23. Voilà ton parti !

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Gabriel ouvrit un œil vitreux, la douleur pulsant à travers son crâne et brouillant sa vision tandis que son ventre irradiait. Tout semblait irréel, comme s'il était plongé dans un trouble dont il ne parvenait pas à s'extraire. Par réflexe, il glissa sa main sur ses abdominaux et sentit son pull mouillé, collant, teintant un peu plus ses doigts de rouge.

Son agresseur, sans que le ministre ne sache pourquoi, lui avait asséné un coup de tesson de bouteille au niveau de son abdomen. Par chance, son sweat était épais et semblait avoir absorbé une bonne partie du coup porté, mais cela n'avait pas empêché le verre d'atteindre sa chair et de l'entailler.

Au milieu de sa vue floue, la silhouette imposante d'un homme à la large carrure se dessinaient dans le chaos qui l'entourait, se battant furieusement avec l'homme qui avait tenté de le violer et qui venait de le blesser. La poigne féroce qui l'étranglait et qui l'avait maintenu à genou au sol avait également disparu. Mais Gabriel ne s'en rendit pas compte immédiatement, comme si son esprit se refusait à comprendre ce qui se passait, obnubilé par le sang qui imprégnait ses vêtements et de la souffrance lancinante qu'il subissait.

Le temps semblait s'étirer avec une lenteur insupportable, chaque seconde se transformant en heure suffocante.

À bout de force, il s'effondra sur ses talons, restant à genoux, ses muscles tremblant sous l'effort.

Son regard, embué et lointain, contemplait la scène avec une sorte de détachement, comme si son cerveau était égaré, comme s'il était devenu plus spectateur qu'acteur face à la bagarre entre l'inconnu et ses agresseurs. Les bruits des coups, les grognements, les cris...tout se mêlait en un brouhaha lointain, presque irréel et étouffé, incompréhensible.

Ce ne fut qu'après ce qui lui sembla être une éternité, que Gabriel prit conscience de la situation : les deux hommes qui l'avaient agressé gisaient désormais inertes sur le sol, leurs visages défigurés et baignés de sang. Une sensation étrange se glissa en lui, un mélange de soulagement et d'horreur, comme s'il venait d'assister à une scène sortie d'un cauchemar trop réel pour être simplement écarté.

Soudain, un sursaut d'adrénaline désespéré le saisit, et il tenta de se redresser. Mais son corps, brisé par les coups, ne le suivait pas. Ses côtes, meurtries, lui arrachèrent un cri silencieux alors qu'il luttait pour retrouver son souffle. La douleur était si intense qu'elle lui coupa la respiration, l'obligeant à agir par à-coups, chaque mouvement aggravant l'agonie qui irradiait dans sa poitrine.

Pourtant, il lutta contre la douleur, contre l'épuisement, pour se relever.

Alors qu'il luttait pour se tenir debout, la silhouette de l'inconnu qui l'avait sauvé se rapprocha, se découpant plus nettement sous la lumière crue des réverbères. Chacun de ses pas semblait résonner dans l'air frais de la nuit.

Un frisson glacé parcourut l'échine de Gabriel lorsqu'on s'adressa à lui, d'une voix à la fois familière et inattendue, qui s'éleva doucement dans le silence nocturne, teintée de crainte :

- Gabriel...

Son nom, prononcé par cette voix qu'il aurait reconnue entre mille, fit trembler le ministre jusqu'au plus profond de son être. Son esprit, encore engourdi par le choc, refusa d'accepter la réalité. Elle glaça ses veines, réveillant une peur primordiale au fond de lui.

- Bar...de...lla... , balbutia-t-il, ses mots hésitants arrachés à son corps exténué, trahissant l'effort immense qu'il fournissait pour articuler ce simple nom.

La peur cédait peu à peu la place à une colère sourde, une vague de rage qui l'envahissait et bouillonnait en lui, alimentée par l'injustice de la situation.

La France brûlera pour Nous, Le Monde brûlera pour ToiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant