Chapitre 31

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Ça fait un peu trop longtemps que je n'ai pas publié moi... Cadeau! Amusez-vous bien!

- Peuple des Stylis, clama Shorvel, braquant ses yeux d'aveugle sur la foule rassemblée devant lui. Il se tenait sur un rocher comme sur une scène et surplombait de sa taille ses congénères, qui se regroupèrent autour de lui par groupes curieux, les uns accroupis sur les branches des grands arbres, les autres debout devant le rocher.
Derrière cette estrade naturelle, Nael observait la foule avec curiosité. Il ne parvenait pas à les dénombrer précisément : beaucoup se cachaient sous les épaisses ramures des grands arbres, et l'on ne devinait d'eux que l'ombre furtive de leurs passages et les murmures qu'ils échangeaient.
- Mes frères, poursuivit Shorvel. Notre Peuple se bat depuis des mois pour sa survie contre ces étrangers dangereux qui nous traquent. Nous cherchons désespérément la clé de notre salut, et la mission confiée à notre grande ayutoon, Anatyia  Quiss'Dan Naavi, est loin d'être achevée. Cependant, dans ces heures sombres, une lueur d'espoir s'est allumée dans nos cœurs. Une seule personne pourrait réussir là où tous les Stylis échoueraient. Et il s'est présenté à nous, dévoué à notre cause et prêt à tous les sacrifices pour sauver notre race de l'extinction, le cœur pur et vaillant ! Venu directement des rangs de nos ennemis, nous pouvons désormais l'appeler frère, le jeune Nael Darvin nous aidera à triompher des hommes kaki !
Et Shorvel, d'un signe de main, incita le jeune homme à monter le rejoindre sur le rocher, derrière lequel il était caché jusqu'à présent. Un peu intimidé par ce discours élogieux qu'il était sûr de ne pas mériter, et par la marée de regards qui le fixait à présent, il carra les épaules, et redressa la tête. Puis il gravit la pierre jusqu'au grand chef tout en essayant de paraître sérieux et digne, et si possible, de ne pas se ridiculiser en glissant lamentablement sur la roche glissante.
Un murmure curieux s'éleva de la clairière. Tous examinaient le jeune homme, ses habits étranges, sa mâchoire carrée et les drôles de peaux qui entouraient ses pieds. Pas de doutes, il faisait bien partie des envahisseurs. Sur les visages, les émotions se succédaient : peur, colère, incompréhension. Nael se dit que ce n'allait pas être une partie de plaisir de les convaincre qu'il ne leur voulait pas de mal. Il allait ouvrir la bouche pour commencer son plaidoyer quand il entendit un léger bruit de chute derrière lui. Il se retourna et resta bouche bée.
Anatyia se relevait gracieusement, et d'un geste léger, rejeta sa longue chevelure d'argent en arrière. Elle s'était changée, et avait troqué sa tenue habituelle, petit haut et short, contre une longue robe blanche toute simple, légèrement transparente et moulante, fendue tout le long de sa jambe gauche, qui soulignait ses courbes sensuelles.
Elle avait aussi rajouté de multiples plumes et perles dans les petites tresses qui parsemaient sa chevelure, créant des gouttes de couleurs dans les mèches. Autour de son cou, au moins une dizaine de colliers de perles et pendentifs s'étaient ajoutés au collier de la nuit, et tintaient doucement, tout comme les bracelets à ses poignets et à ses chevilles. Et comme si ses tatouages blancs ne suffisaient pas, elle avait peint des cercles et des traits bleus et dorés sur son visage et son corps (ce qui en était visible en tout cas).
Nael déduisit à son air solennel et à sa posture majestueuse qu'elle avait revêtue sa tenue officielle de Grande Prêtresse des Stylis.
- Ecoutez-moi, mes frères et sœurs, commença-t-elle d'une voix forte. Aujourd'hui est le commencement d'une collaboration, telle qu'il n'y en a pas eu depuis des décennies. Je vois bien dans vos yeux la méfiance et le doute, et vous avez raison ! Après tout, ses semblables nous traquent, et menacent de tous nous tuer !
« Euh non, pas vraiment, vous capturer, oui, mais vous tuer non ! En tout cas pas tous... »
Mais cela revenait peut-être au même. Ceux qui ne leur serviraient pas, il était sûr que Yann se ferait une joie de s'en occuper...
Anatyia continua en tournant la tête vers lui et en lui attrapant le bras :
- Il a donc été décidé, que pour montrer son attachement et son adoption au sein de notre Peuple, Nael Darvin portera désormais les tsîndales, les tatouages rituels des guerriers ! Puissent-ils lui rappeler le châtiment que nous réservons aux traîtres et aux menteurs, et guider sa quête pour notre survie !
Un tonnerre d'exclamations enthousiastes salua la fin du discours de l'ayutoon.
Mais Nael, beaucoup moins enthousiaste, luttait pour garder un visage impassible. Il se rapprocha de la jeune femme qui saluait la foule en souriant.
- Euh... Dis, ce n'était pas prévu ça ! Je ne devais pas me faire tatouer initialement ! chuchota-t-il.
- En fait, je viens juste de me dire que ce serait une bonne idée, lui répondit-elle sur le même ton. Tu dois gagner leur confiance, et le moyen le plus rapide c'est encore d'accepter la souffrance des guerriers. Je n'ai rien trouvé de mieux.
«  La souffrance ? Pardon ? »
Des images fugaces lui traversèrent l'esprit, toutes moins enviables les unes que les autres.
- Parce que... ces tatouages font mal ?
Ce n'était pas qu'il avait peur, juste un peu d'appréhension. La douleur lui était familière après tout, même s'il préférait l'oublier.
- Je t'expliquerais les détails dans mon arhéa. Ici, il y a trop d'oreilles.
Et elle descendit du rocher en trois bonds pour se diriger vers le plus gros des arbres de la clairière en lui faisant signe de la suivre.
Il déglutit pour déloger la boule qui s'était formée dans sa gorge, soupira, puis jetant un dernier coup d'œil au vieux chef qui se tenait toujours face à son public, il suivit sa belle indigène.

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