Chapitre Un

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CHAPITRE UN

Il y a deux ans
GIULIA, 18 ans

Je fixe mon reflet dans les immenses miroirs qui me font face, alors que la styliste s'occupe de retoucher le bas de ma robe. Ce vert sauge fait ressortir ma peau légèrement halée du reste du bronzage de cet été. L'excitation grimpe petit à petit à l'approche du gala. Gala pendant lequel, je deviendrai officiellement la cheffe du clan familial. Je ne devais pas devenir cheffe aussi tôt, seulement quelques semaines après mes 18 ans. Mais la vie a fait que papa et maman ont dû se retirer plus tôt que prévu. En parlant d'eux, je remarque l'arrivée de maman dans le reflet face à moi. Elle parait encore plus fatiguée qu'hier. Son visage porte encore les traces de l'embuscade dans laquelle ils sont tombés il y a quelques semaines.

_ Ça va, maman ? Tu as l'air fatiguée, m'inquiété-je en me tournant vers elle.
_ Est-ce une façon de dire à ta chère mère qu'elle a une sale gueule, demoiselle ?

La styliste retient un rire, mais maman la devance en riant. Elle s'approche, pour venir grimper sur l'estrade à mes côtés. Tout en m'observant dans le miroir, elle dépose un doux baiser sur ma tempe. Notre ressemblance est flagrante. J'ai toujours trouvé ma mère absolument magnifique. Ses cheveux noirs coupés au carrés, ainsi que ses yeux verts, la rendent aussi belle que quand elle était jeune.

_ Tu as mal dormi ? insisté-je.
_ Ton père a encore eu des douleurs fantômes, suivit d'une crise.

L'émotion est palpable dans sa voix. Je sais bien qu'elle souffre énormément de l'accident de papa, tout comme mon petit frère et moi. Nous avons cru perdre nos parents ce soir-là. Je me souviens encore de l'appel du meilleur ami de papa, complètement paniqué. La styliste s'éloigne, me confirmant d'un hochement de tête que les retouches sont enfin terminées.

_ Je vais me changer et aller le voir, dis-je en quittant l'estrade.
_ Bonne idée ma chérie, ça lui fera du bien.

Elle m'embrasse une seconde fois, avant de retourner vers la porte. Mais elle se ravise, et se tourne vers moi.

_ Cette robe est magnifique. Tu seras la plus belle à cette cérémonie. Ton père et moi sommes fiers de toi, mon ange, dit-elle en souriant.

Elle quitte la pièce sans me laisser le temps de lui répondre. Je fonce derrière le paravent, pour venir défaire prudemment la robe. Je revêtis mon pantalon de yoga et un large tee-shirt piqué à mon frère, avant de rejoindre au pas de course la chambre de papa et maman. Située au deuxième étage du manoir, dans l'ail Ouest. Cette aile comporte nos appartements privés. L'aile Est les appartements de chaque employé du manoir. Le premier étage, les chambres de certains de nos hommes ainsi que nos bras droits. Et enfin, au rez-de-chaussée, nos bureaux, salles de réunion, salle de réception et les cuisines. Le manoir est immense, un inconnu pourrait facilement s'y perdre. Mes parents l'ont acheté quand j'avais trois ans, quelques semaines après la naissance d'Andrea. C'était un nouveau départ pour notre famille, après la tragédie qui a coûté la vie à mon parrain et au cousin de papa. Et dans quelques jours, tout ça sera sous mon contrôle.

J'arrive devant la chambre de papa et maman. Tout à l'air silencieux à l'intérieur. Je toque trois coups, avant que la voix de papa ne m'autorise à entrer. Il est assis sur la terrasse de sa chambre, une cigarette à la main. Il regarde par-dessus son épaule, avant qu'un grand sourire n'illumine son visage. Andrea lui ressemble trait pour trait, ç'en est carrément flippant. Je m'approche de lui, pour venir m'asseoir sur le fauteuil à ses côtés. Et comme quand j'étais enfant, il éteint sa cigarette pour que je ne respire pas la fumée.

Power or love ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant