Chapitre 5: La gifle

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Après cette journée de merde où j'ai perdu, mes seules amies et gagné, une sale réputation, je respire enfin en rentrant. Je passe par la ruelle derrière le restau Benny's. Une voie ironiquement sombre. Même avec un peu de soleil, elle a l'air dangereuse. Mais j'en ressors toujours vivante. Un petit signe positif. En plus, j'ai ce trousseau de clés de défense. Bon je ne suis pas encore sûre de leur efficacité, vu que je n'ai toujours pas croisé d'individu chelou. Sachant que le seul individu que j'avais vu ici était un pauvre SDF.

Il a même eu peur de moi en pensant sûrement que je venais le stopper, de trouver quelque chose dans la benne. Déprimant. Je devrais sûrement me renseigner sur la meilleure façon d'utiliser tous les éléments de ce jouet fait pour blesser. Néanmoins, pour l'instant je préfère ne pas y penser. Je vais plutôt prier de rentrer chez moi en vie, maintenant que je me suis bourré le crâne avec cette peur. Je me perds dans la musique agressant mes tympans, quand une main me fige en se posant sur mon épaule.

Amina Camara t'es vraiment qu'une conne, les écouteurs à fond en plus de la ruelle louche? J'ai du mal à respirer, mais me retourne brusquement, prête à me battre pour ma vie. Je suis à nouveau choquée en trouvant Sebastien en face de moi. Un peu perdue, j'enlève mes écouteurs pour l'entendre dire:
-Ok Amina j...

Je ne sais pas ce qu'il se passe, mais avant de pouvoir réfléchir, je mets toute ma souffrance dans la gifle que je lui donne. À cause du choc provoqué par ce que je viens de faire, mes yeux s'écarquillent et ma bouche s'entrouvre. Sebastien, qui a mis sa main sur sa joue, est tout aussi abasourdi que moi, d'après son regard élargi. Je recule et me mets à courir paniquée. Malgré cela, assez rapidement, il manque de me faire tomber, en me tirant vers l'arrière par mon sac à dos. En m'arrêtant de me débattre en vain, je crie effrayée:
-Pardon! Me frappe pas!

Il me retourne doucement pour me tenir fermement par les épaules. Tandis que j'ai du mal à respirer à cause de la peur, il ferme brièvement les yeux comme pour réfléchir puis dit:
-Je te lâche si tu cours pas. Tu vas pas le faire hein?

Je secoue la tête et il le fait, mais je ne sais pas pourquoi je ne fuis pas. Il commence:
-Ok j'ai mérité la gifle, j'ai gâché ta journée.

J'ajoute amèrement:
-Et ma réputation, oh et maintenant j'ai plus d'amies non plus.

Il fronce les sourcils en disant:
-Merde.

Je le fixe maintenant ennuyée et il propose:
-Je sais. Je vais leur dire la vérité, que j'ai menti.

-Pourquoi tu t'en soucies maintenant? C'est trop tard de toute façon. Ça s'est répandu, et le truc c'est que personne n'en aura rien à faire que ce soit un mensonge. Parce que le fait que ce soit vrai est plus intéressant, plus amusant.

Il garde le silence. Il va rester comme ça longtemps? Je devrais me barrer. Il soupire puis me dit:
-Je sais pas pourquoi j'ai fait ça.

-Vraiment?

-Oui.

Je ne le crois pas une seconde, mais j'en ai déjà marre. Je demande:
-Ok, je peux rentrer chez moi?

-Attends je...je veux me faire pardonner.

-Je te l'ai déjà dit, il y a plus rien à faire.

-Ok...

Je me tourne et m'éloigne le plus vite possible, trop secouée.
Dans la soirée, je ne sais pas pourquoi je repense à Sebastien dans l'allée. Il avait l'air différent. Comme à la piscine, avant de pourrir ma vie. Pff. Je me noie dans ma couverture. J'appuie sur le "play" de mon livre audio sur une paysanne russe, se battant pour sauver son village de la famine, durant le Moyen-âge. Je me noie dans le drame, quand mon téléphone me fait sursauter en gazouillant. Je le déverrouille et me crispe en lisant les mots de Sebastien:

Wabi-SabiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant