14. Suite des festivités

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Le Gala battait son plein à l'Élysée, un tourbillon d'élégance et de décadence où les éclats de rire et le tintement des flûtes de champagne résonnaient sous les hauts plafonds dorés. Les bouteilles se succédaient sans fin, et les langues, déliées par l'alcool, laissaient filtrer des confidences, des échanges complices et des promesses informelles.

Gabriel était là, au cœur de l'attention de certaines personnes, parfois trop insistantes. Il était l'un des plus jeunes de la réception, attirant immanquablement ceux avides de s'exposer avec la fraîcheur et l'énergie de la jeunesse à leur bras.

Bien des regards se posaient sur lui, aucun ne pesait aussi lourd que celui de Jordan, posté à une distance calculée, mais immanquablement connecté à chacun de ses mouvements. Même lorsque le jeune homme s'entretenait avec des convives, essentiellement des femmes se faisant particulièrement charmeuses à ses côtés, échangeant des sourires ou des propos légers, son attention restait étrangement focalisée sur Gabriel, alerté par les quelques mots de son ainé un peu plus tôt dans la soirée. Il ressentait le besoin de superviser les festivités de loin.

Gabriel, en revanche, semblait déterminé à échapper à cette fixation. Il évitait sciemment le regard de son rival et des femmes qui ondulaient près de lui. Mais à mesure que les heures passaient, il se laissait de plus en plus emporter par le flot d'alcool qui circulait librement.

Le jeune ministre se voyait demandé pour trinquer ça-et-là. Bientôt, l'ébriété pulsait dans ses veines, baissant les barrières des formalités. Les sourires devenaient plus faciles, les gestes plus décontractés, et il ne remarquait plus vraiment ces mains, parfois un peu trop aventureuses, qui s'attardaient sur son bras ou frôlaient son dos.

Alors que la soirée avançait, un homme au regard prédateur et aux tempes grisonnantes, manifestement beaucoup plus âgé que Gabriel, s'approcha de lui avec une familiarité qui aurait peut-être mis Gabriel mal à l'aise en d'autres circonstances.

Mais dans cet état d'ivresse, ce dernier ne perçut que la chaleur du bras qui se glissait autour de sa taille, ne trouvant pas le geste plus déplacé qu'une simple poigne de main.

Le vieux lui murmura au creux de l'oreille :

-Vous êtes vraiment de charmante compagnie, Monsieur Attal. Si cela vous tente, nous pourrions nous éclipser un moment, j'ai quelque chose de particulier à...vous proposer..., suggéra l'homme, laissant ses doigts épais courir légèrement sur la taille du jeune ministre.

Gabriel, un sourire amusé aux lèvres, laissa échapper un rire cristallin et, sans y penser, commença à suivre son interlocuteur.

Ils se dirigèrent vers une porte dérobée, une issue discrète qui semblait promettre un instant de répit loin de l'agitation. Mais à peine avait-il franchi le pas de cette porte que Gabriel se heurta soudainement à une présence immobile, une masse solide de tissu sombre qui lui bloquait le passage. Instantanément, il releva la tête et trouva deux prunelles noisette qui l'observaient.

L'expression de Jordan était indéchiffrable, mais ses yeux parlaient d'eux-mêmes.

Avant que Gabriel ne puisse dire ou faire quoi que ce soit, le jeune homme lui retira délicatement mais fermement la flûte de champagne qu'il tenait. Il ne prononça pas un mot, mais toute son attitude exprimait une réprobation silencieuse, presque possessive. Il vida cul-sec le verre, pour l'éloigner de l'alcool, coupant court à la consommation de son ainé.

Un éclair de contrariété traversa le regard de l'homme plus âgé qui accompagnait Gabriel, mais Jordan ne lui laissa pas le temps de réagir, se tournant vers lui en baissant la tête, son expression passant d'une courtoisie formelle à une dureté impitoyable :

La France brûlera pour Nous, Le Monde brûlera pour ToiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant