Chapitre 26

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Pdv Evie :

Je réussis au dernier moment à m'agripper au rebord de la fenêtre. Janson, toujours accroché à moi (à ma taille, cette fois), n'était clairement pas décidé à mourir. Il tentait maintenant de remonter, tout en essayant de me faire tomber. Il avait de la force, certainement plus que moi. Ses ongles griffaient ma peau, ses mains me poussaient vers le bas, tandis que je me débattais pour essayer de le déloger. L'espace d'un instant, je croisai son regard, et je compris à la lueur démoniaque qu'il y avait dans ses yeux que, s'il ne pouvait pas survivre, alors il ferait tout pour m'entraîner avec lui dans les ténèbres éternelles.

Une fois, alors que je venais de découvrir l'horreur de la Terre Brûlée, je souviens avoir pensé que nous étions comme des anges dans ce monde de fantômes. À présent, je ne savais pas si j'étais moi-même ange ou démon. Sûrement un peu des deux. Mais là, ce que je voyais dans les yeux de l'homme que j'étais en train de combattre, c'était le diable en personne.

Un être que je devais détruire, pour mon bien, celui de mes proches et celui de chaque être qu'il ferait encore souffrir en vivant plus longtemps. Là, il ne s'agissait plus uniquement de vengeance. Il s'agissait de survivre et de protéger ceux qui comptaient à mes yeux. Car cet homme n'arrêterait jamais de faire du mal autour de lui.

L'air triomphant, il me prit par la gorge, me claquant la tête contre le mur. Des points noirs dansèrent devant mes yeux.

"C'en est fini de toi, Evie. Un dernier mot ?"

À travers l'océan de pensées chaotiques qui déferlait dans mon esprit, un souvenir perça l'obscurité, et j'eus une illumination. Les mouvements que j'avais appris durant mon entraînement au Bras Droit me revinrent en tête, ainsi que la phrase qui avait marqué chaque séance :

"Oui, une question : Que dit-on à la mort ?"

Il me regarda sans comprendre, et je répondis :

"On lui dit : pas aujourd'hui !"

Sur ces mots, je libérai l'un de mes bras et assénai à Janson un énorme coup de coude dans la trachée. Il émit un râle sourd et, cherchant son air, il lâcha ma gorge pour porter la main à la sienne.

"Désolée pour ta gorge. J'imagine que ça va être dur de dire tes derniers mots, maintenant."

Janson ne répondit que par un gémissement étranglé.

C'était le moment. Puisant dans mes dernières forces, je me cabrai en avant et envoyai mes pieds dans le torse de Janson. Il lâcha enfin prise, et tomba dans le vide. Dans sa chute, il me sembla l'entendre murmurer le prénom de ma mère.

Entraînée par mon geste, je tombai moi aussi, mais au lieu de m'écraser au sol, je fus attrapée par deux paires de bras, qui me remontèrent. Lorsque je fus en haut, Thomas et Teresa s'empressèrent de vérifier comment j'allais, inquiets.

Je me sentais bizarre, comme détachée de mon propre corps. Un peu comme si j'étais en pilote automatique. Presque machinalement, je m'approchai de l'immense fenêtre et regardai en bas.

Je ne voyais pas grand chose, mais j'arrivai à distinguer une silhouette qui gisait au sol, une mare de sang s'écoulant de sa tête.

Janson.

Il était bel et bien mort, cette fois.

Thomas suivit mon regard et me prit dans ses bras.

"C'est fini, Vi. C'est terminé. Il ne te fera plus jamais souffrir."

Oui, c'était terminé. Plus jamais Janson ne ferait de mal à qui que ce soit.

Il avait dit, le soir de l'attaque du Bras Droit, que son amour pour ma mère l'avait consumé. C'était la vérité. Mais l'amour qu'il éprouvait pour elle s'était transformé en haine contre le monde entier, en un feu dévastateur, un poison qui avait rongé pour faire de lui le monstre qu'il était devenu. Un être méprisable et seul, dont même la solitude avait fini par ne plus vouloir.

Mon immortelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant