains ou quoi que ce soit d'autre de lui sur elle, le faisant uniquement dans le but de provoquer son père et par la même occasion de fissurer cette image de petite princesse qu'il lui avait imposée. Son masque de plume noir faisait ressortir le vert transcendant de ses yeux, ses même yeux qui venaient de rencontrer les miens. Pas du tout intimidé par le regard noir qu'elle me lança, au contraire cela m'amusa de voir qu'elle avait remarqué ma présence. Cependant le spectacle avait perdu tout intérêt à mes yeux alors d'un sourire taquin je refermai la porte pour la laisser à sa performance. La reine venait de chanter pour sa toute première apparition, son rôle fidèle à l'image que je lui avait donné.
La démarche assurée, je continue ma quête jusqu'au bar où il est plus que probable que j'y trouverais au moins deux des autres personnages. L'un aime l'enivrement de l'eau de vie pendant que l'autre appréciait d'être sous les projecteurs. Devant l'attroupement féminin à l'un des coins du bar je compris immédiatement où trouver le soldat et le prince. Faisant semblant d'être venue quérir un verre, je me positionnais à une distance suffisante pour entendre mais assez éloigné pour ne pas attirer leur attention. Tandis que le prince divertissait les dames les rendant accros, le soldat enchaînait les verres en plotant sans discrétion l'une d'elles qui se languissait de son toucher. Elle aurait pu mourir s'il ne posait pas les mains sur elle immédiatement. Les yeux vitreux d'avoir trop bu il aurait pu lui sauter dessus devant la foule sans aucun remord cependant les regard que lui lancer son ami le retenaient sachant pertinemment qu'il se ferait gronder si il dépassait les limites du maniaque du contrôle au visage d'ange. Si je l'avais surnommé le prince c'est bien pour une raison, son visage à la beauté presque surréaliste pouvait charmer n'importe qui, néanmoins son besoin de contrôler, de diriger chaque être qui croise son chemin se cacher derrière son masque de gentlemen. Une obsession que je devais lui accorder, en souffrant moi aussi. À l'inverse, son ami avait un charme tout aussi puissant mais plus sensuel voire brut, ne cherchant pas à se cacher derrière un masque. Ses émotions étaient toujours à l'intensité la plus élevée, ce caractère sans demi-mesure était à la fois aussi détestable que fascinant. Je voyais qu'il tentait de cacher son agacement avec l'alcool, la couleur ambrée de son verre me laissant penser que sa préférence était au Bourbon ou au whiskey des alcools pur et brut tout comme lui.
Remerciant le barman pour sa préparation, je continuais ma quête pour me diriger vers le patio, plus silencieux, plus caché. Mes deux dernières cibles n'étaient pas des plus loquaces, ni très avare de la lumière.
Le froid de fin de soirée me fit frissonner même si j'imaginé bien les deux jumeaux en sueur de me voir autant à découvert. Le feu piquant du nectar glissant dans ma gorge me permit de me réchauffer au point de faire rosir mes joues. À mon grand désarroi mes capacités pour ce qui concerne la boisson sont très limitées, j'évite donc d'en abuser.
Les mélodies étouffées d'un piano guidèrent mes mouvements vers l'une des fontaines se cachant derrière une rangée de buissons. Un endroit de choix pour une petite souris telle que moi. Allongés sur le rebord en marbres blanc, les deux écouteurs gréffé à ses oreilles, un sons qui rythmé ses doigts tapotant sur sa cuisse. À ses côtés reposé, assis, un livre à la main, le visage impassible absorbé dans sa lecture qui semble ne lui procurer aucun sentiments. Me laissant enfin entrevoir le troubadour et le bourreau, mes deux derniers joueurs. Si leur portait m'avait offert un aperçu plaisant de leur minois je dois avoué qu'en personne je ne peux que trouver leur image fade face à la réalité.
Satisfaite de mes observations, je m'apprêtais à quitter les lieux quand je sentis un souffle contre mon oreille.

— Je peux vous aidez, Milady ?  Susurra une voix à mon oreille

Acte 1 : pour la main de Médée ( reverse harem )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant