Chapitre 9

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1 semaine plus tard

Nael traversait le petit campement à grandes enjambées. Son carnet à la main, il souriait. Ici, à Bébé Poussin, on avait des choses bien plus importantes à faire que d'assurer la sécurité 24h sur 24. De ce fait, il pouvait sortir dans la jungle quand l'envie lui prenait. Et comme son emploi du temps du moment n'était pas à qualifier de surchargé, on le trouvait rarement dans l'enceinte protégée des petites tentes.

Bébé Poussin l'avait surpris dès le premier abord par sa simplicité. Il ne ressemblait en rien à son camp de base où tout était clair et net. Ici, il n'y avait pas d'allées définies, juste des espaces entre les tentes où l'on devait slalomer. Et ici, Nael n'avait pas l'impression de faire tache. Après le premier contact, les membres du camp l'avaient accueilli avec le sourire. Ils étaient ensuite retournés à leurs occupations sans se préoccuper de lui, et il avait apprécié cet anonymat. Il ne s'était senti ni exclu, ni différent.

De plus, pour son grand soulagement, Yann n'était resté que quelques heures, avant de retourner avec sa troupe de chasseurs à Karaté Kid, le temps de donner une dizaine d'ordres furieux, et de gueuler sur un peu tout le monde, faisant trembler de peur les uns et rougir de colère les autres.

L'heure de trajet à pied en compagnie du traqueur avait été interminable et pénible. Ils ne s'étaient pas parlé, et le silence de la jungle au fur et à mesure qu'ils avançaient rendait l'ambiance encore plus glauque et pesante. Nael avait eu l'impression que leur marche avait duré bien plus longtemps qu'une petite heure. Heureusement, cet homme qui le mettait intensément mal à l'aise avait cessé de le dévisager pour enfin partir.

Depuis, il se sentait mieux qu'il ne l'avait été depuis le début de ce voyage. Le responsable du camp était un homme sympathique à la figure joviale et bouffie qui répondait à ses questions naïves avec sérieux, sans l'ombre d'une moquerie pour son ignorance en matière de géolocalisation et de repérage sur carte. Il remarqua sa curiosité et sa soif d'apprendre, et lui apprit avec plaisir quelques éléments de base de son métier.

Il y avait ici aussi un petit groupe de traqueurs, pour leurs aptitudes à repérer les pistes des Arcadiens, et aussi pour servir de protecteurs sommaires du petit groupe de tentes. Ils se qualifiaient eux même de parias, parce qu'ils n'étaient ici que parce qu'on n'avait pas besoin d'eux sur Karaté Kid, le centre névralgique de cette expédition, où tous les traqueurs les plus compétents étaient envoyés pour capturer un des tigres de sang sous la direction de Yann. Mais les parias n'en avaient que faire : ils avaient expliqué à Nael qu'ils se sentaient plus eux même ici, où il n'y avait pas la pression d'être constamment le meilleur pour attirer l'attention du chef, et gagner une plus grosse paie. Le jeune homme avait immédiatement sympathisé avec la petite troupe, constituée très hétéroclitement de jeunes hommes, de femmes, et de vieux traqueurs bourrés d'expériences, placides et inoffensifs.

Il s'était particulièrement lié à un jeune traqueur, Kyle. À 16 ans il était le plus jeune de l'équipe, et s'il se faisait souvent charrier sur ça, il répliquait toujours avec le sourire qu'il n'y pouvait rien s'il était plus doué qu'eux pour avoir été engagé malgré son jeune âge. Nael avait été attiré par son caractère joyeux, et même s'il était plus jeune que lui, il lui semblait se retrouver un peu chez le garçon obligé d'évoluer dans un univers d'adulte, où l'on doit grandir vite en oubliant son enfance. Le garçon, malgré ses airs innocents et joyeux, était un redoutable chasseur. Il pouvait tuer un animal d'un seul coup de fusil à 100 mètres de distances, et avait des yeux de lynx quand il s'agissait de repérer des traces de passage d'un quelconque animal.

***

Nael était arrivé à la limite du petit camp. Il regarda autour de lui par reflexe avant de secouer la tête. De toute façon, tout le monde était au courant de ses escapades dans la forêt, et personne ici n'essayerait de l'en empêcher. C'était Kyle, le premier, qui s'était rendu compte que Nael ne respectait pas les règles de sécurité qui lui avait été données.

Lorsqu'un soir, il l'avait surpris en train de se cacher derrière un buisson pour ne pas se faire remarquer en train de s'esquiver, il avait secoué la tête d'un air amusé, puis il lui avait simplement donné un pistolet semi-automatique qu'il gardait dans un étui à sa ceinture. Devant l'incompréhension du jeune artiste, il avait levé les yeux au ciel, et avait entrepris de lui apprendre à tirer, en lui expliquant comme à un enfant qu'il fallait savoir se défendre.

Beau joueur, Nael avait accepté que le jeune chasseur lui apprenne comme se servir du Glock 6 mm qu'il lui avait donné. Depuis, il trimballait l'arme partout avec lui, particulièrement lorsqu'il s'aventurait seul sous les ramures des grands arbres. Et il devait reconnaître qu'il devait ainsi la vie à Kyle, car par 2 fois déjà, il avait failli mourir sans un réflexe désespéré de dégainer et de faire feu à temps.

La première, un énorme serpent lui avait sauté dessus, et l'aurait étranglé s'il ne lui avait pas tiré une balle dans la gueule.

La deuxième, il ne savait pas exactement quelle bestiole l'avait pris en chasse, et en tirant en l'air, il avait réussi à l'effrayer avant qu'elle ne lui saute dessus.

Il racontait volontiers la première anecdote, mais évitait soigneusement la deuxième, parce qu'à ce moment-là il avait sursauté tellement fort aux bruits de la forêt qu'il n'était même pas sûr que cette bête ait réellement existé. Et qui ne préfère pas être vu comme un héros que comme un trouillard ?

Toujours à l'aise dans la jungle, le jeune homme couvrait une distance de plus en plus grande autour du camp. Il découvrait de petits animaux exotiques qu'il n'avait jamais vu, des couleurs vives comme nulle part ailleurs, et lorsqu'à regret il était obligé de rentrer au campement, Kyle le retrouvait avec des étoiles dans les yeux. Et alors, le jeune traqueur souriait sans vraiment comprendre l'émerveillement de son ami, seulement en devinant qu'il était heureux.

Bientôt, dans l'équipe des parias, on le surnomma Robin des Bois à cause de son engouement pour les arbres et la forêt. Et sans vraiment se concerter aussi à cause de ses progrès incroyables pour le tir. Il était d'une précision que la plupart des gens mettaient des années à atteindre. Les autres naissaient avec, comme Kyle, et manifestement, comme Nael, et ceux-ci attiraient le respect.
Je sais je ne publie pas souvent, et si ça énerve certains, dite-le moi, ça me motivera. En attendant, je m'excuse d'avance parce que je n'y connaît absolument rien en armes, alors pour le Glock, si quelqu'un s'y connaît, n'hésitez pas à me renseigner, ça m'intéresserait beaucoup. Bisous et merci de me lire.

Wild CreatureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant