« L'amour est donné pour aimer ce qu'il y a de meilleur », Bossuet
— Je crains devoir vous laisser, Liselotte, le Roi m'a convié à sa promenade, annoncé-je en posant ma tasse vide sur la table.
— Eh bien, vous devriez lui tourner le dos plus souvent, me taquine-t-elle avec un clin d'œil.J'éclate de rire face à se remarque et rougit soudain quand je revis le moment intime que j'ai vécu avec le Roi. Seigneur, c'était si intense ! J'en ai des bouffées de chaleur rien qu'en y repensant.
— Vous pourriez venir avec moi, suggéré-je, n'ayant aucune envie de quitter mon amie, tout comme je me refuse de ne pas honorer l'invitation du Roi.
— Il ne m'a point invité.Je lève les yeux au ciel.
— Je vous en prie, Liselotte, pas à moi ! Toutes les deux savons très bien que vous êtes sa belle-sœur et qu'il vous adore, il n'y verrait pas d'inconvénient.
Elle me jauge étrangement du regard avant de me sourire.
— Vous avez raison.
Nous nous levons de concert, mais au moment de sortir de ses appartements, nous tombons sur son époux, Philippe d'Orléans.
— Oh, bonjour Marquise, me salue-t-il.
— Bonjour, Votre Altesse.
— Je vous en prie, appelez-moi Philippe, vous êtes amie avec ma femme depuis des lustres. Où allez-vous, au fait ?
— En promenade dans les jardins, lui confie son épouse.
— Hmmm.... Eh bien, bonne après-midi, mesdames.Sur ce, il se retire aussi vite qu'il est apparu. La Princesse et moi échangeons un regard puis sortons en direction des jardins. Au niveau des parterres d'eau, nous tombons sur le Roi et quelques personnes. Parmi elles, sans aucun doute, la Marquise de Montespan, ainsi que quelques autres dames de sa cour. Menant la marche avec lui et sa Favorite — j'ignore superbement l'éclair de jalousie qui me traverse —, un homme que je crois reconnaître comme son architecte.
— Ah, Marquise d'Anjou, me salue le Roi en me voyant arrivée.
Je lui fais une révérence.
— Je vous prie de m'excuser pour mon retard, Sire, nous avons discuté avec Son Altesse et nous n'avons pas vu l'heure.
Il m'adresse un discret sourire puis nous commençons la promenade. À seulement quelques pas derrière lui, nous l'écoutons attentivement parler des aménagements qu'il a prévu pour ses jardins et dont il a confié la conception au talentueux André Le Nôtre.
— Voyez comme Athénaïs se pavane à son bras, grommelé-je, les yeux fixés sur elle. Pourquoi se sent-elle toujours obligée d'en faire trop uniquement pour qu'on la remarque.
— Parce qu'il s'agit d'Athénaïs, ma chère, me répond Liselotte, un bras sous le mien. C'est son caractère, il en sera toujours ainsi la concernant.
— Mais que le Roi lui trouve-t-il, franchement ? Elle est sans conteste l'une des plus belles femmes de cette cour, mais son comportement est à revoir.Mon amie s'arrête net, m'obligeant moi aussi à faire de même. Elle m'observe de longues secondes avec un regard que je ne saisis pas.
— Vous êtes bien bougonne, tout à coup, Louise. Cela change de votre humeur joviale quand vous êtes venus me retrouver.
— C'est la présence de cette femme qui m'horripile, me justifié-je.
— Oui, cela je n'en doute pas, pourtant... je parie le Palatinat qu'il y a quelque chose d'autre.Ma respiration s'ébranle. Pourquoi faut-il qu'elle soit toujours si perspicace ?
— Et quel serait cette autre chose ? l'interrogé-je.
— Eh bien justement, cela, c'est à vous de me le dire, Louise.
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Vices à Versailles - Prequel : Un geste de vous
Romance1674. La jeune Louise Brailly s'apprête à épouser Robert Drouart, Marquis d'Anjou, un homme choisi par son père. Malheureuse, elle sait très bien qu'elle ne trouvera jamais l'amour et le bonheur dans les bras de son époux qu'elle tolère tout juste...