Chapitre 14

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Pdv Emma

Le contraste entre le visage satisfait de Tom, et les traits tirés de Matthew est saisissant. J'ai l'impression de me retrouver bloquée dans une bulle, loin de l'atmosphère douce et légère de cette journée. Mes pensées tentent de se concentrer sur le contrôle de soi pour ne pas sombrer dans une panique sourde en comprenant la signification des dernières paroles de Tom.
Mon corps bat tout de même en retraite en reculant d'un pas. Mon geste attire l'attention des deux hommes qui se tournent maintenant vers moi. J'ai beau vouloir garder une expression neutre, le fait que mon collègue de travail et mon voisin sont des ex-taulards me paralyse.
Ce n'est pas tant le fait qu'ils aient fait de la prison, bien que je sois curieuse de savoir ce qu'à pu faire Matthew pour atterrir la bas. Mais c'est surtout que potentiellement ils puissent connaitre mon père.
C'est assez loufoque comme idée mais ceux qui en voulaient à Tom la dernière fois connaissaient mon nom.

- Je vous laisse à vos retrouvailles, bonne journée !

Sans attendre de réponse de leur part, je m'éloigne rapidement jusqu'au petit buffet où trône toutes les patisseries préparées pour l'occasion. Alors que je prends une part de brownie, Lucas arrive à mes côtés avec un air inquiet malgré son sourire.

- Matthew n'est pas comme Tom !

- OK.

- Non mais je veux dire, que parfois la vie fait mal les choses, Emma.

Je ne comprends pas pourquoi il vient me dire ça avec un air aussi grave. Je n'ai rien dit et nous ne sommes que voisins. J'allais le rassurer sur le fait que ce n'est pas vraiment mon problème quand une petite main vient se glisser dans la mienne. Manuela tire sur mon bras pour que je la suive vers le stand du photobooth.
Tout à l'heure, lorsque je suis allée la voir dans son coin, mon coeur s'est brisé en apercevant cette tristesse infini qui semble malheureusement nous coller à la peau, lorsque la vie nous assomme de sa violence dès notre plus jeune âge.

- Tiens, tu mets le chapeau et moi les lunettes, pour prendre la photo, Emma ?

Je ne suis pas particulièrement fan des photos mais voir son visage s'illuminer en me tendant le chapeau de paille, me fait craquer. Elle se positionne sur mes genoux, cherchant mon contact à tout prix. Lorsque la photo sort en deux exemplaires, Manuela enlève ses lunettes, laissant entrevoir des yeux légèrement rougit.

- Qu'est-ce qu'il y a poussinette ? Tu ne l'aimes pas, on peut la refaire si tu veux.

- Oh non, je l'aime trop beaucoup fort ! C'est juste que c'est la première photo où tout le monde sourit.

Mon attention se reporte sur la photo quelques instants ne comprenant pas vraiment sa phrase.

- Avec papa et maman, papa avait toujours la grosse ride entre les yeux et maman avec les yeux tout rouge.

Mon coeur se serre d'un coup, incapable de réprimer la tristesse qui m'envahi à l'entente de l'horreur exprimée avec des mots d'enfant. Cette injustice me rend malade, pourquoi certains doivent subir la violence de la vie dès leur plus jeune âge, alors qu'ils n'ont pas les armes pour lutter...

Ce constat fait chuter mon humeur dans un puit sans fin de pensées noircies de souvenirs qui ne veulent pas s'effacer.
Manuela repart après m'avoir fait un gros câlin me laissant seule face à moi-même. Je déteste quand c'est la terreur qui s'empare de moi, me faisant revivre sans relache chaque minutes de certaines journées...

J'aperçois au loin, Matthew, Lucas et Ellie en train de parler entre eux, bien que Matthew semble totalement perdu dans ses pensées. Pourtant, son regard s'accroche d'un coup au mien et alors qu'il esquisse un pas dans ma direction, mon corps entier prend la fuite pour rentrer chez moi. Tout se bouscule dans ma tête, cette journée ayant brassée beaucoup trop de souvenirs et d'émotions.

Sans finOù les histoires vivent. Découvrez maintenant