Chapitre 2: Médée

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Pdv: Médée

Depuis aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours eu des obsessions, des tocs. Des textures qui pouvaient me paralyser d'horreur, des réflexes qui provoqués  une démangeaison nerveuse à rendre fou. Par exemple, la sensation du sable sous la peau provoque en moi une forme de saleté me poussant à prendre une douche avant de me plonger dans un bain pour être sûr de ne plus avoir un seul grain de sable collé à mon épiderme. Et cela n'est que l'un des points de la longue liste de mes étranges habitudes, voilà pourquoi Sebastian et Magda étaient les seuls à pouvoir choisir mes vêtements, mes plats et tout ce qui peut être susceptible de me rendre folle. 

Alors quand "Mimi" s'est mise en tête de m'habiller ce matin, j'ai retenu un couinement de mécontentement. La voir farfouiller mon dressing à la recherche de la tenue idéale pour ma "rencontre" officielle cette fois-ci avec eux était sûrement aussi insoutenable que le sable glissant sous mes ongles. Mirabel surnommée affectueusement Mimi, possède ce fameux superpouvoir sur les gens qui les poussent à l'aimer si fort qu'on en oubliait nos propres désirs. Mais si cette dernière possède des qualités essentielles pour se tenir à mes côtés, son penchant pour le désordre lui n'avait pas sa place dans mon espace vital.

Maintenant fermement mon pendentif dans mon poing pour essayer de ne pas lui hurler dessus depuis maintenant presque 23 minutes et 54 secondes. Pourquoi Magda lui avait laissé la tâche de m'apprêter ?

— Vous devez être aussi adorable qu'un tournesol aujourd'hui ! s'exclama avec enthousiasme cette dernière en jetant au sol des vêtements qu'elle ne trouvait pas à son goût.

— Un tournesol, c'est jaune, tu sais, ne pus-je m'empêcher de lui préciser alors qu'elle sait pertinemment que j'ai un besoin d'associer chaque mot à une idée, par conséquent maintenant, il lui fallait impérativement m'habiller de jaune ou sinon je risquais de cogiter toute la journée.

— C'est une métaphore, je ne vais pas vous déguiser en fleur, plaisanta-t-elle, ne prenant pas du tout compte de ma remarque.

— J'ai de superbes robes jaunes dans l'armoire numéro trois du côté gauche, continuais-je en tirant mécaniquement sur le pendentif que je ne retirais jamais.

— Pas besoin de cette couleur pour que vous soyez rayonnante, son sourire si doux m'empêchait de me comporter comme une petite peste avec elle.

— Peut-être, mais pas aussi brillante qu'un tournesol, appuyais-je sur le dernier mot dans l'espoir qu'elle comprenne mon besoin roulant sur mon épiderme comme une branche d'ortie.

Il faut croire que mes mots n'arrivent pas jusqu'à ses oreilles, car elle continue sa quête sans prendre en compte mes indices. Je pourrais très bien m'apprêter moi-même, mais je sais avec exactitude qu'elle se mettrait à pleurer à chaude larme d'avoir failli à sa mission. Préférant souffrir toute une journée entière que de devoir supporter ses crises émotionnelles démesurées, et puis le spectacle de la voir pleurer n'est pas non plus quelque chose d'agréable, au contraire.

C'est à ce moment-là que choisit Sebastian pour faire son apparition, sa montre à gousset dans la main. Le temps est un art que nous maîtrisons l'un comme l'autre. Un seul regard sur l'œuvre de Mimi eut le don de provoquer une contraction de la mâchoire chez le chef des majordomes. Cela doit être le seul tic d'expression que je lui connais. Finalement, il prit les choses en main dans un silence de plomb, réunissant chaque élément essentiel à mon costume jaune après avoir entendu cette dernière marmonner le mot tournesol. Il les tendit comme un robot.

— Vous avez précisément 10 minute et 33 seconde pour qu'elle soit prête, cela sonnait plus comme un ordre qu'une indication

Tournant les talons pour reprendre ses autres occupations. Me laissant avec une tornade émotionnelle reniflant pour s'empêcher de pleurer. Eh bien, il faut croire que je ne vais pas éviter la crise de larme aujourd'hui. Sortant un mouchoir de ma poche pour le lui tendre, une habitude nécessaire. 

Acte 1 : pour la main de Médée ( reverse harem )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant