7. La Fresque du Climat

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Depuis le dernier débat, la culpabilité n'avait cessé de nourrir les pensées de Gabriel, s'infiltrant dans chaque recoin de son esprit, insidieuse. Lui qui, d'ordinaire, maîtrisait ses paroles avec précision, avait laissé échapper une remarque désobligeante et personnelle à l'attention de son rival politique. Ce moment restait gravé dans sa mémoire, un souvenir qui, malgré tous ses efforts pour l'effacer, continuait de le hanter.

Jordan Bardella, d'habitude si prompt à se lancer dans de nouvelles joutes verbales, s'était fait plus silencieux depuis cet échange. Toute nouvelle discussion politique devant les caméras avec Gabriel avait même été refusée, une décision inhabituelle pour quelqu'un qui semblait prendre un malin plaisir à le provoquer. Ce refus provoquait un sentiment contrasté dans le cœur du jeune ministre : un mélange d'amertume, de culpabilité et, plus étonnant encore, d'une légère tristesse.

Gabriel essayait tant bien que mal de passer à autre chose, de dédramatiser la situation et de se convaincre que ce n'était qu'un jeu politique, que Bardella n'était après tout que le porte-parole de l'Extrême-Droite, pas un ami... et pourtant, il n'arrivait pas à étouffer cette émotion sourde qui lui nouait l'estomac.

Cela faisait quelques jours déjà que son attention vacillait par moments, lui qui était d'ordinaire si rigoureux au travail. Ses pensées divaguaient plus souvent qu'il ne l'aurait voulu, et chaque fois qu'il tentait de se recentrer, il se retrouvait à penser à ce dernier échange et aux mots qui avaient dépassé sa pensée.

Un stylo frénétiquement secoué, et parfois mordu, témoignait de son état intérieur, trahissant sa nervosité.

Assis à un bureau adjoint à un autre dans une pièce, Gabriel fixait toujours un point indéfini devant lui, totalement absorbé par ses souvenirs, ses yeux passant sans les voir sur les dossiers empilés devant lui.

– Gabriel ?

Une voix douce et légèrement inquiète résonna dans la pièce, mais Gabriel ne réagit pas, perdu dans ses pensées, le stylo continuant de battre un rythme irrégulier contre la table.

– Gabriel ? répéta la voix, cette fois-ci plus insistante.

Le jeune homme agita toujours son crayon, ses yeux divaguant dans ses fiches, n'entendant toujours pas la voix qui l'appelait. Un léger soupir s'échappa des lèvres de son interlocuteur :

– Gabriel Attal !

Le ton plus haut cette fois-ci sortit Gabriel de ses songes. Pris d'un sursaut, il renversa son verre d'eau sur la table dans un mouvement brusque, l'obligeant à se lever précipitamment pour sauver ses précieux documents de l'inondation.

– Oups... Pardon ! lâcha-t-il par réflexe, les joues en feu sous la honte qui montait.

Ses mains tremblantes saisirent des serviettes en papier qu'on lui tendait rapidement, absorbant le liquide qui menaçait d'endommager les documents. Lorsque son regard remonta enfin, il se trouva face à deux prunelles d'un bleu saphir, une lueur interrogative et un brin préoccupée brillant en leur cœur.

– Monsieur le Président, veuillez m'excuser, j'avais l'esprit ailleurs..., fit Gabriel, honteux, alors qu'il continuait d'éponger la table avec un empressement maladroit, renversant un pot de crayon au passage et ne pouvant retenir un juron

Le Président Emmanuel Macron, dont le regard perçant ne quittait plus son apprenti, l'observa en silence pendant un long moment, avant de s'approcher lentement de lui. L'immobilité de ses paupières ajoutait à la pression déjà palpable dans la pièce, créant une tension presque tangible.

– Tout va bien, Gabriel ? J'ai remarqué que tu étais souvent déconnecté ces derniers temps, fit remarquer Macron, ses yeux scrutant chaque infime réaction sur le visage de Gabriel.

La France brûlera pour Nous, Le Monde brûlera pour ToiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant