Chapitre 13

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« La raison parle... », Pétrarque

Trop honteuse par mon comportement de la Soirée d'Appartement d'il y a une semaine, voilà sept jours que je n'ai pas quitté mes appartements, pour ne point affronter les autres nobles. Les seuls moments où je suis sortie, c'est pour assister au Grand Lever du Roi car je ne pouvais décemment pas m'absenter et cracher sur ce privilège. D'ailleurs, tous les jours, je me suis attendu à une convocation du souverain pour me parler de mon comportement inadmissible, mais celle-ci n'est jamais venue, à mon plus grand bonheur.
Seulement, aujourd'hui, quand Liselotte m'a proposé de la rejoindre chez elle pour passer du temps entre amies, je n'ai pas pu refuser. J'ai simplement... attendu que Robert s'absente pour quitter la seconde chambre où je dors toujours. C'est peut-être puérile d'agir ainsi, mais je n'ai toujours pas digéré et j'ignore si je vais en être capable prochainement.

— Vous préférez du vin ou bien du chocolat ? me demande la Princesse Palatine, toutes deux assises autour d'une table dans ses gigantesques appartements.

Ça a du bon d'être de la famille royale.
Je m'étouffe avec ma salive en entendant le mot vin puis lui envoie un regard équivoque qui l'a fait éclater de rire, ce qui me fait rougir.

— Par moment, vous n'êtes absolument pas drôle, Elisabeth-Charlotte, bougonné-je.

Mais bien sûr, cela la fait rire davantage.

— Pardonnez-moi, mais vous ivre, c'était vraiment très drôle, j'ai découvert une nouvelle facette de vous.
— Ne m'en parlez pas, j'ai beaucoup trop honte. Pas pour ma querelle avec Athénaïs, mais de m'être comportée ainsi devant le Roi. Ce n'était pas digne d'une dame noble.
— Oh, Louise, voyons, n'en faites pas tout un fromage ! Je comprends que ça puisse être embarrassant en y repensant, mais croyez-moi quand je vous dis que tout le monde l'a déjà oublié et que vous avez fait rire bon nombre de personnes. Le Roi y compris.

Je la regarde étrangement, comme si une deuxième tête avait soudainement poussé à côté de la première.

— Le Roi ? Non, non, vous vous méprenez, Liselotte, j'ai bien entendu à sa voix qu'il était très en colère.
— Oui, parce que c'est son rôle de Roi d'agir ainsi, mais croyez-moi, Louise, il était amusé par votre franc-parler en état d'ivresse.

Je ne réponds pas, ne sachant pas quoi en penser. Le Roi, amusé par mon comportement ? Bien que je ne vois pas pourquoi Liselotte me mentirait, j'ai du mal à y croire, cela me paraît totalement insensé.

— Je vous serre un verre de vin, donc ?
— Liselotte !

Elle rit de nouveau.

— Pardonnez-moi, ma chère, je n'ai pas pu m'en empêcher.
— Vous êtes une bien piètre amie.
— Mais non, vous m'adorez.

C'est à mon tour de pouffer.

— Cela est bien vrai, approuvé-je.

Liselotte me sert donc une tasse de chocolat encore fumant, puis j'attrape une petite gourmandise dans l'assiette qui trône au milieu de la table. Nous échangeons sur la semaine écoulée même si, pour ma part, je n'ai point grand chose à dire puisque, la plupart du temps, je n'ai fait que lire ou bien écrire à ma famille et à la gouvernante de mon fils, qui me manque atrocement. Je ressens toujours ce trou béant au cœur qui me fait mal chaque jour.

— Eh bien moi, j'ai eu connaissance d'une chose très intéressante, affirme-t-elle.
— Le contraire m'aurait étonné, vous êtes la reine des commérages, Liselotte. Qu'avez-vous appris, cette fois ?

Elle se penche au-dessus de la table, sa tasse à la main, comme si ce qu'elle allait me dire était d'une extrême importance.

— Connaissez-vous l'affaire de l'homme au masque de fer, ma chère Louise ?

Vices à Versailles - Prequel : Un geste de vousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant