Chapitre 3: Jenny

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J'ai envie de m'évaporer comme de l'eau sur du béton en plein cagnard. Pourquoi, mais pourquoi diable mes parents et ses parents sont-ils amis ? Pourquoi sont-ils complices de cette mise à mort lente de mon âme et de ma santé psychologique ?

— Il fait vraiment beau aujourd'hui, je ne comprends pas pourquoi tu portes cette tenue ma chérie, tu dois étouffer ! s'exclame ma mère, en tournant la tête depuis le siège passager pour me regarder.

— C'est juste pratique, je réponds, avec une moue dénuée d'expression.

— Un sweat-shirt alors qu'il fait 30 degrés c'est tout sauf pratique, réplique mon père en me regardant dans le reflet du rétroviseur.

— Bon, laissons la, il faut essayer de la comprendre, ce n'est évident, ni pour elle, ni pour Ezia cette histoire, explique ma mère.

— Ce ne sont que des gamineries, ils vont finir par bien s'entendre, j'en suis sûr.

Je pose mon menton sur mon poing, en regardant par la vitre de la voiture. Nous suivons la voiture de Thomas et Marie depuis une bonne heure maintenant, et une boule se dessine et prend de plus en plus de place dans mon ventre. Je n'ai pas envie de revoir cet imbécile, et encore moins de vivre avec lui. Ce n'était déjà pas suffisant qu'on soit voisin depuis notre plus tendre enfance, il faut maintenant qu'on soit colocataires. Quelle plaie...

Nous entrons dans une grande ville, et je reconnais alors celle de ma fac. On est vraiment tout près, et en effet, Thomas a mis ses warnings et se gare. Mon père l'imite, et se positionne juste derrière lui. Nous sommes dans une rue commerçante, avec un seul bâtiment comportant des appartements. Il est assez ancien, tout de briques rouges, et une ruelle se trouve juste à côté, avec des escaliers de secours.

On sort de la voiture, et Thomas nous fait signe de le suivre. J'avance, les mains dans les poches, en proie à une panique certaine, que je camoufle, comme toujours. Nous montons un escalier en colimaçon en bois. Dans le bâtiment il fait assez frais, ça fait du bien. Nous arrivons au troisième étage, devant la porte numéro 12. Thomas toque, et nous sourit. Mon père pose une main encourageante sur mon épaule, et je soupire. J'ai pas envie d'être là.

La porte s'ouvre, et le regard blasé d'Ezia balaye d'abord ses parents, puis les miens, et m'évite complétement, à mon grand soulagement. Il passe négligemment ses doigts pleins de bagues dans ses cheveux épais et noirs. Je remarque qu'il n'a toujours pas prit la peine de retirer ses piercings ridicules.

— En voilà un grand gaillard qui accueille ses parents ! lui fait remarquer Thomas avec sarcasme.

Il pose à son tour sa main sur mon autre épaule et me pousse la première à l'intérieur. J'ai le sentiment de commettre un crime rien qu'en mettant un pied sur le parquet de l'appartement. Ezia s'éloigne tellement que j'ai l'impression de sentir mauvais, mais ça me va.

Mes parents me suivent et ma mère prend Ezia dans ses bras. Je réprime la grimace qui fait trembler les muscles de mon visage, et reste debout, comme un piquet, au milieu de la pièce qui semble être le salon.

— Ca va mon grand ? demande mon père à Ezia.

— Ouais... marmonne ce dernier, sans grande conviction.

— C'est grand hein ? Viens voir Jenny ! Ta future chambre !

Marie prend mon bras, forçant à sortir ma main de ma poche, et me tire jusqu'à une porte.

— Non ! Ça c'est MA chambre, grogne Ezia.

Je frissonne, mais ne laisse rien transparaitre.

— Oh, soit un peu plus aimable ! râle Marie.

Let's paint Apples (premier jet)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant